Une nouvelle adaptation de Jack London pour Pierre-Emmanuel Dequest

Dans le milieu depuis une dizaine d’années, l’auteur de bandes dessinées Pierre-Emmanuel Dequest a sorti un nouvel album le 7 mai : L’homme et le loup. Ainsi, il signe sa troisième adaptation de l’écrivain Jack London.

Pourquoi avoir adapté une nouvelle fois Jack London ?
En réalité, je voulais adapter des romans un petit peu moins connus, plutôt quand il arrive à la fin de sa carrière. Mais l’éditeur m’avait dit, non, que pour eux, Jack London, c’est Croc Blanc, L’appel de la forêt… Mais après avoir édité les deux, j’ai pu choisir une nouvelle.

Est-ce un auteur que vous ­appréciez ?
C’était un homme de paradoxe. Il a été élevé par une nourrice noire qui l’appelait « mon bébé Blanc ». Pourtant, il paraît qu’il partageait quelques théories raciales. Je n’ai pas trouvé beaucoup de choses dessus dans ses écrits mais je les ai glissées dans la bande dessinée. Il y a deux pauvres types qui en parlent. Par ailleurs, je sais qu’il était du mauvais côté de la Révolution mexicaine.

Ses ouvrages font plus d’une centaine de pages, les vôtres une cinquantaine. Comment avez-vous fait pour réduire autant ?
La BD, c’est l’art de la synthèse. Par exemple pour Croc Blanc, qui est un roman particulièrement épais, il y a tout un chapitre sur son père avec une bataille entre ce loup borgne et un porc épic. J’ai juste dessiné une petite case avec lui qui revient le porc épic dans la gueule. Ce n’est pas grand-chose, mais on comprend bien ce qu’il s’est passé.

Combien de temps cela prend pour dessiner une BD ?
Je ne dessine pas pendant 10 heures d’affilée, j’essaye de réaliser à peu près 6 pages par mois. D’ailleurs, à la fin de L’homme et le loup, je commençais à avoir mal à la main, ce qui me posait quelques problèmes. Des musiciens ont le même souci donc, je fais attention.

Quels types de techniques utilisez-vous ?
Je mélange l’aquarelle et l’encre acrylique car ils sont totalement miscibles. Le premier permet d’avoir plus de douceur et de travailler sur les carnations. Avec l’acrylique, je peux avoir des couleurs un petit peu plus fortes. De plus, quand c’est sec, on peut revenir dessus, ce qui n’est pas du tout le cas avec l’aquarelle.

L’ouvrage L’homme et le loup est paru le 7 mai aux éditions Plein Vent.

On trouve beaucoup de scénarios adaptés dans votre bibliographie. Est-ce qu’actuellement vous ­travaillez sur une histoire ­originale ?
C’est en cours. J’ai déjà écrit 15 pages mais je ne l’ai pas encore envoyé. Il me tient vraiment au cœur. Cela se passe au temps des vikings avec un mélange de fantastique. Par ailleurs je viens de terminer une collaboration avec Rodolphe (grand nom dans le monde de la BD, Ndlr) sur Olive Oatman. Des femmes de l’Ouest américain, on ne connaît que Calamity Jane, pourtant, elle aussi était étonnante avec son tatouage sur le menton. L’album sort en septembre.

À côté de ça, je suis en train de collaborer avec Philippe Guillaume (ancien président de Bulle de Mantes). Nous avons imaginé une histoire en trois tomes qui se déroule pendant la Guerre d’Espagne. À cette période, l’URSS avait fait rapatrier l’or des réserves espagnoles vers Moscou, et sur les neuf convois, il y en a qui ont disparu. Donc nous écrivons ce qui aurait pu se passer avec des recherches précises de Madrid et Barcelone de l’époque. Par exemple, il a fallu recréer une caserne qui n’existait plus mais nous avons réussi à trouver quelques photos en noir et blanc.

Quel prix avez-vous remporté ­durant votre carrière ?
J’ai une BD pour enfant qui avait été sélectionnée pour un prix pour enfant en 2016. Elle faisait partie d’une liste de dix retenues par des CM2. Ça se passait dans le département de la Mayenne et je me souviens qu’il y avait un petit livret sur ce que les enfants avaient retenu et il y avait Thomas. Il disait « cette BD elle fout vraiment trop les chocottes. »

Les métiers autour de la BD sont plutôt précaires, comment vous en sortez-vous ?
Quand j’étais juste illustrateur, j’avais du boulot pour 2-3 mois. Le problème est qu’il y a une petite crise actuellement. Les auteurs sont de moins en moins bien payés. Moi, je compte vendre mes originaux pour gagner un peu plus. Et comme j’ai signé pour la trilogie sur la Guerre d’Espagne, j’ai deux ans et demi de boulot devant moi. Donc je ne suis pas à plaindre.