Gares : un avenir entre fermetures et automatisation ?

La nouvelle organisation des équipes en gare de la SNCF provoque des remous chez les cheminots comme chez les élus. Ces derniers craignent, à terme, des gares sans personnel.

Gares fermées, gares totalement automatisées : les premières l’ont été régulièrement, par intermittence, ces derniers mois le long de la ligne J, les autres ne le sont pas encore mais inquiètent associations d’usagers et élus locaux, qui y voient un pas supplémentaire vers l’absence de personnel dans les gares. La refonte des organisations des agents en gare, lancée depuis plusieurs mois, n’est pas faite pour les rassurer.

Il y a deux semaines, la CGT Cheminot a ainsi mené plusieurs actions dans les gares de Cergy-Préfecture (Val d’Oise), Poissy et Houilles-Carrières. Leur objectif était d’informer les usagers sur la fermeture de certaines gares et de leurs guichets sur les lignes Transilien L et J ainsi que sur le RER A. En ce 3 mai, ils sont six cheminots à s’être postés à l’entrée de la gare sur le parvis Georges Pompidou.

Ils s’opposent à la mise en place de la réforme des « petits collectifs », mise en place en novembre dernier. « Il s’agit de rendre mobile le personnel commercial, détaille Cédric Gonne, secrétaire général CGT des cheminots d’Achères. En clair, au moment de la prise de poste, le personnel peut être affecté dans une autre gare. »

Ainsi, sur les trois lignes, les secteurs peuvent comprendre de trois à sept gares. Celui de Poissy en comprend trois, avec Houilles-Carrières-sur-Seine et Sartrouville. Mais sur l’ensemble des lignes, « il y a 70 postes qui ne sont pas couverts », déplore Cédric Gonne. Un manque d’effectifs qui obligerait à ouvrir les gares « selon les priorités » et en délaissant les plus petites.

Une situation que connaît ce cheminot. Lui travaille sur le secteur de Conflans-Sainte-Honorine, qui comprend six gares pour cinq agents et un chef d’équipe : « Systématiquement, il y en a une qui est fermée », détaille-t-il de la situation. Avant d’ajouter que les gares privilégiées sont celles de « Conflans, Cormeilles-en-Parisis et le Val d’Argenteuil car elles sont accessibles aux personnes à mobilité réduite ».

Pour Cédric Gonne, « on déshumanise les gares et on habitue les usagers à ne plus avoir personne ». Car le temps que le cheminot change de poste, « la gare peut être fermée pendant une heure ou deux ». C’est pour cela que le syndicat compte sur la mobilisation des usagers. Pendant ces trois jours, plus de 1 200 signatures ont été récoltées. « Ce qu’on demande, c’est une présence du premier au dernier train. »

Les fermetures, elles, sont moins fréquentes qu’en début d’année mais restent régulières. « Pourriez-vous remettre du personnel tous les jours dans la gare, souvent fermée ? », a ainsi demandé un usager quinquagénaire la semaine dernière, lors d’une réunion publique organisée pour présenter l’extension du RER E à Aubergenville. Le Comité des usagers des transports de l’Ouest francilien a d’ailleurs récemment déploré la situation dans un courriel envoyé à la SNCF et publié sur Facebook.

« Nous constatons que vos engagements de maintenir les gares de Rosny, Bonnières et Bréval ouvertes ne sont pas tenus », écrit Sylvie Dupuy, la vice-présidente du Comité. Pierre-Yves Dumoulin (LR), adjoint à Rosny-sur-Seine et vice-président en charge des transports à la communauté urbaine Grand Paris Seine et Oise (GPSEO), confirme les fermetures bonniéroises.

A Aubergenville, Cédric Moreau, directeur adjoint – établissement gares Transilien, répondait pourtant par la négative à l’usager cité ci-dessus : « Il n’y a pas de gares fermées, il y a parfois des gares pas tenues, où on n’a pas d’agent au guichet, ce qui ne veut pas dire qu’il n’y a pas d’agent dans la gare. » Selon lui, « vous aurez toujours un agent SNCF pour vous renseigner et répondre à vos questions ».

« Sur les gares de GPSEO, à ma connaissance, aujourd’hui, il n’y a pas de souci », indique Pierre-Yves Dumoulin, qui avait d’ailleurs poussé un coup de gueule contre les fermetures intempestives de gares, dans La Gazette il y a quelques semaines. Lui s’inquiète aujourd’hui de l’automatisation complète à venir des gares d’Aubergenville et des Mureaux, annoncée récemment aux élus par la SNCF, et de la fermeture éventuelle des gares les plus petites du département.

« La politique de la SNCF est, à terme, de fermer certaines gares. Le nombre de montées journalières sera déterminant, indique-t-il tout en assurant que, selon ses informations, les gares de GPSEO ne seraient pas concernées. A la louche, au-dessous de 1 000 montées par jour, il est fort probable que ces gares soient fermées, entre 1 000 et 2 000, elles seraient ouvertes à des heures choisies, le matin, et fermées l’après-midi. »

Lors d’une récente réunion, il a par contre protesté lorsque les responsables de la SNCF lui ont indiqué que l’automatisation complète des gares d’Aubergenville et des Mureaux était prévue dans le cadre des travaux d’aménagement préparatoires à l’arrivée du RER E. La communauté urbaine est d’ailleurs en train d’envoyer un courrier déplorant ce choix auprès du Syndicat des transports d’Île-de-France (Stif).

« La gare s’ouvrira et les automates se mettront en route tout seuls. Ils disent qu’en automatisant, il n’y a plus de problème de personnel, mais c’est assez dangereux car il n’y aura plus de présence humaine, regrette l’élu rosnéen. Le public jeune en a sans doute un peu moins besoin, mais le public fragile, ou constitué de personnes âgées, a besoin d’une présence physique, déjà que la dématérisation des tickets a été un problème pour certains… Ce n’est pas une bonne nouvelle. »