Jean-François Beynel, premier procureur de la cour d’appel de Versailles, se veut modeste. « Vous auriez pu venir à Pontoise, Chartres ou ailleurs, vous auriez constaté que c’est la même chose partout » lance-t-il à l’attention de Didier Migaud. Le garde des Sceaux était en déplacement dans la ville-préfecture afin de constater les différents dispositifs mis en place dans le but de lutter contre les violences intrafamiliales. Et même si cela découle d’une politique nationale, l’instance judiciaire n’a pas lésiné sur les moyens pour l’appliquer.
« Elles ont apporté une volumétrie inédite avec des caractéristiques différentes pour chaque affaire » explique Maryvonne Caillibotte, procureur de la République de Versailles. Seul point commun entre tous les dossiers : la notion d’urgence car derrière il y a toujours une notion de danger. Pour cela, le pôle spécialisé du Tribunal de Versailles a vu ses effectifs passer de 6 à 8 personnes, avec un renforcement de la permanence électronique et téléphonique. Il y a également six séances en plus uniquement dédiées à ces affaires au tribunal correctionnel.
La juriste spécialisée en violences intrafamiliales présente ensuite le téléphone grave danger. Ce smartphone – qui doit être constamment allumé et jamais mis en mode vibreur – permet d’appeler un service de téléassistance accessible 7j/7 et 24h/24. « L’ex-compagnon violent ne sait évidemment pas que son ex-conjointe en a un » précise-t-elle. En 2020, 25 avait été distribués, il y en a actuellement 73 en service, entraînant « un déclenchement en moyenne tous les deux mois ». Par ailleurs, le bracelet antirapprochement peut être utilisé en tant qu’alternative au téléphone grave danger. Toutefois, il n’est pas toujours fiable en zone urbaine à cause des pertes de réseaux. Celle-ci entraîne alors des interventions parfois « inutiles ». Mais Olivier Dimpre, le patron de la police nationale des Yvelines, les voit plutôt d’un bon œil : « Au moins, cela leur rappelle que nous sommes toujours sur leur dos. » Et surtout, elles sont noyées dans la masse, ne représentant que 1 % des opérations menées par police secours.
Enfin, dernier dispositif passé au crible : les ordonnances de protection. Pour protéger la victime, le juge peut prononcer à l’encontre du conjoint violent plusieurs interdictions comme celle d’entrer en contact avec la victime. « Nous avons six jours pour traiter ces affaires, nous le faisons en 5,97 jours » souligne Isabelle Regniault, vice-présidente coordonnatrice du service des Affaires Familiales.
Satisfait de cette présentation, « il faut montrer combien la Justice s’efforce d’accompagner les victimes », Didier Migaud reste réaliste. À l’heure des coupes budgétaires, le ministre de la Justice fera tout pour « obtenir des moyens supplémentaires » afin de répondre aux attentes sur les violences intrafamiliales et conserver ces chiffres prometteurs.