Pendant un mois, en janvier 1999, un enfant de neuf ans a été interné au service psychiatrique du Centre hospitalier intercommunal Meulan – Les Mureaux (Chimm), dont la première semaine sans que l’accord écrit d’un de ses parents n’ait été obtenu. Le 23 janvier dernier, le Tribunal de grande instance de Versailles (TGI) a condamné l’hôpital (qui n’a pas pu répondre avant publication, Ndlr) à verser une indemnisation totale de 14 000 euros, compte tenu de la privation de liberté et de l’administration de traitement sous contrainte.
Cette décision rendue il y a quelques mois par le TGI avait été précédée d’un jugement du tribunal administratif de Versailles qui annule la décision d’internement. Une dizaine de membres de la Commission des citoyens pour les droits de l’homme (CCDH) ont manifesté devant le site meulanais de l’hôpital, samedi 5 mai dernier, afin de faire savoir leur combat national et dénoncer ce cas local. Cette association lutte notamment contre l’internement abusif de mineurs en service psychiatrique (et est liée à l’Église de scientologie, voir encadré, Ndlr).
20 janvier 1999, l’enfant est hospitalisé en urgence au centre hospitalier de Mantes-la-Jolie « à la suite d’une grave crise de violence », à l’initiative du directeur de l’Ase, selon les attendus du jugement du tribunal administratif (TA). L’enfant avait été placé dans ce foyer en juillet 1998, précise le site internet spécialisé Hospimedia, dont un article évoque le jugement.
Au lendemain de son hospitalisation, il est transféré au Chimm, dans l’unité d’accueil d’urgence pour adolescent. Le médecin pédopsychiatre décide alors de le maintenir dans le service. Le père de l’enfant n’a alors pas été formellement associé à l’hospitalisation, c’est là que le bât blesse pour les juges (qui ne donnent par ailleurs pas suite à d’autres demandes de l’enfant devenu adulte, qui réclamait plus de 140 000 euros, Ndlr).
Le père a bien signé une attestation d’urgence médicale, autorisant le Chimm à prendre « toute mesure utile que pourrait nécessiter l’état de santé de son fils », mais le 27 janvier seulement, soit sept jours après l’hospitalisation. L’hôpital avançait que le père était « très présent » aux côtés de son enfant hospitalisé, et que les parents avaient été « autant que possible associés » à la décision médicale malgré l’absence de consentement écrit.
Le tribunal administratif considère cependant que, sans consentement écrit, cela « n’établit aucunement l’accord des parents donné à l’hospitalisation de leur enfant ». Il annule la décision de l’hôpital, et le condamne à verser 1 200 euros au plaignant. Le tribunal de grande instance s’appuie ensuite sur cette décision pour condamner à son tour le Chimm.
La CCDH, faux-nez de la scientologie
La Commission des citoyens pour les droits de l’homme (CCDH) a été fondée il y a une quarantaine d’années par l’Église de scientologie. Organisme fondé en 1952 aux Etats-Unis, l’Église de scientologie est désignée comme une « secte » en France depuis un rapport parlementaire de 1995.
La CCDH lutte contre la psychiatrie moderne dans le monde entier, avec un travail de lobbying politique et médical très controversé. « Il y a beaucoup de scientologues au sein de l’association », reconnaît Mylène Escudier, elle-même adepte et présidente de la branche française de la CCDH, très active depuis plus d’une décennie.
Internement : ils demandent l’audition d’un juge dès le 1er jour
Samedi 5 mai, la Commission des citoyens pour les droits de l’homme (CCDH) a manifesté devant le Centre hospitalier intercommunal de Meulan Les Mureaux (Chimm). L’objectif ? Dénoncer l’internement d’un jeune garçon de 9 ans en service psychiatrique au mois de janvier 1999, pour lequel l’hôpital a récemment été condamné, ainsi que le délai de 12 jours entre une hospitalisation en psychiatrie et une audition devant le juge (en place depuis 2011, Ndlr).
Mylène Escudier, présidente de la CCDH, demande que « l’audition devant le juge soit dès le premier jour d’internement », et souhaite, concernant les mineurs, « plus de contrôle sur l’internement des enfants en psychiatrie ». Selon elle, des 76 000 hospitalisations annuelles en service psychiatrique en France, 6 500 sont levées à la suite d’une audition devant le juge des libertés et de la détention.
Scientologie : droit de réponse de la CCDH
La CCDH a souhaité répondre aux éléments apportés ci-dessus quant à la nature et ses relations avec l’Eglise de scientologie.
« Il est mentionné dans l’article que la CCDH est un « faux-nez » de la scientologie. Or, dans toutes les brochures d’information ainsi que sur le site web de l’association, il est clairement indiqué que la Commission des citoyens pour les droits de l’homme a été créée par l’Église de scientologie et le psychiatre Thomas Szasz dans le but de faire respecter les droits de l’homme en psychiatrie », répond Mylène Escudier, présidente de la CCDH.
Le dernier rapport de la Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (Miviludes), qui évoque « le cas de la scientologie et de ses nombreuses émanations » comme la CCDH, note bien que le lien « est connu d’un public averti qui ne se trompe pas sur l’organisation qui promeut les différentes activités militantes ». Mais elle précise qu’elle « continue de recevoir des témoignages de personnes qui découvrent progressivement le système de croyances qui sous-tend véritablement ces différentes structures ».
« Il est indiqué dans l’article que « l’Église de scientologie est désignée comme une « secte » en France depuis un rapport parlementaire de 1995 ». Or, la Cour européenne des droits de l’homme, plus haute instance juridique en Europe, a rendu une décision le 5 avril 2007 reconnaissant, à l’unanimité de ses membres, l’Église de scientologie comme une religion », poursuit la CCDH.
« Cette décision s’applique aux 47 pays, dont la France, ayant ratifié la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme. Concernant le rapport parlementaire de 1996 recensant plus de 172 mouvements qualifiés de sectaires, cette liste a été qualifié d’obsolète dans une circulaire du premier ministre, Monsieur Raffarin, ainsi que par une circulaire du ministère de l’Intérieur », conclut-elle.
Si les éléments avançés sont bien factuellement exacts, l’Eglise de scientologie continue de faire l’objet d’une grande attention de la part de la Miviludes. Par ailleurs, en 2013, les deux principales structures françaises de l’organisation américaine ont été définitivement condamnées par la Cour de cassation pour « escroquerie en bande organisée », avec deux amendes d’un total de 600 000 euros, et son ultime recours devant la Cour européenne des droits de l’homme a été déclarée irrecevable.