GPSEO devra se serrer la ceinture

Augmentation du budget de fonctionnement limitée à 1,2 %, dotation générale de fonctionnement jugée particulièrement faible : les élus de la jeune communauté urbaine Grand Paris Seine et Oise ont prévenu que l’avenir serait fait d’austérité.

Née le premier janvier 2016, la communauté urbaine Grand Paris Seine et Oise (GPSEO), 73 communes de Rolleboise à Achères, se trouve fort dépourvue maintenant que l’hiver budgétaire est venu. Il se présente sous la forme d’une limitation par l’Etat de l’augmentation du budget de fonctionnement de 1,2 % pour les intercommunalités, chaque année pendant trois ans, sous la forme d’une contractualisation gérée par les préfectures (1,2 % est le taux moyen annoncé par l’Etat, le taux final sera compris entre 0,75 % et 1.65 %, Ndlr).

Du rapport d’orientation budgétaire présenté au conseil communautaire en février, au budget prévisionnel voté par 73 des 129 conseillers le 28 mars dernier, ces éléments ont fait l’effet d’une douche froide. Fini l’emprunt de grande ampleur envisagé pour pouvoir investir massivement dans de grands projets, fini le format d’une intercommunalité comptant 1 200 agents, probablement finis aussi de nombreux projets d’aménagement comme d’investissement.

Les élus ont très récemment pu étudier plus en profondeur ce sinistre constat, à l’occasion d’un séminaire dédié aux finances. Le 28 mars, à la salle des fêtes d’Ecquevilly, l’ambiance n’est pas à la fête pour confirmer ces nouvelles, certes annoncées dès février par Dominique Pierret, vice-président chargé des finances à GPSEO et maire de Drocourt. En cas de non-respect des 1,2 % d’augmentation, des pénalités jusqu’à cinq millions d’euros pourraient s’appliquer.

« Le préfet dispose de six mois pour la contractualisation, on aura une vision claire au mois de juin, expliquait alors Dominique Pierret. On espère pouvoir faire valoir nos arguments, de manière à ce que l’on puisse un peu, ultérieurement, desserrer cet étau. » Pour l’instant, il est prévu de respecter strictement l’obligation des 1,2 %, avec un budget de fonctionnement passant de 253 millions d’euros en 2017 à 256 millions d’euros en 2018 (sur un budget total de 430,5 millions d’euros, Ndlr).

S’ajoute à cette limite, imposée par l’Etat, le niveau jugé trop faible de sa dotation globale de fonctionnement (DGF), versée chaque année aux collectivités (voir encadré). « Pour la communauté urbaine, ça va être particulièrement compliqué, on était en phase de croissance, s’émeut Dominique Pierret. On est en train de nous couper purement et simplement les ailes, pour nous traiter de la même manière que des communautés urbaines qui ont un régime de croisière bien établi. » Il précise ne pas être en mesure de présenter un budget prévisionnel détaillé, se contentant pour l’instant « des grandes masses ».

« Pour la communauté urbaine, ça va être particulièrement compliqué, on était en phase de croissance », s’émeut le vice-président aux finances Dominique Pierret au dernier conseil.

Le président de GPSEO et maire de Verneuil-sur-Seine Philippe Tautou (LR), ainsi que la sénatrice et conseillère communautaire Sophie Primas (LR), ont pris la plume pour demander au premier ministre « un objectif transitoire en assouplissant les objectifs de la contractualisation », a indiqué cette dernière. Malgré tout, cette année, et probablement jusqu’aux élections municipales, le taux d’imposition intercommunal, portant sur la taxe foncière, ne change pas.

« Nous avons voulu, avec un couteau dans le dos, créer cette belle communauté, un beau bébé, vigoureux, à qui on donne des biberons deux fois plus petits que les autres et à qui on retire cette année le goûter, analyse-t-elle de la situation au conseil d’Ecquevilly. Il va falloir le faire courir aussi vite que les autres… je vous invite, chers collègues, à être collectivement très courageux. »

Dans la même veine, Philippe Tautou promet « des larmes et du sang » qu’il va falloir « expliquer à vos populations ». Alors, « ça va être compliqué, difficile, mais il va falloir le faire parce qu’on n’a pas le choix », engage-t-il, les conseillers lui faisant face dans la salle des fêtes : « Il faut aborder ce travail avec enthousiasme, saisir l’opportunité pour se remettre en question sur les projets. » En effet, impossible de réaliser ce que les élus de GPSEO avaient en tête avec cette limite des 1,2 % d’augmentation du budget de fonctionnement. « Peut-être qu’on a été trop ambitieux, c’est possible ! Je ne vous demande pas d’abdiquer, de renoncer, mais parfois, il faudra faire une pause pour prioriser les projets qui sont importants pour nous, vitaux pour nous. »

La conséquence la plus immédiate de cette austérité annoncée repose cependant sur le personnel de la communauté urbaine et les tâches qui leur sont dévolues, à l’instar de l’entretien de la voirie communautaire. « On va pouvoir avoir des recrutements en net à un niveau de 1,4 million d’euros, soit une trentaine d’ETP (équivalents temps plein, Ndlr), lâche le vice-président aux finances en présentant le budget prévisionnel. On va être obligé de se limiter à ce flux-là pour cette année. »

Pourtant, alors qu’ils sont actuellement un bon millier d’agents, l’organisation du travail au sein de GPSEO a été construite sur une base d’environ 1 200 fonctionnaires pour pouvoir fonctionner correctement. « Ca va nous contraindre énormément, précise Dominique Pierret. Forcément, il y aura des choix à faire dans ce qu’on fait, dans ce qu’on ne fait pas, car on n’aura pas nécessairement tout le personnel pour le faire. »

« Le préfet dispose de six mois pour la contractualisation, on aura une vision claire au mois de juin » , expliquait en février aux élus le vice-président aux finances Dominique Pierret.

Face à Dominique Pierret et à l’exécutif, la plupart des groupes politiques d’opposition reconnaissent le caractère extérieur d’une partie des contraintes sévères auxquelles font désormais face les finances de GPSEO. « Nous prenons acte que le budget de la communauté urbaine s’est fait dans une logique de contrainte par l’Etat qui limite nos dépenses de fonctionnement », déclare ainsi Philippe Simon, ex-maire de Bouafle et représentant du groupe Seine.

« Il y a une volonté de mise sous tutelle des collectivités par l’Etat, l’exercice budgétaire est particulièrement difficile, estime de son côté Denis Faist, premier adjoint UDI à Andrésy pour le groupe Indépendants Seine et Oise (Iso). Pour lui, « l’objectif unilatéral qui ne s’apparente pas vraiment à un contrat est plus que contraignant pour la communauté urbaine ». Il n’en oublie pas de rappeler l’opposition du groupe au « pacte fiscal » liant les communes à GPSEO, qui « fera probablement l’objet d’un arbitrage juridique » et constitue le motif du vote contre du groupe Iso.

La charge est venue de l’écologiste Ghislaine Senée, représentante du groupe Citoyens pour un territoire solidaire et écologique. « Il faut que nous soyons courageux d’admettre l’échec que nous avons alerté et dénoncé au cours de la préfiguration [de l’intercommunalité], rappelle-t-elle du choix de devenir communauté urbaine plutôt que communauté d’agglomération. Qui a décidé de créer ce périmètre ? Qui a créé une communauté urbaine et a oublié d’aller négocier avec l’Etat ? Quel risque énorme nous avons pris ! »

Dénonçant le passage en communauté urbaine pour obtenir huit millions d’euros supplémentaires de l’Etat en 2016, elle estime que « le vrai courage serait de poser ce diagnostic ». Et déplore ensuite un budget prévisionnel jugé bien trop flou. « Ici nous sommes tous conseillers municipaux, pour un bon nombre maires, imaginez ce que ce serait en conseil municipal : on ne vous amène que les grandes masses, mais faites-nous confiance, on va pouvoir porter le budget », s’enflamme-t-elle, espérant ce soir du 28 mars « remettre en cause le fonctionnement de cette assemblée ».

S’il laisse fréquemment les interpellations de l’écologiste sans réponses, cette fois-ci, le président Philippe Tautou en apporte une. « Ghislaine, si on n’avait pas été dans une communauté urbaine, mais je n’ose pas imaginer la situation financière aujourd’hui !, s’émeut-il. C’est purement et simplement inimaginable que la structure qui est la nôtre ne soit pas comprise comme le meilleur modèle de développement pour capter le maximum de subventions et de dotations. »

Un modèle de développement auquel il continue de croire fermement : « Si on n’avait pas choisi le développement économique comme objectif numéro un, on n’aurait pas dans les années qui viennent des perspectives de recettes nouvelles. » Mais « le problème du développement économique est que c’est lent », reconnaît-il. Et s’il a assuré « revenir » prochainement vers les élus « avec des propositions », leur tonalité principale sera sans aucun doute celle de l’austérité budgétaire.

Dotation globale de fonctionnement : la communauté urbaine lésée par l’Etat ?

Les élus à la tête de la communauté urbaine Grand Paris Seine et Oise (GPSEO) n’en auraient probablement pas parlé publiquement si ne s’était ajoutée la contractualisation à 1,2 % par an de l’augmentation des dépenses de fonctionnement. Ils estiment cependant que leur Dotation globale de fonctionnement (DGF) est faible, la jugent « inacceptable » par rapport à d’autres intercommunalités yvelinoises, et même « une des dotations par habitant parmi les plus faibles de tout le pays » selon l’ex-maire d’Aubergenville, sénatrice et conseillère communautaire Sophie Primas (LR).

« Dans ce tableau, vous voyez aussi quelque chose que l’on voudrait discuter, et faire valoir aux services de l’Etat qu’on n’est quand même pas traités tout à fait correctement dans cette affaire, indique Dominique Pierret, vice-président aux finances de GPSEO. La communauté urbaine a une dotation par habitant de 106 euros… et vous voyez que la dotation de Saint-Quentin-en-Yvelines, c’est 258 euros : il y a 250 % d’écart. »