Métropolisation : des centralités secondaires pour éviter la Paris-dépendance

À un atelier de l’Université des maires, l’importance des centralités a été soulevée pour pallier une certaine dépendance métropolitaine, alors que l’attention se porte souvent sur la petite couronne.

Lors d’un atelier de l’Université des maires, organisé mercredi 10 octobre par l’Union des maires des Yvelines (Umy) à Port-Marly, le maire PCF de Limay et vice-président de la Communauté urbaine grand Paris Seine et Oise (GPSEO) compte sur celle-ci pour donner plus de responsabilités à l’échelle locale, et donc moins à la métropole parisienne. Une indépendance qui ne serait néanmoins pas nouvelle dans les Yvelines, selon un géographe présent à l’atelier.

« Le département des Yvelines s’appuie historiquement sur des centralités, pré-existantes à la métropole parisienne, qui gardent une certaine autonomie vis-à-vis de Paris », avance ainsi Laurent Chalard quant au phénomène de métropolisation dans les Yvelines. Le docteur en géographie s’est d’ailleurs appuyé sur l’exemple concret de la vallée de Seine pour appuyer ses propos.

Selon lui, le pourcentage d’habitants du Mantois allant travailler dans Paris intra-muros, ou y faisant sa vie quotidienne, est relativement faible. « Ce qu’il faut faire, c’est essayer d’inventer un contre-modèle qui serait celui de la centralité secondaire, continue-t-il. Non pas pour concurrencer Paris, ce que Mantes-la-Jolie ou Rambouillet par exemple ne pourront jamais faire, mais en décentralisant. »

Il invite donc les maires présents à « penser centralité secondaire », c’est-à-dire réfléchir à « quels types d’équipements les gens ont besoin dans ces bassins de vie. » Cela pourrait ainsi éviter une quelconque mainmise de la capitale sur le reste de la région. Selon lui, une centralité secondaire peut exister dès lors qu’un centre urbain principal est en place : dans les Yvelines, Paris endosse logiquement ce rôle de métropole mère.

Car cette ombre pesante de Paris sur toute l’Île-de-France, Rémi Roché l’a déjà ressenti. Présent aux côtés du géographe, le président de l’Union nationale des aménageurs (Unam) en Île-de-France assure avoir participé dans les années 2010 à la défense des secteurs plus éloignés de Paris, au moment de la réforme du Schéma directeur de la région d’Île-de-France, le document d’urbanisme et d’aménagement visant à contrôler la croissance urbaine comme démographique et l’utilisation de l’espace.

« On ne parlait que de Paris première couronne, rapporte-t-il. On avait l’impression que le reste, c’était un désert français, pour reprendre l’expression de Jean-François Gravier (géographe auteur de l’ouvrage Paris et le désert Français, Ndlr) », se souvient-il. Lors de cette réforme, Rémi Roché s’est rendu compte que pour certains, le « désert français » était très proche de Paris.

« On parle de pôle de centralité, mais on n’y avait pas mis le nerf de la guerre, c’est-à-dire l’argent nécessaire, explique-t-il. Il arrive un peu avec la loi Elan (loi sur l’évolution du logement, de l’aménagement et du numérique, Ndlr), mais je trouve qu’il y a beaucoup de bla-bla, et en terme d’aménagement, tout est toujours long à se mettre en place. »

En vallée de Seine, la communauté urbaine créée en 2016 rassemble 73 communes, dispose de compétences très larges, notamment celles de l’aménagement et de l’entretien des routes. « Avec GPSEO, il y a des opportunités et du potentiel de développement, mais la taille de la structure et les compétences qui lui ont été transférées nous conduisent à constater que les résultats ne sont pas encore au rendez-vous », a commenté Eric Roulot en tant que représentant de GPSEO, lorsque lui a été demandé si cette structure était un point d’équilibre nécessaire.

« En ce qui concerne les grands projets de développement et d’aménagement […], on est encore très loin de couper les rubans pour inaugurer telle zone économique ou tel équipement culturel ou sportif intercommunal », poursuit le maire alors que GPSEO, en pleine élaboration d’un Plan local d’urbanisme intercommunal (PLUI, voir notre édition du 17 octobre, Ndlr) se débat actuellement dans des questions budgétaires.

Le programme étatique Action cœur de ville, signé il y a quelques jours, devrait être l’une des premières étapes des réaménagements décentralisateurs théoriquement facilités par la création de cette structure intercommunale. Ce plan doit revitaliser en France 222 communes moyennes autour de leur centre-ville. « Cela va permettre de renforcer les centralités secondaires, estime le géographe Laurent Chalard, décrivant une aubaine inespérée pour un département comme les Yvelines. Ce plan signifie que l’Etat a enfin compris l’utilité de ces centralités secondaires et il faut s’en réjouir. »

PHOTO : ILLUSTRATION / LA GAZETTE EN YVELINES