Finances : l’hôpital François Quesnay replonge

Après deux années à l’équilibre, les comptes sont à nouveau dans le rouge, avec un déficit prévisionnel de 3,7 millions d’euros en 2018.

Le lundi 28 janvier, lors de la cérémonie des vœux de l’hôpital François Quesnay de Mantes-la-Jolie, Stéphane Hazan n’y va pas par quatre chemins. « L’hôpital avec un grand H est malade, le système de soins est malade. Tout le monde en est conscient », fait savoir devant une partie du personnel et de la direction le président de la commission médicale d’établissement (CME).

Après deux années à l’équilibre, les comptes du centre hospitalier mantais sont à nouveau dans le rouge, avec un déficit prévisionnel qui devrait se chiffrer à 3,7 millions d’euros pour l’exercice 2018. Contactée par La Gazette, la direction déléguée de l’hôpital tient à préciser qu’il s’agit « d’un chiffre non définitif dans l’attente de la clôture de l’exercice comptable 2018  ». Des difficultés conjoncturelles liées au recrutement de certains postes médicaux, mais aussi le mode de financement des hôpitaux, seraient responsables de ce déclin financier.

« En 2018, le centre hospitalier François Quesnay ne sera pas au rendez-vous sur le plan de la situation budgétaire », concède lors des vœux de l’hôpital Isabelle Leclerc, qui assure depuis quelques mois la direction commune du centre hospitalier intercommunal de Poissy-Saint-Germain (Chips), du centre hospitalier intercommunal de Meulan-Les Mureaux (Chimm) et de l’hôpital François Quesnay de Mantes-la-Jolie, et pilote également le groupement hospitalier territorial des Yvelines nord (GHT) qui rassemble les trois centres hospitaliers.

L’ hôpital mantais enregistrera un résultat déficitaire supérieur à celui qui était prévu à l’État prévisionnel des recettes et des dépenses (EPRD), et cela « après deux années le situant dans la zone d’équilibre et ceux en raison principalement d’une baisse de ses recettes d’activités », poursuit la directrice générale Isabelle Leclerc.

Un trou dans les caisses en partie anticipé par ses responsables, puisque l’EPRD 2018 prévoyait déjà un déficit de 2 millions d’euros. « Au final, [il] est plus important que prévu car l’établissement a connu une diminution conjoncturelle de son activité », confirment les responsables de l’hôpital. Les causes de cette baisse d’activité s’expliqueraient par des difficultés de recrutement de postes médicaux, ayant souvent conduit à fermer des lits, ou à devoir réduire l’activité dans certains secteurs, de façon ponctuelle ou prolongée.

« Dans le courant de l’année, l’établissement a dû fermer des lits de manière transitoire dans certains secteurs cliniques en raison de difficultés rencontrées pour recruter du personnel médical. Ces fermetures de lits ont induit une diminution de recettes de deux millions d’euros », informe la direction déléguée de l’établissement.

Ainsi, l’unité de soins intensifs en cardiologie (Usic) a été fermée pendant plusieurs mois, alors que huit lits ont été retirés en pneumologie par manque d’effectif médicaux. « Parallèlement, vous avez des gens à payer car le personnel [non médical] n’était pas réduit pour des fermetures de lits ponctuelles », note le président de la commission médicale d’établissement Stéphane Hazan.

La direction du centre hospitalier tient néanmoins à souligner que « les difficultés de recrutement connues début 2018 sont en grande partie résorbées à ce jour », et précise dans sa réponse à La Gazette que « la plupart des lits fermés ont pu être rouverts fin 2018 ou dès 2019 », écrit-elle : « L’unité de soins intensifs de cardiologie, fermée provisoirement pendant cinq mois au deuxième semestre 2018, a été rouverte depuis novembre dernier alors que d’autres unités comme le court séjour gériatrique et l’unité de soins intensifs de néonatalogie dédiée à l’accueil des nouveaux nés les plus fragiles ont vu leur capacité étendue. »

Au-delà de ces difficultés conjoncturelles, l’hôpital mantais, comme beaucoup d’autres structures hospitalières publiques en France, reste lourdement pénalisé par la Tarification à l’activité (T2A). La diminution de l’activité, conjuguée à une baisse des tarifs des actes médicaux, seraient responsables d’une situation financière dégradée.

« L’hôpital ne fonctionne plus à partir de dotation globale, mais sur la tarification à l’activité (T2A) », rappelle Céline Dumoulin (LR), présidente du conseil de surveillance de l’établissement. « Plus il y a d’activité et plus il y a de recettes. Les effets pervers de la T2A sont maintenant connus et pénalisent l’hôpital public qui réalise des soins peu rémunérateurs », souligne-t-elle à propos d’un système qui repose sur la mesure et l’évaluation de l’activité effective des établissements et qui en détermine les ressources allouées.

De son côté, Stéphane Hazan met également en avant les conséquences néfastes de cette méthode de financement très décriée, mise en place à partir de 2004 dans le cadre du plan Hôpital 2007. « La T2A est bien pour certaines activités notamment la chirurgie, qui produit des actes médicaux, mais inappropriée pour d’autres comme la réanimation où le patient peut rester dix jours ou six mois, explique le médecin. La T2A, c’est une logique d’entreprise, où vous avez un acte et vous êtes rémunérés pour cet acte. »

La santé financière précaire de l’établissement inquiète également les représentants du personnel. « Cela n’augure rien de bon pour l’hôpital et ses personnels, et encore moins pour la prise en charge des patients qui nous font confiance, admet Bernard Landais, secrétaire du syndicat Force ouvrière (FO). Avec un tel déficit, il va y avoir dans les prochains mois des suppressions de postes, des réorganisations de services, des fermetures de lits, qui vont nous impacter encore très lourdement. Depuis cinq ans, on a déjà fermé 107 lits d’hospitalisation », peste le représentant syndical.

Pour sa part, la direction du centre hospitalier François Quesnay met en avant le fait que « l’établissement public de santé de référence de l’ouest des Yvelines qu’est et restera l’hôpital de Mantes-la-Jolie conserve une dynamique de projets remarquables dans tous les secteurs, notamment la maternité qui développe les prises en charge prénatales et des grossesses à hauts risques, ou encore la dermatologie qui développe quant à elle une nouvelle technique de greffe complexe.  »