Dans les Yvelines, le grand chelem n’est pas passé loin pour La République en marche (LREM). Seule la 8ème circonscription, celle du Mantois, a vu le parti du président de la République ne pas l’emporter, au profit du candidat Les républicains (LR). Ailleurs, les défaites ressemblent fort à des débâcles pour des députés LR ou UDI pourtant parfois très enracinés.
« C’est une défaite sans visage, sans couleur, une élection sans le peuple », a déploré Arnaud Richard (UDI-LR). Candidat à sa succession dans la 7ème circonscription, il a eu l’élégance, dimanche dernier, de venir féliciter à sa permanence la nouvelle députée, Michèle de Vaucouleurs (Modem-LREM).
« C’est un changement total de l’organisation politico-territoriale des Yvelines, analyse de son côté l’ex-député de la 9ème circonscription, et bientôt ex-maire de Houdan, Jean-Marie Tétart (LR-UDI). On va voir très rapidement ce que nous annoncions : ils vont être totalement coupés de la vie du département, en fait, ce seront des députés parisiens. »
Dans le Mantois, à l’issue du premier tour pourtant, Khadija Moudnib pouvait espérer l’emporter. Ex-adjointe mantaise, la candidate LREM était en ballottage favorable avec près de 2 400 voix d’avance sur Michel Vialay (LR-UDI), le maire de Mantes-la-Jolie. Mais la tendance s’est inversée au second tour : le candidat-maire devient député avec 1 300 voix d’avance sur Khadija Moudnib, et une abstention encore plus élevée que la semaine précédente.
Dans le grand hall de la mairie mantaise, les cris de joie et les applaudissements se sont élevés vers 22 h 30, quand Michel Vialay est venu annoncer sa victoire à une centaine de personnes réunies, et en l’absence de son adversaire restée à son QG (sollicitée par La Gazette, elle n’a pas souhaité commenter le scrutin, Ndlr). « Ce soir, c’est une très grande satisfaction, et ce bonheur, je veux le partager avec vous », sourit-il alors.
Devant les différents bureaux de vote du Mantois, sous le soleil de ce dimanche 18 juin, l’écart semblait s’annoncer plus serré après le dépouillement. Chez les sympathisants de Khadija Moudnib, si quelques-uns indiquaient avoir voté « contre » Michel Vialay, tous souhaitaient surtout soutenir le parti du nouveau président de la République, pour qu’il puisse « appliquer son programme ».
Jean-Claude, Mantevillois, a ainsi expliqué « ne pas forcément voter pour le candidat, juste pour propulser Emmanuel Macron », confiant même : « La tête de la personne, je ne la connais même pas ». A Limay, son de cloche identique chez Sadio : « Ça fait des années que c’est la politique de papa, là, on a un jeune président, donc autant lui donner la majorité à l’Assemblée », confirme-t-il.
Le report de voix a donc plutôt bénéficié au maire de Mantes-la-Jolie, qui finit par l’emporter. Outre ceux qui avaient voté pour le candidat LR aux deux tours, souvent en vantant « sa proximité », ses nouveau électeurs l’ont fait pour des raisons variées. Pascal, Limayen, avait soutenu son maire Eric Roulot (PCF) au premier tour, et a cette fois-ci glissé un bulletin Michel Vialay dans l’urne pour apporter « une voix en plus pour l’opposition à la majorité présidentielle ».
Mais un autre report, celui des voix frontistes, semble également avoir joué en faveur de l’édile mantais. Toujours à Limay, Isabelle avait ainsi glissé un bulletin François Siméoni (FN) le dimanche 11 juin. Au second tour, elle a cette fois-ci voté Michel Vialay, « par rapport au nom », précise-t-elle dans son propos chargé d’un sous-entendu sur les origines de Khadija Moudnib.
Plus que le duel entre les deux candidats, autour des bureaux de vote, c’est l’abstention record qui était sur toutes les lèvres. « Il n’y a pas grand monde, c’est une catastrophe », s’indignait Noëlle devant la mairie de Limay. Un point de vue également repris par Emmanuel, Mantevillois, qui estimait : « C’est un désastre, les gens ne viennent pas voter, et après ils gueulent. »
A l’issue de la journée, les soutiens de Michel Vialay ont célébré leur victoire dans la permanence LR, à quelques pas de la mairie de Mantes-la-Jolie. Le très mantais président du Conseil départemental Pierre Bédier (LR) souligne, dans un communiqué de presse envoyé après minuit, que « la défaite des Républicains dans les Yvelines est historique ».
Mais, un peu plus tôt dans la permanence, il n’avait de mots que pour la victoire dans le Mantois : « De toutes les campagnes que j’ai eues à vivre, c’est la plus belle. » Il n’a cependant pas oublié de fustiger une dernière fois la candidate LREM : « La trahison ne paye pas, le mensonge ne paye pas, la déloyauté est toujours punie. »
Le désormais seul député LR des Yvelines a annoncé qu’il serait « un député qui votera les lois de bon sens, [quand] elle seront au bénéfice du Mantois et du pays ». L’autre vainqueur de cette soirée est apparu être Raphaël Cognet (LR), adjoint mantais, aussi ému que le candidat LR. Pierre Bédier a en effet annoncé qu’en tant que « président de groupe », il allait « présenter la candidature de Raphaël Cognet » à la fonction de maire, pressentie mais jusqu’à présent pas encore officialisée.
Dans les autres circonscriptions, les députés LREM comptent attaquer le travail parlementaire dès la semaine prochaine. « C’est un grand honneur, et bien sûr une grande responsabilité, je suis là pour représenter l’ensemble de nos concitoyens », commente Natalia Pouzyreff (LREM-Modem). Nouvelle députée de la 6ème circonscription, elle va se mettre en disponibilité de l’Education nationale… mais seulement après avoir surveillé une dernière épreuve du bac.
Ils ont quelques jours pour recruter leurs assistants et organiser leur agenda, avant un séminaire du groupe LREM ce week-end. « On est en train de finaliser le rôle et les missions des attachés parlementaires », indique ainsi Michèle de Vaucouleurs (Modem-LREM). Elle se félicite d’avoir « la chance » que son suppléant, Jonas Maury, puisse devenir l’un d’eux, celui-ci ayant été le collaborateur parlementaire du maintenant ex-député David Douillet (LR).
Comme ces deux candidates l’avaient annoncé, elles comptent organiser régulièrement des réunions publiques, dès juillet pour Natalia Pouzyreff qui reconnaît « un déficit de confiance » touchant les responsables politiques. « On mesure que l’abstention a été très forte, ça renforce encore notre obligation de ne pas décevoir », assure Michèle de Vaucouleurs. Dans la 9ème circonscription, même son de cloche du gagnant de l’élection, Bruno Millienne (Modem-LREM) : « Tout commence maintenant. »
Résultats par circonscription : LREM sauf la 8ème
6ème circonscription
Participation : 44,64 % – 33 793 votants pour 75 704 inscrits
1 547 blancs (4,58 % des votants) – 517 nuls (1,53 % des votants)
Natalia Pouzyreff (LREM) : 58,34 % des exprimés (24,45 % des inscrits) – 18 510 suffrages
Pierre Morange (LR-UDI) : 41,66 % des exprimés (17,46 % des inscrits) – 13 219 suffrages
7ème circonscription
Participation : 41,05 % – 33 096 votants pour 80 615 inscrits
2 289 blancs (6,92 % des votants) – 656 nuls (1,98 % des votants)
Michèle de Vaucouleurs (Modem-LREM) : 55,57 % des exprimés (20,79 % des inscrits) – 16 756 suffrages
Arnaud Richard (UDI-LR) : 44,43 % des exprimés (16,62 % des inscrits) – 13 395 suffrages
8ème circonscription
Participation : 36,36 % – 26 856 votants pour 73 870 inscrits
2 545 blancs (9,48 % des votants) – 1 090 nuls (4,06 % des votants)
Michel Vialay (LR-UDI) : 52,86 % des exprimés (16,62 % des inscrits) – 12 275 suffrages
Khadija Moudnib (LREM) : 47,14 % des exprimés (14,82 % des inscrits) – 10 946 suffrages
9ème circonscription
Participation : 40,07 % – 36 455 votants pour 90 984 inscrits
2 669 blancs (7,32 % des votants) – 892 nuls (2,45 % des votants)
Bruno Millienne (Modem-LREM) : 54,50 % des exprimés (19,70 % des inscrits) – 17 926 suffrages
Jean-Marie Tétart (LR-UDI) : 45,50 % des exprimés (16,45 % des inscrits) – 14 968 suffrages
12ème circonsceiption
Participation : 45,68 % – 31 520 votants pour 69 005 inscrits
1 873 blancs (5,94 % des votants) – 538 nuls (1,71 % des votants)
Florence Granjus (LREM) : 56,63 % des exprimés (23,89 % des inscrits) – 16 484 suffrages
David Douillet (LR-UDI) : 43,37 % des exprimés (18,30 % des inscrits) – 12 625 suffrages