Des bornes d’électricité et d’eau arrivent pour les bateaux de commerce

Suite à une forte demande des bateliers et de la municipalité, la ville va voir arriver des bornes d’alimentation en électricité et eau potable pour les transporteurs fluviaux de marchandises avant juin 2019.

Flavien Belpaume

D’ici juin 2019, le quotidien des quais de Seine conflanais devrait subir un important changement. Rien qui ne viendrait contrarier la vie des bateliers, riverains ou des passants, bien au contraire. Il s’agit tout simplement d’une nouveauté qui permettrait de nouvelles possibilités pour les uns, tout en réduisant les nuisances pour les autres. C’est dans ce sens que quatre bornes de distribution d’eau potable et d’électricité vont faire leur apparition sur les bords de Seine dans la ville de Conflans-Sainte-Honorine.

Ce nouveau service doit permettre l’alimentation en électricité et en eau pour les bateaux de commerce navigant entre Le Havre et Paris à travers la Seine. Porté par Haropa, le Groupement d’intérêt économique des ports du Havre, de Rouen et de Paris, ainsi que par Voies navigables de France (VNF), le gestionnaire du réseau fluvial, ce projet est expérimenté depuis le 3 décembre 2018. Quatre villes en sont déjà équipées, Conflans sera la prochaine.

De nos jours, la Seine est considérée comme une véritable autoroute fluviale. Elle représente plus de la moitié du trafic fluvial de marchandises en France avec plusieurs centaines de bateaux qui naviguent quotidiennement, et sans discontinuer, entre Le Havre et Paris. L’idée de ces bornes vient répondre à un besoin d’améliorer les services pour ces usagers réguliers du fleuve.

Depuis le 3 décembre 2018, neuf bornes d’eau et d’électricité ont progressivement été mises en service sur les ports du Havre (Seine-Maritime), de Rouen (Seine-Maritime), de Gennevilliers (Hauts-de-Seine) et à l’amont de l’écluse d’Amfreville-sous-les-Monts (Eure). « A la base, nous avons démarré ce projet à Amfreville. Trois bornes ont été conçues pour là-bas, en attendant les premiers retours. On arrive au terme de l’expérimentation et force est de constater que les avis sont positifs. Voilà pourquoi d’autres bornes sont déployées », tient à préciser Daria Orlac’h, chef de l’unité territoriale d’itinéraire Boucles de la Seine pour VNF.

Grâce au soutien financier de l’État, de l’agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (ADEME), des régions Normandie et Ile-de-France et de l’Union européenne, les villes citées précédemment ont pu être dotées de ce service de distribution. A titre indicatif, concernant l’opération d’Amfreville-sous-les-Monts, l’investissement total est d’environ 150 000 euros hors taxes pour la fourniture, le raccordement et l’installation des trois bornes.

Selon le communiqué, chaque équipement se compose de quatre prises électriques et parfois de deux prises d’eau, ce qui offre ainsi la possibilité à deux bateaux de se connecter simultanément. Les bateliers pourront y accéder sept jours sur sept et 24 heures sur 24, sur abonnement ou en payant directement à la borne.

Un site internet sera mis à leur disposition afin de s’abonner, de contrôler la borne à distance au moment du raccordement et de suivre leurs consommations en eau et en électricité (inscription sur borneeteau.com, Ndlr). « Concernant le coût pour les usagers, à l’heure actuelle, le tarif appliqué pour l’ensemble des bornes en place sur l’axe Seine s’élève à 0,20 euros par kilowatt-heure pour l’électricité et à cinq euros par mètre cube pour l’eau », ajoute Daria Orlac’h.

Cependant, il est important de faire la distinction entre ces bornes mises à la disposition des usagers de transport de marchandises et celles qui sont installées pour les bateaux de croisière. « Pour les bateaux de croisière, les installations sont plus puissantes et plus coûteuses, puisqu’il s’agit d’un usage industriel pour des paquebots pouvant accueillir jusqu’à 130 passagers à bord », indique-t-elle. Ce type de service ne leur est donc pas destiné.

L’accès aux bornes électriques devrait permettre de réduire les pollutions atmosphériques, liées à l’utilisation des groupes électrogènes lorsque les bateaux sont à quai.

Et si Conflans s’apprête à devenir la première ville de vallée de Seine à voir s’installer ce type de bornes pour les bateliers, elle le doit en grande partie à sa municipalité. « Lorsque le projet est né, il devait surtout convenir pour Le Havre, Rouen et Amfreville. Conflans n’était pas du tout prévue. Et puis il y a eu une très forte demande des usagers et du maire donc nous avons réfléchi à cette éventualité », poursuit la chef d’unité territoriale pour VNF.

« C’est un souhait des bateliers qui remonte à très longtemps que nous avons relayé auprès de VNF. Depuis 2014 et le début du mandat, nous sommes en échange permanent avec eux pour leur faire part de ce besoin, avance de son côté Laurent Brosse, maire de la ville. C’est sur le point d’aboutir et c’est une très bonne nouvelle que ça se fasse cette année. Ça permettra d’avoir un service supplémentaire à Conflans-Sainte-Honorine et de faciliter la vie des bateliers. »

En plus de leur faciliter la vie, ces bornes vont également permettre aux bateliers d’agir de manière plus responsable. L’accès aux bornes électriques devrait permettre de réduire les émissions de CO2, et donc les pollutions atmosphériques, liées à l’utilisation des groupes électrogènes lorsque les bateaux sont à quai. Selon le communiqué, une économie de 68 tonnes d’équivalent carbone par an et par borne est estimée. Grâce à ce service, le transport fluvial sort aussi gagnant avec des économies non-négligeables sur le carburant et l’entretien des transporteurs de marchandises.

Mais ils ne seront pas les seuls à bénéficier des avantages de ces bornes. Selon les coordonnées indiquées sur les études de marché public, les quatre bornes seront réparties entre le quai Eugène le Corre et le quai de la République àaConflans-Sainte-Honorine, face à des habitations. Certains riverains se réjouissent déjà de la réduction des nuisances sonores et olfactives.

C’est le cas de cet habitant qui réside face à l’un des quais de stationnement des transporteurs fluviaux. « Ça ne fera pas de mal de ne plus entendre leur moteur allumé. Quand on vit ici à l’année, il y a de quoi devenir sourd », ironise le riverain. « En plus, c’est mauvais pour la planète, c’est leur moteur qui tourne. C’est pire que si nous, nous laissions nos voitures allumées devant nos maisons. Pour moi, ces bornes c’est une très bonne chose pour tout le monde. Maintenant, est-ce que les bateliers vont jouer le jeu et payer pour ça ? Je me le demande », continue celui-ci, préférant rester anonyme.

Pour ce batelier nordiste de passage à Conflans-Sainte-Honorine, garé le long du quai Eugène Le Corre le 15 février dernier, ces nouvelles installations sont une surprise. « Je ne savais pas, vous me l’apprenez. Mais pour ma part, si c’est vrai, je les utiliserai. Ne serait-ce que pour l’eau. Et c’est toujours mieux et plus pratique de se brancher à la terre plutôt que de relancer sans arrêt le groupe électrogène, juge-t-il. Ça devrait nous faire économiser du gasoil c’est bien. Mais niveau argent, ça ne changerait pas grand-chose puisqu’on paierait à la borne. »

A la vue de la satisfaction des riverains et des bateliers sur ces installations prochaines, la question de leur implantation dans d’autres villes d’escales de commerce fluvial peut légitimement se poser. Et selon VNF, rien n’est écarté. « Techniquement, et sous réserve de pouvoir faire l’amenée des réseaux sans difficulté particulière, il est toujours possible de doter les garages à bateaux de VNF de ce type d’équipements. Cependant, ces aménagements représentent un investissement pour VNF et nécessitent donc d’être rationalisés », confirme Daria Orlac’h.

Concernant Poissy et Mantes-la-Jolie, les deux villes ont bien été ciblées pour des bornes d’eau et d’électricité mais en aucun cas pour les transporteurs de commerce. De toute manière, ceux-ci ne stationnent pas dans ces villes qui sont simplement des escales pour les bateaux de croisière. « Le déploiement d’une offre de bornes d’alimentation électrique sur l’ensemble des escales est prescrit pour l’horizon 2027, conclut la représentante de VNF. Parmi les sites de développement potentiels identifiés, l’électrification des sites d’escale de Mantes-la-Jolie et de Poissy a bien été identifiée. »

PHOTO : LA GAZETTE EN YVELINES