Dans les collèges et lycées, « impossible de respecter le protocole sanitaire »

Cette rentrée des vacances de la Toussaint a été marquée par la fronde des enseignants, des élèves et des parents. Tous déplorent un protocole sanitaire « déconnecté de la réalité du terrain ».

Peurs et tensions sont aux premiers rangs dans les collèges et lycées depuis la rentrée. Grèves, suspensions de cours et parfois retrait des enfants des classes, depuis le lundi 2 novembre, les actions se multiplient, un peu partout dans la région mantaise, pour dénoncer les conditions sanitaires dans lesquelles se fait l’accueil des élèves, alors même que la propagation de l’épidémie est grandissante.

Pour les enseignants du primaire et du secondaire, le protocole sanitaire déployé par le ministère de l’éducation nationale, « ne permet pas de recevoir les élèves en toute sécurité ». Si les lycées ont obtenu des aménagements, avec notamment un enseignement en demi-groupe, la grève se poursuit ou se prépare dans les collèges et les écoles primaires. De son côté la Région, gestionnaire des lycées, a annoncé renforcer sa distribution de matériel informatique pour ­l’enseignement à distance. Concernant le protocole sanitaire « rien n’a changé depuis le mois de septembre, déplore un enseignant du lycée Léopold Sedar Senghor à Magnanville, où les enseignants ont décidé majoritairement de se mettre en grève à partir du mardi matin. Les élèves sont entassés dans les salles, dans les couloirs : c’est impossible de respecter la distanciation ». L’enseignant met d’ailleurs l’accent sur l’architecture cloisonnée, sans cour, de ­l’établissement qui accueille 1 100 élèves.

Dans une lettre envoyée aux parents d’élèves, le personnel gréviste du lycée magnanvillois appuie ses observations d’une photo montrant la file d’attente bondée pour accéder au restaurant scolaire. « La Région elle-même reconnaît que notre service de cantine devrait être doublé mais rien n’est fait », déplore le professeur.

Et visiblement, quelque soit l’établissement, il semble difficile d’associer les gestes barrières à l’heure du réfectoire. Mardi 2 novembre, à Aubergenville, les élèves du lycée Van Gogh, qui depuis le mois de septembre sont contraints de déjeuner dans des préfabriqués installés dans la cour, ont tenté de se faire entendre au moyen d’un blocus devant le lycée.

« Ce que disent certains jeunes est entendable, confie le maire Gilles Lécole (LR) qui s’est rendu sur place. Ils nous disent que sur le temps de la restauration, les mesures barrières ne peuvent pas être respectées et ils ont raison […] avant le Covid ça tenait avec les Algecos mais aujourd’hui c’est impossible. »

Selon le maire, la réfection du restaurant scolaire, engagée par la Région en septembre 2019, devait être prête pour la rentrée 2020 mais a pris du retard. Et la situation devrait encore durer puisque la Région prévoit désormais une livraison des ­travaux pour la fin de l’année scolaire.

« Les élèves sont entassé dans les salles, dans les couloirs : c’est impossible de respecter la distanciation », déplore un enseignant du lycée Léopold Sedar Senghor à Magnanville.

« Nous ne prendrons pas la responsabilité de contaminer nos élèves ou leurs familles », résume une prof du collège Paul Cézanne, situé dans le quartier du Val-Fourré à Mantes-la-Jolie et où les cours ne devraient pas reprendre normalement, tant que les enseignants n’auront pas obtenu gain de cause. L’un de ses collègues qui enseigne l’EPS, note également des recommandations sanitaires « déconnectées de la réalité du terrain. Au niveau du sport collectif il y a des recommandations pour faire du football ou du handball à deux mètres de distance… ».

Ce constat global est également partagé par les parents d’élèves comme au collège de la Vaucouleurs à Mantes-la-Ville, où ce sont eux qui ont pris les devants en lançant une opération « collège mort », visant à ne pas envoyer les enfants à l’école. « Les enfants aussi ont peur », rapporte Grégory Louvion, le président du conseil local de la FCPE. À Paul Cézanne, cette idée aurait été évoquée « mais certains se sentent contraints de les envoyer à l’école par peur de perdre leurs allocations », confie une enseignante.

Dans l’ensemble, une même revendication domine. « Il faut organiser un dédoublement en demi-groupes », assure François Hébert professeur au lycée mantais Saint-Exupéry et délégué syndical au Snes Fsu. Après 82 % de participation recensé dans l’établissement dès lundi, les enseignants ont obtenu, jeudi 5 novembre, ces aménagements. François Hébert en explique le déroulement : « L’idée c’est que les élèves viennent un jour sur deux dans le lycée pour qu’il y ait le moins de rupture avec l’école », rapporte-t-il. Dans les collèges, en revanche, on attend toujours de telles mesures.

Comme durant le premier confinement, l’enseignement à distance devrait ainsi retrouver sa place. « Pour faciliter l’arrivée de cet enseignement hybride, […] nous avons décidé de commander 70 000 ordinateurs supplémentaires qui seront réservés aux élèves de première et de terminale non encore équipés d’un ordinateur personnel », indique en réponse la présidente de Région, Valerie Pécresse (Libres) lors d’une conférence de presse vendredi 7 novembre. Un apport qui devrait, selon elle, permettre « à 100 % » des lycéens franciliens d’être équipés d’ici la fin du mois de janvier.