La vallée de Seine continue d’être terre d’accueil des Tibétains. Malgré un long périple de trois à quatre mois pour rejoindre la France, tous les chemins mènent visiblement les Tibétains demandeurs d’asile vers Conflans-Sainte-Honorine et Achères. Chaque semaine, ce sont des dizaines de Tibétains qui arrivent à Conflans-Sainte-Honorine, fuyant ainsi les conditions politiques et religieuses chaotiques de leur pays sous l’emprise de la Chine.
« Les Tibétains continuent d’arriver tous les jours. C’est un processus qui dure depuis des années compte tenu de l’accueil positif de la France à leur égard et de la réussite de leur intégration. Ils arrivent ici et ont besoin d’aide », confirme Henriette Barou. Cette bénévole indépendante, qui habite Montmorency (Val d’Oise), leur apporte régulièrement son soutien depuis cinq ans, comme bien d’autres réunis au sein d’un groupe Facebook dédié.
A tel point que de nouveaux réfugiés politiques du Tibet ont réinvesti le campement de fortune clandestin à Achères, improvisé par leur communauté sur les berges de l’étang des Fonceaux en cours de remblaiement dans le cadre du chantier du Port Seine métropole Ouest, trois mois seulement après son démantèlement. Le 29 novembre 2018, 290 Tibétains avaient été relogés dans un ancien institut médico-éducatif (IME) au Chesnay, pour les femmes, et dans des gymnases à Chatou et au Vésinet pour les hommes et quelques couples.
Ce mardi 22 janvier dernier, la sous-préfecture et la mairie d’Achères ont donc organisé un nouveau démantèlement pour permettre à ces Tibétains demandeurs d’asile d’être relogés. Prévenue la veille de cette prise en charge pour ces derniers, Henriette Barou s’est alors occupée de coordonner leur départ. « Je les ai tous recensés le lundi soir pour qu’ils soient prêts à partir du lendemain matin. Ils étaient trente-sept : trente garçons et sept filles », se souvient la bénévole.
« Mais le lendemain, ils n’étaient plus 37 mais 120 dont 27 filles ! Par je ne sais quel moyen, des Tibétains qui étaient hébergés dans d’autres structures, amis ou autres, et ne vivaient donc pas dans le campement, sont arrivés dans la nuit », relate-t-elle. La priorité a donc été donnée aux femmes, car la préfecture a jugé qu’il s’agissait d’un public plus vulnérable.
« Contrairement à ce qui s’est dit, les hommes n’ont pas refusé de quitter le campement. Il n’y avait juste plus de place pour eux et ils ont été priés de quitter les lieux sans aucune proposition d’hébergement, enrage Henriette Barou. C’est tellement injuste que des femmes qui étaient à l’abri aient pris la place des hommes qui n’ont d’autres choix que de vivre dans ce camp insalubre depuis plusieurs semaines. J’ai vu des hommes pleurer. »
Finalement, la préfecture a accepté que le campement ne soit pas démoli dès l’après-midi, comme il avait été annoncé, et que les Tibétains puissent y rester encore quelque temps en attendant que des capacités d’hébergement leur soient trouvées. A ce jour, une quarantaine d’hommes vit toujours près de l’ancien étang des Fonceaux, non loin d’une déchéterie.
« Il s’agit d’une zone dangereuse où d’importants travaux de remblayage de l’étang ont actuellement lieu, commente la mairie d’Achères. En plus du froid de ces derniers jours, ils vivent dans des conditions désastreuses. Nous avons la volonté de trouver des solutions sur le long terme en accord avec la préfecture. » La préfecture n’a, elle, pas pu répondre aux questions de La Gazette dans les délais impartis à publication.
« Je n’ai aucune idée de ce qu’il va arriver à ces Tibétains. Je sais que le sous-préfet cherche des solutions mais c’est très compliqué. Si des familles acceptaient d’en accueillir le temps qu’ils fassent leurs démarches de demandes d’asile, cela faciliterait les choses », rappelle Henriette Barou, qui gère ce genre d’actions (si intéressé, contacter henriette.barou@gmail.com, Ndlr).
Depuis quelques semaines, une dizaine de familles se sont proposées pour accueillir des Tibétains, et en huit jours, 12 ont été accueillis dans des familles d’accueil, plus particulièrement en province. Mais elle n’est pas la seule à défendre la cause tibétaine, loin de là. Grâce au bateau chapelle Je sers, amarré à Conflans-Sainte-Honorine, l’association la Pierre blanche les accompagne aussi depuis des années, et leur fournit vêtements comme nourriture.
De nombreux bénévoles habitant autour de la vallée de Seine comme hors d’Île-de-France assistent également ces réfugiés politiques (selon nos informations, le statut de demandeur d’asile est accordé quasi-systématiquementaaaux Tibétains, Ndlr). La communauté ayant considérablement grandi ces derniers mois, elle s’était improvisée, début 2018, ce campement près de l’ancien étang des Fonceaux. Une installation précaire qui n’a cessé de s’étendre, jusqu’au démantèlement de novembre 2018.
PHOTO : LA GAZETTE EN YVELINES