« Police de sécurité du quotidien » : à chacun ses besoins

Trois tables rondes ont eu lieu à Mantes-la-Jolie, Houdan et les Mureaux à propos de la « police de sécurité du quotidien ». Ruraux et urbains ont exposé leurs besoins.

La « police de sécurité du quotidien » est attendue pour être expérimentée début 2018. D’ici là, une concertation éclair à l’échelle du pays a été lancée, déclinée dans chaque département, pour laquelle le préfet, Serge Morvan, indiquait qu’il « doit faire remonter les résultats […] le 15 décembre au ministère de l’intérieur ». Cette concertation s’est notamment traduite par plusieurs tables rondes avec des acteurs de terrain au cours desquelles des problématiques communes, ou beaucoup plus dépendantes de la ville où elle a lieu, ont été soulevées.

Pour l’arrondissement de Mantes-la-Jolie trois réunions ont eu lieu : plutôt urbaines aux Mureaux le 30 novembre, le lendemain à Mantes-la-Jolie, et plus rurale à Houdan le 5 décembre. « Ces réunions ne sont pas publiques, elles sont constituées d’échantillons représentatifs », indique Gérard Derouin, le sous-préfet de Mantes-la-Jolie. Les assemblées, d’une trentaine de personnes à chaque fois, étaient constituées d’élus, responsables scolaires, associations, bailleurs sociaux, policiers municipaux, sociétés de transport, …

Entouré de représentants de la police, gendarmerie et pompiers ; le sous-préfet explique que cette « police de sécurité du quotidien » est « une volonté » d’Emmanuel Macron « compte tenu de la réalité qui est l’insécurité à deux titres : le terrorisme [et] les incivilités subies par les gens au quotidien qui créent un malaise entre la population et les forces de sécurité ».

Gérard Derouin rappelle les cinq objectifs de cette mesure : « la lutte contre la délinquance », le « respect des forces de sécurité », « une réponse sur mesure » adaptée à chaque territoire, un « partenariat entre les acteurs publics et privés », et des « moyens plus connectés qui entraînent une simplification administrative. »

Mais cela ne se traduira pas forcément par une augmentation des effectifs, rappelle-t-il ensuite. Et lors de la réunion mantaise, la commissaire Sandrine Carlin avertit que cette « police de sécurité du quotidien » n’est pas un retour de la police de proximité. « La police de proximité avait été imposée comme un dogme, exprime Sandrine Carlin. Là, la démarche est totalement différente avec une concertation. »

Le sous-préfet précise également que la justice fait partie de cette concertation avec « l’objectif d’avoir une réponse judiciaire plus rapide ». Plusieurs participants des réunions ont d’ailleurs formulé ce souhait. « Nous, ce qu’on voudrait, c’est une justice de proximité, qui aille vite et sanctionne, insiste Jean-Marie Tétart (LR), maire de Houdan, lors de la réunion qui se déroulait dans sa commune.

Certains maires, sur la petite délinquance, renoncent. » Une problématique évoquée par plusieurs intervenants lors des différentes tables rondes est la crainte pour les habitants de déposer plainte. « Le problème aujourd’hui est que les citoyens ne signalent plus parce qu’ils ont peur des représailles », témoigne, exemples à l’appui, François Lecoq, président du syndicat local de Houdan de la Fédération départementale des syndicats d’exploitants agricoles (FDSEA).

Entouré de représentants de la police, de la gendarmerie et des pompiers, le sous-préfet a écouté les attentes des acteurs de terrain, associations, élus, bailleurs sociaux, sociétés de transport, …

Un constat similaire est dressé par un bailleur social lors de la réunion des Mureaux. « On a de plus en plus de mal à convaincre nos personnels d’aller déposer plainte, confirme un représentant de l’Immobilière 3F, plaidant lui pour un « anonymat » des employés lors du dépôt de plainte. Le directeur de l’hôpital de Meulan-les-Mureaux, Frédéric Mazurier, évoque essentiellement des agressions verbales et confirme se trouver « confronté à du personnel qui hésite à témoigner ». Il juge qu’il « serait intéressant de pouvoir témoigner au plus près d’où se sont déroulés les faits ».

En raison de la typologie de chaque territoire, rurale en pays houdanais et plus urbaine pour le Mantois et les Mureaux, des besoins spécifiques ont aussi été soulignés. A la réunion de Houdan le 5 décembre, tous se sont montrés satisfaits de leurs actuels rapports avec la gendarmerie. « Sur ce qui est annoncé, le milieu rural est peut-être plus avancé, adresse le maire de Houdan au sous-préfet. Aujourd’hui, nous avons une relation quotidienne très fluide avec la gendarmerie. Ensemble, nous travaillions déjà dans l’esprit que vous indiquez. »

Plusieurs maires ont cependant pointé leur principale problématique : « Les réunions de jeunes, de gamins qui détruisent des mobiliers », prononce le maire d’Orgerus, Jean-Michel Verplaetse, évoquant les 15 000 euros dépensés par la commune pour refaire des réverbères caillassés. Jean-Marie Tétart estime que dans le pays houdanais, « 100 jeunes » sont concernés. Ce dernier ajoute que la situation ne changera pas « tant qu’on n’aura pas moyen de sanctionner immédiatement et au vu de tous ».

Aux Mureaux, un membre de l’association Tendre la main, qui mène des actions de préventions contre les risques de délinquance, s’est montré positif sur l’évolution de la situation entre police et jeunes. « Au niveau de la police des Mureaux, il y a moins de problématique qu’avant », suggère-t-il. Il estime cependant qu’il faudrait « former la police » sur les sujets « de discrimination ». Et de conclure : « Ce qui m’intéresse le plus dans tout ça, c’est que les jeunes ne se sentent plus une proie facile. »

A la réunion de Mantes-la-Jolie, de loin la moins animée des trois à la surprise des organisateurs, un fonctionnaire de la mairie a fait part d’un bon « partenariat » déjà en place avec les forces de sécurité. Notamment à travers le Conseil local de sécurité et de prévention de la délinquance (CLSPD), dont il a questionné l’avenir : « Cette instance existe et fonctionne plutôt bien. C’est vraiment l’instance où il peut y avoir des échanges entre les différents partenaires. »

Dans le département, les communes de Trappes et de Limay ont déjà candidaté pour participer à l’expérimentation qui devrait être lancée début 2018. Le maire des Mureaux s’est également dit « volontaire ». Mais est-ce que les Yvelines bénéficieront d’une « police de sécurité du quotidien » dans le cadre de l’expérimentation ? Une question à laquelle le sous-préfet ne peut encore répondre. « Je ne sais pas, mais on pourrait le penser vu la typologie du département », confie Gérard Derouin lors des réunions.