La situation politique toujours bloquée, la mairie aussi

Mis en minorité au conseil municipal, le maire Michel Pons (DVD) s'active pour retrouver sa majorité. Le préfet a permis à la commune de continuer à fonctionner.

Depuis le 21 décembre et un conseil municipal dont les 13 délibérations ont été rejetées à bulletins secrets par une majorité d’élus, la situation politique est au point mort à Villennes-sur-Seine, 5200 habitants. L’opposant Pierre-François Degand (LREM) et l’ex-premier adjoint débarqué il y a un an, Olivier Hardouin (LREM), se prévalent de 19 voix. Le maire Michel Pons (DVD) met en doute cette large majorité et déplore l’ambition de son ancien bras droit.

Les conséquences immédiates les plus concrètes de cette interruption de la vie politique de Villennes-sur-Seine concernent le budget, des délibérations importantes n’ayant pu être votées. « Le préfet m’a dit qu’on pouvait avancer comme ça, on pourra faire fonctionner la mairie, rassure aujourd’hui Michel Pons. Pour le quotidien, il n’y a pas de problème, on reçoit des fonds, on a de la trésorerie disponible. La problématique est pour les investissements. »

Les subventions aux associations ne pourront ainsi être versées avant que ne soit théoriquement voté le budget en avril. Tous les chantiers prévus vont aussi devoir être mis en pause jusque-là. « J’irai voir les écoles, les associations, indique le maire de la situation actuelle. Vous n’aurez pas ce que vous pourriez demander, il manque un banc, des chaises, et bien, je ne pourrai pas, adressez-vous à Mme Thomassen (adjointe aux affaires scolaires, Ndlr), adressez-vous à Olivier Hardouin. »

Politiquement, le coup de semonce, qui a fait « énormément parler » dans les rues de la commune selon Pierre-François Degand, laisse Michel Pons de marbre. « Si on était sur un navire, ce qu’il se passe serait une mutinerie », résume pourtant Olivier Hardouin pour qui « il ferait bien de comprendre le message et de partir ».

Le maire tente aujourd’hui de retrouver l’adhésion de ses colistiers de 2014, du moins ceux ayant précédé la fusion, entre premier et second tour, avec la liste de Jean-Michel Charles (LREM), à laquelle appartenait Olivier Hardouin. Ils l’avaient ensuite emporté face à la liste de Pierre-François Degand. L’union a volé en éclats il y a un an, lorsque Michel Pons a retiré ses délégations à Olivier Hardouin. La « vengeance » serait ainsi un de ses mobiles.

« L’autre raison est qu’il veut être maire. Evidemment, il a enfourché le cheval LREM, pointe le maire, sarcastique. L’idée, c’est de faire démissionner le maire, le remplacer, et comme ça, il est en position de force pour les prochaines élections dans deux ans. C’est ça le truc, il s’en cache à peine d’ailleurs. » Si la démission du maire n’engendrerait qu’une nouvelle élection au sein du conseil municipal, celle d’une majorité des membres du conseil municipal provoquerait un nouveau scrutin pour tous les Villennois.

Ce coup de semonce politique a fait « énormément parler » dans les rues de la commune, selon le conseiller d’opposition Pierre-François Degand (LREM).

« Ce n’est pas aujourd’hui la volonté des membres du conseil, la volonté est plutôt de trouver une personne de consensus au sein des élus actuels, assure Olivier Hardouin en favori d’une élection interne. Deux ans, c’est une période un peu courte, il faut faire avec les hommes et les femmes aujourd’hui élus. » Pourtant, le perdant de 2014, Pierre-François Degand, aujourd’hui suppléant de la députée LREM Natalia Pouzyreff, confiait ce lundi « ne pas voir » d’un mauvais oeil une démission collective. Il serait alors en position de force pour l’investiture LREM.

Elu depuis un quart de siècle à Villennes-sur-Seine, maire depuis 2014, Michel Pons balaie l’idée de sa démission. « Il n’y a pas de problème sur le fond du mandat, qui concernerait le fait qu’on n’ait rien fait, seulement un problème d’ambition d’une personne qui est arrivée là par sa capacité à affirmer des choses, qui parle haut et fort, par sa capacité à retourner les gens provisoirement en leur racontant n’importe quoi, déplore-t-il. C’est un problème purement interne au conseil municipal. »

Le 21 décembre, sa mise en minorité a constitué une surprise pour l’édile. « Si je m’attendais à un coup, je ne m’y attendais pas maintenant, mais plutôt au vote du budget (en avril, Ndlr), donc je ne me suis pas trop méfié. » Depuis ce soir-là, il a « fait le tour de certains » des 19 conseillers ayant voté systématiquement contre ses délibérations, notamment les absents qui avaient donné leur pouvoir à d’autres élus.

Plusieurs n’auraient « pas compris que c’était pour déstabiliser le maire et mettre la pagaille », affirme Michel Pons. « Il a lancé des consultations auprès de certains élus qui sont des personnes de sa liste initiale, mais je ne crois pas que ça ait donné de grands résultats positifs, infirme de son côté l’ex-premier adjoint. Il a plutôt eu de la part de ses proches le conseil de partir la tête haute plutôt que de rester dans sa position initiale. »

Entre les deux hommes, les attaques, autrefois feutrées, sont maintenant ouvertes. Michel Pons s’élève contre l’idée que les questions d’urbanisme et l’opacité les entourant aient été la cause principale de l’éjection d’Olivier Hardouin de ses responsabilités, comme ce dernier l’estime. « C’est un mensonge de plus », souffle l’édile en évoquant son vote du Plan local d’urbanisme (Olivier Hardouin répond qu’aucun des projets litigieux n’a été soumis au vote des élus, Ndlr)

« C’est simplement pour son comportement en interne au sein du conseil municipal et de la mairie en général, et même vis-à-vis de la population, rectifie-t-il. Son côté grande gueule impolie, sûr de lui, croyant remplacer le maire, et traitant les autres élus de trois fois rien alors que lui est premier adjoint, et parler pareil à la population, à un moment, ça suffit. » Olivier Hardouin, lui, « ne pense pas correspondre » à des propos qu’il attribue aux « 30 ans » qui les séparent, même s’il assume ses ambitions politiques « comme M. Degand », glisse-t-il.

« Face à un problème, je rencontre et je m’explique avec les gens, je suis dans la communication et dans la transparence. M. le maire a une manière de faire totalement différente, décrit surtout le quadragénaire. Il est plutôt dans le flou, dans l’image du secret et de l’opacité, à surtout ne jamais faire front quand il y a un conflit. Il laisse pourrir et s’envenimer les situations. […] Il est capable de dire blanc le vendredi et noir le lundi sur le même sujet, donc forcément, ça crée des décalages. »

La prochaine échéance politique est constituée par les voeux de Michel Pons, ce samedi 13 janvier. « Je n’en parlerai pas lourdement, je ferai peut-être une allusion », indique ce dernier. « Je laisse les gens prendre la mesure de leurs responsabilités, poursuit-il du prochain conseil, qui ne sera pas avancé et est prévu en février. J’espère que, d’ici là, j’aurai un peu corrigé le tir, et sinon, et bien, on verra… »

Mise à jour, 10 janvier 2018 : Olivier Hardouin souhaite éviter « tout amalgame » entre son appartenance politique à LREM et la « démarche pour le départ du maire de Villennes ». Il précise donc que « ce mouvement est un mouvement collégial d’élus de tous bords (majorité, opposition, indépendant…) », et assure : « Nous ne faisons pas cette démarche dans un but partisan, mais apolitique pour l’interêt général de Villennes et des Villennois. »