Les automates de recyclage des déchets, étape avant la consigne ?

L’un vient de s’installer à Achères, l’autre est déjà en place depuis deux ans à Poissy. Objectif : rendre le recyclage des déchets financièrement agréable, afin de l’améliorer.

À Achères, les clients de l’hypermarché se sont déjà familiarisés avec le nouveau dispositif alors qu’à Poissy, c’est au sein de la cafétéria du Centre de formations d’apprentis (CFA) que les choses se passent. Qu’est-ce qui rapproche l’enseigne alimentaire achéroise du CFA pisciacais ? La présence dans leurs murs d’un automate de recyclage des déchets, comme un écho aux systèmes de consigne largement présents en Europe, et que le gouvernement envisage d’appliquer en France.

Depuis la fin septembre, le magasin E. Leclerc achérois met à disposition de ses clients deux automates de recyclage des bouteilles en plastique et des canettes. Les bornes ont été développées par la société Cycleen à travers la technologie Tomra, un système de reconnaissance à partir de capteurs permettant de détecter la nature des produits.

« Le principe est simple : le consommateur vient déposer ses bouteilles ou canettes dans les automates, explique Paul Fabiano, cofondateur de Cycleen, qui a déjà équipé une dizaine de grandes surfaces en France depuis la création de l’entreprise en début d’année. Il récupère un centime pour les petites bouteilles, ainsi que les canettes, et deux centimes pour les grandes bouteilles qu’il peut utiliser soit sous forme de bons d’achat à faire valoir dans le magasin, soit en faisant un don à une association locale. »

Une fois insérés dans l’automate, « les produits sont triés puis saisis par un compacteur qui les broie », poursuit le jeune entrepreneur. « La communauté urbaine Grand Paris Seine et Oise s’occupe de la collecte des déchets une fois par semaine. Ils sont ensuite intégrés au circuit de recyclage local », détaille-t-il de la suite du processus.

Pour Paul Fabiano, « l’idée est de récompenser le client et de rendre le geste de recyclage agréable. » Edouard Bernard, autre cofondateur de l’entreprise, dresse un constat sans appel de la situation dans l’Hexagone : « Aujourd’hui, une bouteille en plastique sur deux est recyclée, ce n’est pas grand-chose… Dans les pays du nord de l’Europe, le taux de recyclage atteint les 95 % pour ce type de produit. »

« Cycleen m’a présenté la machine Easypak, cela me plaisait beaucoup, explique Vincent Hurtré, le directeur de l’hypermarché. On avait une boutique de libre au sein du magasin donc on l’a fait, on doit éduquer les gens et montrer que le recyclage est quelque chose d’important. »

Le système mis en place à Achères donne satisfaction, selon Paul Fabiano : « On recycle 2 000 à 4 000 bouteilles en plastique et canettes par jours, ce qui équivaut à 2 à 3 t par mois. » Paul Fino, responsable commercial chez Cycleen, ajoute : « La machine est en croissance constante, jour après jour, on collecte de plus en plus de déchets.»

Les clients du magasin seraient donc nombreux à se rendre aux bornes, à l’instar d’Eric et Sylvie, venus déposer 17 bouteilles en plastique avant de faire quelques emplettes. « On a récupéré 25 centimes en bons d’achat, avec cela, on peut quasiment acheter une baguette de pain, rigolent les deux Achérois. On va l’utiliser tout de suite pour faire nos courses : au moins, avec ce système, on est sûr que nos produits sont bien recyclés. »

Depuis fin septembre, cet hypermarché d’Achères met à disposition de ses clients deux bornes de recyclage des bouteilles en plastique et des canettes.

À Poissy, au sein du CFA Afipe, le procédé est quasi identique, à ceci près que les apprentis ne gagnent pas à tous les coups. « Vous mettez votre gobelet ou votre canette et ensuite vous gagnez ou non un bon d’achat à faire valoir chez les commerçants de la ville (un don à l’association Reforest’Action est également possible, Ndlr), c’est un peu la loterie », sourit Michèle Rebouillat, responsable des actions durables au CFA.

« Depuis deux ans, nous proposons un automate de recyclage des bouteilles en plastique, des canettes, ainsi que des gobelets en plastique et carton », poursuit-elle. Jeudi 15 novembre, l’entreprise Canibal, qui commercialise le système, est venue présenter le dispositif aux nouveaux élèves du CFA vente et commerce.

« L’objectif est de former chaque alternant à l’utilisation de la machine et de les informer sur les filières de recyclage afin de les sensibiliser », confie Thomas Hermant, responsable service client et filières chez Canibal. Depuis 2015, la société basée à Gennevilliers (Hauts-de-Seine) a installé 200 bornes en France et dans les Dom-Tom, en grande partie au sein d’entreprises privées.

En cette journée mondiale de recyclage, l’opération de communication tombe à pic, la démarche s’inscrivant aussi dans le cadre des deux semaines consacrées au recyclage et à la réduction des déchets au sein du CFA. « On veut montrer que le recyclage, c’est un cercle vertueux : chaque produit est recyclé et le produit en lui-même est recyclable à l’infini », martèle Michèle Rebouillat.

Le message semble être passé auprès des étudiants, qui joueraient le jeu. « Je n’ai jamais gagné de bons d’achat mais j’utilise la machine, témoigne Paul, étudiant en BTS MUC (Management des unités commerciales, Ndlr). C’est une bonne idée, car même si on ne gagne pas, on recycle : c’est toujours plus écologique que de mettre nos produits à la poubelle. »

La présence d’automates en vallée de Seine reste pour le moment confinée à des initiatives locales. « En France, il n’y a pas de loi sur la consigne au contraire de certains pays européens où il y une politique en ce sens, précise un des cofondateurs de Cycleen. En Allemagne et en Norvège, par exemple, tout le monde recycle, car c’est la législation en vigueur, la bouteille a une valeur. Chez nous, on en est seulement au stade des discussions avec les pouvoirs publics… »

Abandonnée en France à la fin des années 1990 pour le verre, jamais mise en place pour les plastiques, la consigne pourrait faire son grand retour pour les bouteilles en plastique, les canettes et les piles. Le gouvernement, par la voix de Brune Poirson, secrétaire d’Etat auprès du ministre de la Transition écologique et solidaire, a en effet récemment exprimé sa volonté d’agir sur le sujet.

PHOTOS : LA GAZETTE EN YVELINES