Pas si simple de changer le sens de circulation d’une rue

Jusqu’à la fin de l’année, la rue des Pincevins est mise en sens unique, à la demande des maires mantevillois et magnanvillois. Mais les conséquences sont plus complexes qu’il n’y paraît.

« Vous vous rendez compte que vous allez vous faire détester de tous les Merisiers ? » Lancée au maire mantevillois Cyril Nauth (RN), lors d’une réunion publique le 8 novembre dernier, la question porte sur la mise en sens unique de la rue des Pincevins. Cet axe mis en sens interdit pour raisons de sécurité permet en effet aux Mantevillois de rejoindre facilement l’avenue de l’Europe à Magnanville, le boulevard Roger Salengro à Mantes-la-Ville, et l’autoroute A13. Pour accéder à l’avenue de l’Europe, les automobilistes doivent désormais emprunter la rue des Pierrettes.

Depuis le 1er novembre, un arrêté signé par Michel Lebouc (DVG), maire magnanvillois, et l’édile mantevillois Cyril Nauth, ainsi qu’un panneau sens interdit, ont été apposés aux entrées de la rue, provoquant l’ire des automobilistes. L’arrêté mentionne que la situation est provisoire, Michel Lebouc avance une expérimentation jusqu’en fin d’année, destinée à sécuriser l’avenue de l’Europe, où circulent 26 000 véhicules par jour. Mais ce sens interdit, dont seuls les riverains de la rue semblent satisfaits, n’est pas sans conséquences.

« C’est quand même une zone accidentogène, ce carrefour, pour les gens qui descendaient et qui se croisaient, détaille le maire magnanvillois. On était à environ un accident par semaine, et parfois des très très graves. » La mise en sens unique ne date pourtant pas de ce début novembre. Des travaux d’enfouissement du réseau de gaz ont été réalisés pendant six mois, rendant de fait la rue en sens unique. « J’ai demandé aux forces de police, de sécurité, de savoir si, par rapport à la mise en sens unique due aux travaux, il y avait autant d’accidents », rapporte Michel Lebouc.

Le constat aurait alors été sans appel. « J’ai eu les retours, on m’a dit zéro accident, assure l’édile. En partant de ce principe, pourquoi ne pas penser, à un moment donné, à continuer l’expérience de la mise en sens unique pour garantir la sécurité des citoyens ? » Une expérimentation qui n’est pas vue favorablement par tout le monde. Quelques jours après la réunion publique mantevilloise, une pétition en ligne a été lancée par Nazim, commerçant mantevillois, sur le site internet change.org. Elle a récolté plus de 530 signatures à ce jour.

De toute façon, pour le moment, le sens interdit ne décourage pas vraiment les conducteurs les plus pressés. « Ils continuent à rouler trop vite, notait il y a quelques jours une Magnanvilloise installée dans la rue depuis plusieurs décennies. J’ai peur quand je sors de chez moi, là vous voyez ? » Deux voitures passent, rapidement.

« Le vendredi c’est le pire », exprime-t-elle du non-respect du sens interdit. « On a un véritable problème, la signalétique est hors-jeu, reconnaît Michel Lebouc. Mettre un sens interdit et un couloir de bus dont le tracé est de 2 cm sur la route, ce n’est pas sérieux : j’ai demandé à la communauté urbaine qu’ils mettent une signalétique provisoire qui permette de faire comprendre aux gens, […] il faut que ce soit plus visible. »

Son homologue mantevillois, lui, confiait « n’avoir pas spécialement d’avis sur la question » lors de la réunion du 8 novembre dernier. Une délégation de quatre personnes, dont Nazim le commerçant, ont été reçues en mairie ce 26 novembre. « De ce que j’ai compris, le maire est plutôt de notre côté », explique le jeune homme. Etait également présente à cette réunion une commerçante, afin d’évoquer la perte de chiffre d’affaires liée selon elle à cette mise en sens unique. La petite délégation s’est ensuite rendue à Magnanville, dans l’espoir d’être reçue.

« On s’est présentés à la mairie vers 14 h 30 – 15 h, on n’avait pas de rendez-vous, détaille Nazim. Personne n’a pu nous accueillir […]. J’ai laissé mon numéro de téléphone, j’espère qu’ils vont me rappeler. » Michel Lebouc se dit prêt à rencontrer les pétitionnaires pour « travailler ensemble […] et qu’ils aient l’ensemble de la compréhension du dossier ». Il insiste toutefois : « Dès qu’on essaie de changer les habitudes c’est compliqué, laissons-nous faire l’essai jusqu’à la fin de l’année. […] Et si ce n’est pas concluant, on changera. »

Une réunion devait avoir lieu la semaine dernière entre les services de la communauté urbaine, de la mairie, et du Département pour travailler sur cette question. « J’ai initié une table ronde pour que le tourne à gauche sur Auchan puisse, dans le cadre de la signalétique des feux, permettre de passer plus de voitures de l’avenue de l’Europe vers Auchan, précise l’édile magnanvillois. Aujourd’hui, la signalétique des feux tricolores fait qu’on passe deux voitures, point. Ce qui veut dire que ça embouteille sur l’avenue de l’Europe. »

Pour l’élu, la fluidification de ces axes est indispensable au vu des projets futurs sur le secteur. « C’est un carrefour qui va évoluer d’ici un ou deux ans avec le Leclerc à Mantes-la-Ville, But (un projet de logements et de commerces est prévu sur la friche commerciale, Ndlr), et le projet de Phalsbourg à Buchelay, complète Michel Lebouc. Encore plus de gens vont passer alors qu’il y a 26 000 voitures par jour, on peut laisser comme cela, mais on sera bouchés. »

PHOTO : LA GAZETTE EN YVELINES