La qualité à vau-l’eau

La qualité sanitaire de l’eau potable est aujourd’hui largement conforme aux normes de sécurité sanitaire, grâce aux traitements techniques poussés de l’eau pompée. La situation des eaux souterraines reste en effet problématique.

« Ces vingt dernières années, nous n’avons pas d’amélioration de la qualité des eaux forées. » Ce constat, n’est autre que celui de l’Agence de l’eau Seine Normandie, établissement public chargé de la surveillance et de l’amélioration de la qualité des eaux de la Seine. Il a été émis il y a une dizaine de jours, lors de la signature d’un contrat d’animation destiné à protéger la nappe souterraine dont l’eau alimente l’usine de production et de traitement de Suez, à Flins-sur-Seine.

En effet, si la technique a permis de faire largement progresser l’aspect sanitaire de l’eau potable, les efforts se concentrent aujourd’hui sur la diminution des rejets aboutissant dans les nappes phréatiques. Les entreprises industrielles ont largement répondu présent ces dernières années, réduisant leurs rejets. Mais, comme pour les collectivités, les particuliers et les agriculteurs, des efforts massifs restent à faire afin de réduire l’utilisation de désherbants, pesticides et engrais.

« Nous inventons de nouvelles molécules tous les jours, la plupart très utiles et pertinentes, mais l’eau est réceptacle de ces reflets de notre vie, note Gilles Boulanger, directeur régional de Suez, dont les 120 000 m3 produits chaque jour dans l’usine alimentent 500 000 habitants. Une partie des molécules vont repartir dedans. »

La mauvaise qualité des nappes phréatiques a d’importantes conséquences, comme à l’usine de production de Flins-sur-Seine, où Suez investit régulièrement dans de nouveaux traitements.
La mauvaise qualité des nappes phréatiques a d’importantes conséquences, comme à l’usine de production de Flins-sur-Seine, où Suez investit régulièrement dans de nouveaux traitements.

« Ce champ captant est altéré par des pollutions des eaux brutes dont certaines sont assez importantes, précise la responsable de l’Agence de l’eau. Ainsi pour les nitrates, les captages de la plaine alluviale en sont exempts, mais les taux atteignent 50 à 100 mG/L pour certains au pied des côteaux (la limite sanitaire est de 50 mG/L, Ndlr). »

Cette qualité insuffisante engendre un coût payé en bout de chaîne par l’usager. L’usine de captage de Suez en est témoin, avec ses doubles traitements systématiques. L’entreprise a ainsi investi, par exemple, 1,5 million d’euros sur le site pour mettre en place un nouveau procédé de géofiltration en 2005. Le contrat d’animation signé ce jour-là vise à inciter collectivités, entreprises, agriculteurs et particuliers à réduire voire supprimer l’utilisation de produits phytosanitaires et d’engrais. Il concerne 4 860 ha autour du champ captant, des Mureaux à Guerville. Les collectivités, dont très peu ont supprimé les désherbants en vallée de Seine, en auront d’ailleurs l’obligation en 2020.

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Eau potable et pesticides : le Vexin en première ligne

Les traitements mis en place dans les usines de production d’eau potable permettent de réduire les niveaux de nitrates et de pesticides en-dessous, voire bien en-dessous, des seuils sanitaires obligatoires. Néanmoins, certaines petites communes alimentées par des captages aux traitements moins poussés continuent d’avoir des dépassements occasionnels.

Toutes se situent dans le Vexin : Drocourt, Fontenay-Saint-Père, Gaillon-sur-Montcient, Montalet-le-Bois et Oinville-sur-Montcient. La substance concernée est le déséthylatrazine, issue de la dégradation de l’atrazine, un herbicide de synthèse utilisé depuis les années 1960. Interdit en 2001, il reste toutefois présent dans le sol et continue donc de polluer les eaux souterraines.

En 2013 et 2014, dernières années où des données sont disponibles, de légers dépassements du seuil sanitaire de 0,1 µG/L ont été mesurés de façon temporaire mais parfois récurrente dans l’eau potable des cinq communes citées ci-dessus. Si l’Agence régionale de santé (ARS) n’a pas établi de restrictions de consommation, elle a demandé la mise en place d’un plan d’action.

MEULAN-EN-YVELINES – Mise en place d’un plan de protection des captages

Depuis le 15 février jusqu’au 15 mars se déroule une enquête publique à Meulan-en-Yvelines. Elle permet aux citoyens de consulter et commenter la mise en place à venir d’un plan de protection des quatre captages d’eau meulanais, gérés par Veolia. Il engendrera un certain nombre de prescriptions. Collectivités, agriculteurs,entreprises et particuliers sont concernés par des déclarations et recommandations visant en priorité les pesticides et désherbants.

« En règle générale, toute activité nouvelle ou existante devra prendre en compte la protection des ressources en eau souterraine », édicte ainsi le plan. Ainsi, « toutes les nouvelles excavations atteignant la nappe seront interdites », les dérogations éventuelles devant être validées par les services de l’Etat. Les dépôts de déchets inertes, eux, seront strictement interdits, et pas question de forer de nouveaux puits ou captages sans avis de l’administration.

Les aires de stockage et de préparation des produits phytosanitaires devront être déclarées. Leur utilisation « devra se faire dans le respect des modes d’emploi », documents à l’appui et à conserver pendant trois ans pour les professionnels. En ligne de mire, entre autres, figure le glyphosate de Monsanto, dont le produit de dégradation est très présent dans les cours d’eau. Les agriculteurs sont également censés faire régulièrement vérifier leur matériel de pulvérisation.