En 2014, lors des élections municipales, la quadrangulaire à Mantes-la-Ville avait permis au candidat du Front National, Cyril Nauth, de prendre l’avantage et d’être élu avec 61 voix d’avance. Six ans plus tard, au premier tour des élections municipales du 15 mars dernier, le maire sortant arrive de nouveau en tête avec 33,72 % des voix devant trois autres candidats.
Juste derrière lui, l’ancien président du FC Mantois, Sami Damergy avec 27,22 % des voix, puis la candidate EELV Amitis Messghadi (17,55 %) et Romain Carbonne (14,82 %), candidat DVG. Les deux derniers candidats, pourtant toujours dans la course, choisissent de se retirer, laissant la place à un duel Nauth-Damergy. Le maire sortant du Rassemblement National tente désormais de défendre son bilan, attaquant son adversaire fréquemment pour tenter de sauver une réélection de moins en moins assurée.
Sécurité, vie des associations, vie culturelle et sportive, propreté, Cyril Nauth a du mal à faire ressortir les bons points du bilan de son mandat et était régulièrement attaqué sur ces points en conseil municipal. À quelques mois seulement de déménager à Tacoignières, à une demi-heure de route de Mantes-la-Ville avec sa famille, le candidat tente toujours de se faire réélire dans la commune qui lui a permis de décrocher son premier mandat d’élu local et de devenir par la suite conseiller régional puis conseiller communautaire au sein de la communauté urbaine Grand Paris Seine et Oise (GPSEO), lors de sa création au 1er janvier 2016.
En 2014, le candidat du Front National, devenu depuis Rassemblement national, faisait reposer son programme en grande partie sur la sécurité avec une augmentation des effectifs de la police municipale et des moyens ou encore d’une extension de la vidéosurveillance.
Le maire sortant semble ne pas considérer lui-même avoir totalement réussi puisqu’il reprend ses mêmes objectifs dans son programme de 2020. Il indique ainsi qu’après « avoir développé les moyens matériels de 2014 à 2020 », évoquant en février à La Gazette en Yvelines, l’armement léthal, l’achat de trois voitures neuves et la construction d’un nouveau poste de police rue du Val Saint-Georges, il faut désormais « développer les effectifs de la police municipale ».
En février dernier, cinq postes d’agents de police municipale étaient occupés sur les huit budgétés. Un chiffre resté stable durant ces six ans, alors que la moyenne est d’un policier municipal pour 1 000 habitants. Sur les 27 recrutements effectués, autant de départs ont été recensés. Attaqué sur ce sujet, Cyril Nauth pointe, lui, des difficultés de recrutement communes à toute l’Île-de-France.
Le maire n’a certes pas augmenté les impôts et se satisfait de sa gestion budgétaire. Mais ces économies ont été pratiquées en réduisant les subventions aux associations culturelles et sportives ou encore avec la suppression d’infrastructures. France Inter, en septembre 2014, expliquait déjà : « Toutes les subventions municipales ont été diminuées de 22 %, le périscolaire, lui, est désormais payant. » Les structures sociales comme les centres de vie sociale (CVS) ont longtemps été mises à mal par le maire de la commune, leur restructuration étant annulée dès le début du mandat.
En parallèle, difficile de faire avancer son programme lorsque l’on a des difficultés à rassembler sa majorité, lors de conseils municipaux annulés et reportés les uns après les autres depuis le début de du mandat, faute de quorum, l’opposition quittant systématiquement la salle lorsque le nombre de conseillers requis, 17, n’était pas obtenu dans les rangs du maire et de son équipe.
Une situation que Cyril Nauth assume : « À l’époque je ne cherchais pas forcément des gens prêts à s’investir en étant élu pendant six ans, je pensais que j’allais avoir un groupe de quatre, cinq, six maximum. » Une activité municipale qui s’est tristement conclue puisque le 31 janvier dernier, le conseil municipal a duré « à peine trente minutes » et « neuf élus de la majorité étaient présents sur 22, et sept de l’opposition, soit un total de 16 élus sur 33 au total ».
Si la majorité a eu du mal à faire front autour du maire, des conflits ont aussi opposé mairie et employés municipaux. Six mois seulement après son arrivée, les cadres de la mairie quittent en masse leur fonction. Le Point consacre alors un article en septembre 2014 à la quinzaine de cadres de Mantes-la-Ville qui « quittent le navire ». Durant six ans, les scandales autour de la gestion des agents municipaux à la mairie ou dans les services municipaux, ont fait les gros titres de la presse locale.
En septembre 2017, les agents municipaux votent une grève et sont plus d’une centaine à manifester devant la mairie. En juin 2018, l’ex-directeur de cabinet de Cyril Nauth, Bruno Roy, évincé plusieurs mois auparavant, témoigne dans La Gazette en Yvelines et y aborde la « faiblesse » de l’élu. La nomination de sa compagne au poste de directrice générale des services puis son départ en février 2020 annoncé par le Courrier de Mantes et Temps Réel 78 ont également fait réagir les élus d’opposition durant le mandat.
Depuis quelques mois, Cyril Nauth est également pointé du doigt par la CGT des territoriaux de Mantes-la-Ville, relatant de nombreuses saisies du tribunal administratif de Versailles, suite à des sanctions prises par le maire à l’encontre d’agents municipaux. Le syndicat dénonce « un manque d’empathie et d’écoute » à l’encontre des agents concernés. Une position que Cyril Nauth avait assumé puisque, lors du conseil municipal du 20 décembre 2019, il avait affirmé : « Un agent est titulaire de son grade, pas de son poste. » Une situation qui a conduit la CGT à demander « un vrai dialogue social » durant la prochaine mandature.
« Depuis le début du mandat actuel, l’absence de dialogue social s’est installée progressivement dans notre collectivité, et aujourd’hui, il faut être clair, il n’y en a plus du tout » déplore la CGT dans un tract daté du mercredi 17 juin 2020.
À quelques jours seulement du second tour, ce dimanche 28 juin, Cyril Nauth fait campagne, et surtout, attaque son adversaire Sami Damergy. Sur la page Facebook de sa liste Rassemblement pour Mantes-la-Ville, quasiment tous les derniers messages, le concernent. Dans son message le plus récent, daté du samedi 20 juin, le candidat et son équipe ont publié une double page de tract sur son adversaire, l’attaquant frontalement et écrivant ainsi « Sam Damergy va mettre en place un véritable racket fiscal » assurant que le candidat est responsable d’incidents durant la campagne et le premier tour.
Dans un post du 19 juin, il écrit « SAMI DAMERGY OU LE CANDIDAT DU VIDE, DU MENSONGE ET DU CHANTAGE ». Quelques jours plus tôt, un post commençait par « LA BAUDRUCHE DAMERGY EST-ELLE EN TRAIN DE SE DÉGONFLER ? ». Mais pour remonter au programme à proprement parler, il faut remonter à un post daté du 26 février dernier.
Alors que Cyril Nauth accusait son concurrent de faire campagne durant le confinement, une information, démentie par le candidat lui-même, ce sont désormais les manipulations du candidat du Rassemblement national et de son équipe qui sont mises en lumière par le site internet Temps Réel 78. Le premier adjoint, Laurent Morin, toujours présent sur la liste de Cyril Nauth, pour le prochain mandat, aurait forcé une septuagénaire à se rendre au commissariat pour signer une procuration en vue des élections municipales, ce qu’il dément sur Facebook. « Sur le coup elle a dit oui, explique la fille de la septuagénaire. Elle m’a appelé après […]. Elle a eu du mal à comprendre la démarche de comment cela se passait la procuration. » Sa famille envisageait de déposer une main courante au commissariat de Mantes-la-Jolie. Ultimes tentatives et manœuvres pour tenter de sauver la réélection d’un maire en danger ?
S’il est réélu, Cyril Nauth pourrait-il vraiment toujours être présent dans la ville et être un élu de terrain ? Des doutes planent de plus en plus puisque comme annoncé dans la Gazette en Yvelines, le maire sortant est en train de construire une nouvelle résidence à Tacoignières, un petit village du Pays Houdanais, situé à une vingtaine de kilomètres de Mantes-la-Ville. Un permis obtenu le 1er octobre 2019, quelques jours avant que Cyril Nauth annonce au Parisien sa volonté de se présenter à sa réélection.
Crédits photo : DR