Tri : peut mieux faire

L’enquête d’une association de consommateurs de la vallée de Seine révèle un taux de tri très inférieur à la moyenne nationale, et de larges disparités de taxation entre collectivités.

La conclusion d’un récent travail mené par les membres de l’UFC – Que choisir val de Seine dans 24 communes de la vallée est sans appel : les Yvelinois ne trient pas assez. L’association impute ce déficit à un manque de coordination et d’information de la part des collectivités, au flou des indications sur les emballages, ainsi qu’à l’absence de tout système de taxation incitatif pour les habitants.

« S’il ne devait y avoir qu’un enjeu prioritaire, ce serait le tri des plastiques, estime Daniel Lamisse, membre de l’association de consommateurs et coordonnateur de l’enquête. Si nous n’avions qu’une seule recommandation, ce serait de faire en sorte que les gens n’aient pas à trier eux-mêmes les plastiques, car c’est trop incertain. » D’après lui, ce tri doit donc être réalisé dans les usines de triage des différents syndicats de traitement des déchets. Ce sera d’ailleurs le cas dès l’an prochain dans le centre de tri Triellois du Sivatru. Ce syndicat intercommunal a choisi d’investir dans un système de reconnaissance des plastiques par laser, beaucoup plus efficace que l’actuel traitement manuel.

« S’il ne devait y avoir qu’un enjeu prioritaire, ce serait le tri des plastiques », estime l’UFC – Que choisir val de Seine.
« S’il ne devait y avoir qu’un enjeu prioritaire, ce serait le tri des plastiques », estime l’UFC – Que choisir val de Seine.

Dans son ensemble, le tri sélectif reste insuffisant. L’association pointe du doigt l’absence d’harmonisation des couleurs de poubelles. Le caractère parfois trompeur des indications apposées sur les emballages est aussi mis en cause, notamment le logo vert de l’organisme de certification Eco-emballages : il n’indique pas le caractère recyclable mais simplement l’adhésion au certificateur. Enfin, la complexité du tri des plastiques n’est pas compensée par l’information communale, même si cette dernière est jugée bonne par les répondants au questionnaire. « Les efforts ne sont pas suffisants, car il y a des rejets significatifs, regrette néanmoins Daniel Lamisse. Si la proportion de produits non recyclables est trop importante lors de l’examen visuel, le camion est envoyé à l’usine d’incinération. »

Afin de responsabiliser les citoyens comme leurs élus au coût de ce tri insuffisant, l’association de consommateurs préconise la transformation de la taxe actuelle, qui ne couvre qu’une partie du coût du ramassage et du traitement (voir notre encadré), en une redevance appliquée au poids ou au volume pour chaque foyer. « Aujourd’hui, il est facile aux gens de réclamer davantage de passages des camions, analyse le coordonnateur. Facturer en fonction de la quantité obligerait les politiques à expliquer davantage, et à prendre des risques. » Presque totalement absente du territoire français en 2008, la redevance incitative concerne aujourd’hui plus de cinq millions de foyers, et exerce « un effet sensible sur les quantités » selon l’Agence de l’Environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe).

Le département champion de l’incinération

En 2012, la production de déchets ménagers, qui comprend les ordures ménagères et les déchets occasionnels (comme les encombrants et déchets verts, Ndlr), était de 476 kg par habitant dans les Yvelines. En baisse ces dernières années, le nombre est proche de celui de la région Île-de-France mais nettement inférieur aux 590 kg jetés en moyenne par les Français.

Le département se distingue par son faible taux de valorisation par le tri ou le compostage, 29 % des déchets contre 39 % pour l’ensemble du pays. A l’inverse, le taux d’incinération est de 56 %, très au-dessus de la moyenne nationale de 30 %. La conséquence est une proportion plutôt faible des envois en décharge : 8 %, soit 38 kg par habitant, loin des 152 kg par Français.

Le casse-tête de la fiscalité des déchets

La Taxe d’enlèvement des ordures ménagères (Teom) résulte de l’application d’un taux communal ou intercommunal appliqué sur la valeur du foncier bâti de chaque logement. Contrairement aux transports ou à la fourniture d’eau, il n’est pas nécessaire pour la collectivité concernée de financer l’intégralité du service avec cette taxe.

Le service de ramassage et de traitement des déchets peut donc être subventionné par le budget général de la collectivité, et donc notamment par les taxes appliquées aux entreprises. Ainsi, par exemple, à la Communauté d’agglomération de Mantes en Yvelines (Camy), la Teom ne couvre que la moitié des dépenses engendrées par ce service.

En vallée de Seine, les taux appliqués varient du simple au double, entre 4 % et 5 % dans le Mantois, à Poissy ou Orgeval, à presque 10 % à Chanteloup-les-Vignes, Vernouillet ou Andrésy. Ces dernières années, notamment suite à la création d’intercommunalités, des baisses sont intervenues, mais aussi des hausses parfois très importantes, comme aux Mureaux, avec 158 % d’augmentation de 2010 à 2015.

La constitution de la grande communauté d’agglomération Seine et Oise, qui rassemblera 73 communes et six intercommunalités de la vallée de Seine au 1er janvier, ne devrait rien changer la première année, à en croire les élus. Mais une harmonisation pourrait bien intervenir ensuite, et modifier à nouveau les taux de la Teom des uns et des autres.