GPSEO : comment se porte l’interco ?

La communauté urbaine Grand Paris Seine et Oise, 20 mois après sa naissance dans la douleur, par fusion de six intercommunalités de vallée de Seine, commence tout juste à prendre ses marques.

Pour la première fois depuis la fusion des six intercommunalités de 73 communes, au 1er janvier 2016, la communauté urbaine Grand Paris Seine et Oise se présentait aux conseillers municipaux. A tous les conseillers municipaux : 1 411 avaient été invités, environ 600 ont répondu présent pour cette journée dédiée au Parc expo de Mantes-la-Jolie. Alors, la nouvelle collectivité de 405 000 habitants avait mis les petits plats dans les grands pour l’occasion.

Elle est née sous des auspices médiocres, déplorée par nombre d’élus locaux la trouvant trop grande, trop chère, trop influencée par la droite locale. Vingt mois après, quel bilan en tirent-ils ? Si tous reconnaissent l’énorme travail de réorganisation effectué par l’exécutif et les fonctionnaires, certains restent pour le moins sceptiques quant à l’efficacité de la fusion opérée par l’Etat. Seule certitude : le service voirie, lancé il y a neuf mois, est un caillou dans la chaussure de GPSEO.

Vendredi matin, devant quelques centaines d’élus, le président de GPSEO et maire de Verneuil-sur-Seine, Philippe Tautou (LR), dit toute sa « joie » d’en être là après 20 mois. « La première étape, qui consistait à mettre en place une administration, va s’achever dans quelques semaines, annonce-t-il. Nous allons aborder une autre période de construction, et vous allez constater à quel point la communauté urbaine est forte de propositions et de compétences ! »

Chez les élus, l’on reconnaît le travail effectué. « On est conscient des difficultés que ça engendre de monter une communauté urbaine de cette ampleur, estime ainsi Albert Bischerour (DVG), adjoint aux Mureaux et président du groupe Démocratie et solidarité (DS), associé à l’exécutif. Les agents qui sont restés ont fait un travail énorme pour en arriver à aujourd’hui. »

Mais le choix de passer en communauté urbaine, forme la plus aboutie d’intercommunalité, reste en travers de la gorge pour certains. « Je suis persuadée que les élus n’avaient pas mesuré l’impact d’une communauté urbaine (comme la compétence voirie obligatoire, Ndlr)», analyse ainsi la maire d’Evecquemont Ghislaine Senée (EELV). La présidente du Groupe citoyen pour un territoire solidaire et écologique (GCTSE) se dit toujours « foncièrement opposée à la vision déployée sur ce territoire ».

La constitution d’une communauté urbaine, si elle apporte plus de fonds étatiques, est particulièrement complexe par l’ampleur des tâches qui lui sont confiées. GPSEO a bien obtenu un an de marge par dérogation, n’ayant pas à prendre tout de suite à sa charge certaines d’entre elles. Mais « par une lecture très intégriste des textes de lois » selon sa première vice-présidente et maire d’Aubergenville Sophie Primas (LR), elle n’a pu obtenir plus de temps.

« Tout s’est construit à marche forcée, avec des contraintes de temps et administratives pour une structure énorme à mettre en place », analyse de son côté Pascal Collado (DVD), maire de Vernouillet et président du groupe Agir pour l’avenir de l’intercommunalité (APAI). « Il y a un poids administratif lourd, qui ne produit pas tous ses effets et ralentit énormément, s’inquiète-t-il cependant. J’espère que ça ne durera pas. »

« La première étape, qui consistait à mettre en place une administration, va s’achever dans quelques semaines », a annoncé vendredi dernier son président Philippe Tautou (LR).

Quelques heures plus tôt, le président de GPSEO faisait, lui, surtout l’éloge du vivre ensemble entre communes autrefois concurrentes, et désormais membres de la même collectivité. « La cohésion, il ne suffit pas de la dire, de la décréter, il faut l’incarner, lance Philippe Tautou. Quelque part, on ne peut se défausser en disant « c’est les autres c’est pas moi », nos sorts sont liés une fois de plus. »

Une union qui, pour beaucoup ces derniers mois, ressemble encore à une alliance de bric et de broc. Ces Journées du territoire y changeront-elles quelque chose ? « Trop d’élus du territoire ne savaient même pas ce que voulait dire GPSEO, même dans nos propres conseils municipaux, indique Albert Bischerour, fervent partisan de l’événement. Je me suis rendu compte que dans la grande majorité, les élus de GPSEO ont tendance à parler de leurs problèmes, de leurs chapelles, et ont du mal à avoir une vision globale de la politique du territoire. »

Depuis deux ans, le président de GPSEO affirme à tour de bras que les communes sont et doivent rester, pour que l’union fonctionne, le point de contact exclusif des citoyens avec la communauté urbaine « Je ne changerai pas d’avis : le point d’entrée sera toujours par les communes, leur enjoint-il à nouveau ce matin-là. Vous êtes partie prenante de la communauté urbaine. »

C’est peut-être sur ce point que les désaccords entre élus sont les plus visibles. On ne compte ainsi plus les municipalités à avoir indiqué qu’il fallait s’adresser au siège de GPSEO pour tout problème lié aux compétences exercées par l’intercommunalité. « Demain, plutôt que ça passe de la commune vers la communauté urbaine, il y aura une relation directe entre l’administré et la communauté urbaine », annonçait même publiquement à ses administrés, il y a quelques semaines, Laurent Brosse (LR), vice-président de GPSEO et maire de Conflans-Sainte-Honorine.

« On ne peut pas demander aux communes d’être celles à qui on signale ou qu’on engueule quand elles n’ont aucun moyen d’intervention et d’influence », analyse Denis Faist (DVD), président du groupe Indépendants Seine et Oise (Iso), en évoquant évidemment la voirie. Il poursuit avec pour argument l’exemple d’un maire ayant demandé à être là à une réunion concernant les chantiers de voirie de sa commune : « On lui a dit qu’il pouvait indiquer ses choix mais pas être présent. »

Une fois GPSEO définitivement constituée, organisée, quelle est la prochaine étape ? Si la communauté urbaine dispose d’un budget annuel de plus de 300 millions d’euros, elle dispose de capacités d’investissement d’environ 70 millions d’euros. « A Lorient, 215 000 habitants, ils ont un budget de 150 millions en investissement », a indiqué Philippe Tautou, qui plaide depuis déjà des mois pour des emprunts permettant des investissements massifs.