La communauté urbaine fait des vagues

Une grande communauté urbaine de 400 000 habitants va naître dans deux semaines, allant de Rosny-sur-Seine à Conflans-Sainte-Honorine. Mais tous les élus de ce gigantesque territoire, par opposition de principe ou par rejet de la méthode, n’adhèrent pas à cette fusion.

Elle a été annoncée il y a un an et se concrétise dans deux semaines : six intercommunalités de la vallée de Seine, du Mantois jusqu’à Conflans-Sainte-Honorine, disparaîtront alors pour laisser la place à cette superstructure englobant 400 000 habitants. Forcé par l’Etat, appliqué par les maires, ce regroupement rencontre des oppositions minoritaires mais bruyantes, souvent de la part des maires des communes rurales. Son nom, Grand Paris Seine & Oise (GPSO), est à peu près la seule chose dont les élus sont aujourd’hui certains, alors que le temps presse de plus en plus. Il presse tellement, d’ailleurs, qu’au 1er janvier, ce sont les communes qui exerceront concrètement une partie des compétences normalement dévolues à cette communauté urbaine.

Les adversaires peut-être les plus féroces à cette fusion d’intercommunalités sont les majorités municipales d’Issou et d’Arnouville-lès-Mantes. Les élus issoussois n’ont pas ménagé leur peine depuis un an : pétition, motions votées en conseil municipal, banderoles, pleines pages dans le journal communal. « La future intercommunalité se construit malgré nous et sans nous, et ce bien qu’une majorité de communes se soit prononcée contre », protestait ainsi à la rentrée le comité fondé à l’initiative de la mairie d’Issou avec d’autres collectivités opposées à la fusion, comme Ecquevilly.

La critique est similaire du côté des élus Arnouvillois, qui refusent une fusion imposée et craignent des hausses d’impôts. Leur opposition, médiatiquement plus discrète, se manifeste surtout par un boycott systématique, depuis plusieurs mois, des conférences des maires. Ces dernières rassemblent très régulièrement les édiles des 73 communes concernées. L’on trouve aussi un autre type de protestations, qui ne sont pour l’instant qu’un bruit de fond d’élus dont certains sont plus bavards en privé qu’en public, mais qui pourraient prendre de l’ampleur dans les semaines à venir. Celles-ci se portent plutôt sur la méthode utilisée par les poids lourds politiques de la future communauté urbaine.

C’est notamment le cas de Stéphane Hazan, le maire sans étiquette de Lainville-en-Vexin, plutôt favorable à la fusion sur le principe, et jusque-là resté silencieux. Il estime que le délai d’un an donné par l’Etat est beaucoup trop court, mais surtout, il s’interroge sur les décisions qui entourent la naissance de la communauté urbaine, n’ayant par exemple que fort peu goûté d’apprendre son nouveau nom dans la presse. « Il y a un pilotage très important de certains élus qui se reconnaîtront, on ne demande pas l’avis de tous, avance-t-il des décisions prises jusque-là. Il me semble qu’en démocratie, il serait un minimum de faire participer un peu plus les gens à la réflexion globale, même si je peux comprendre que ce soit dur en seulement quelques mois.»

Il se montre également très critique de ce qui se joue actuellement en coulisses afin de déterminer qui seront les dirigeants de GPSO (voir encadré). « Le problème est qu’on fera de la politique dans le mauvais sens du terme, analyse Stéphane Hazan. Ce sera d’abord de la lutte de pouvoir, d’influence, et après seulement, on fera des choses. Je ne suis pas sûr que ce soit le plus utile. » C’est ce qui, semble-t-il, l’a décidé à s’exprimer publiquement : « Ce coup de gueule est personnel, même si j’en ai discuté avec mon conseil municipal. Quand les hommes politiques auront compris que l’intérêt n’est pas d’être réélu, mais de travailler pour le peuple, peut-être les gens reviendront-ils dans les urnes pour voter, et voteront de façon intelligente. » La première assemblée de l’intercommunalité fusionnée se tiendra en janvier, elle risque fort d’être animée.

Contesteront-ils l’élection de Philippe Tautou à la présidence ?

Depuis l’annonce de la fusion il y a un peu plus d’un an, puis la création du Pôle métropolitain Grand Paris Seine aval comme préfigurateur du rassemblement, un seul nom circule pour la présidence de la communauté urbaine. Ce nom, c’est celui de Philippe Tautou, l’actuel maire de Verneuil-sur-Seine (LR), de la Communauté d’agglomération des deux rives de Seine (CA2RS) et du Pôle métropolitain.

Il est soutenu par les figures politiques de la vallée, du Mantais Pierre Bédier au Pisciacais Karl Olive (LR). Pour l’instant, il a toutes les chances d’être élu par les maires et conseillers municipaux qui siègeront à l’assemblée de Grand Paris Seine & Oise.

Mais, en sourdine, d’autres candidatures se préparent. Paul Martinez, l’actuel maire UDI de Buchelay et président de la Communauté d’agglomération de Mantes en Yvelines (Camy), a déjà fait part du fait qu’il envisageait de se présenter. Mais il refuse aujourd’hui de s’exprimer à ce sujet avant les fêtes, car sa candidature serait toujours incertaine.

Il peut certes compter sur le soutien de nombreuses communes rurales du Mantois, comme ce fut le cas lors de son élection à la présidence de la Camy face au Mantais Jean-Luc Santini (LR). Mais sa situation est nettement plus floue à mesure que l’on se rapproche de Paris. « Paul n’a aucune chance », estime d’ailleurs un élu non concerné par la fusion mais très au fait des discussions en cours.

L’autre nom qui revient de manière insistante est celui de Michel Lebouc, le maire de gauche de Magnanville. « Ce serait très anticipé de ma part, dément cependant l’intéressé. La réflexion sera abordée avec tous les acteurs de notre groupe politique (en cours de création, Ndlr), je ne l’ai pas rêvé et je ne l’imagine même pas ».