Coronavirus : les premiers vaccins arrivent au compte-goutte en vallée de Seine

Le 7 janvier à Poissy, le centre de vaccination Chez Mauricette a été inauguré. Ce jour-là, 25 soignants de plus de 50 ans se sont fait vacciner.

« C’est une chance, c’est un privilège. » Le médecin généraliste pisciacais, Christian Lehmann, n’a pas caché son émotion lors de sa vaccination contre le Covid-19, jeudi 7 janvier. Ce jour-là, au centre de diffusion artistique, un centre de vaccination a ouvert ses portes à Poissy. Baptisé Chez Mauricette en référence à la première personne vaccinée le 27 décembre dernier à Sevran (Seine-Saint-Denis), il a permis, lors de son inauguration, la vaccination de 25 personnes de plus de 50 ans, toutes issues du personnel soignant. Ces dernières font partie des personnes prioritaires dans le calendrier vaccinal déployé de manière progressive sur le territoire français. Beaucoup d’entre elles dénoncent néanmoins la lenteur de la mise en application de la stratégie de vaccination.

« L’OMS (Organisation mondiale de la santé, Ndlr) demande à l’Europe d’accélérer son programme de vaccination. On peut donc s’étonner que depuis que les vaccins sont arrivés en France, l’organisation de la campagne de vaccination […] ne soit pas complètement optimisée et organisée au préalable. C’est en train de s’organiser mais c’est petite vitesse et grande lenteur », dénonce Bernard Landais, secrétaire syndical de Force Ouvrière (FO) à l’hôpital François Quesnay, basé à Mantes-la-Jolie, en précisant toutefois qu’au vu de ses connaissances médicales et de son vécu depuis le mois de mars dernier, il lui paraît logique « de protéger [en priorité] les personnes les plus sensibles et les personnes qui sont en capacité de s’occuper de ces personnes sensibles ».

« À Mantes-la-Jolie, [la campagne de vaccination] commence lundi pour les professionnels de santé », répond la directrice de la délégation départementale de l’Agence régionale de santé (ARS) d’Île-de-France, Marion Cinalli. Outre les soignants de plus de 50 ans, le ministère des solidarités et de la santé indique sur son site internet, solidarite-sante.gouv.fr, que les personnes âgées résidant en Ehpad et le personnel soignant présentant des facteurs de risques de développer des formes sévères de la maladie, font également ­parties des publics prioritaires.

En parallèle du centre de vaccination Chez Mauricette, le centre de diffusion artistique continue d’accueillir le Covidrome pour dépister les malades du coronavirus.

Le maire de Poissy, Karl Olive (DVD), ne cache cependant pas son envie de voir la vaccination s’élargir à l’ensemble des soignants travaillant notamment avec les personnes âgées. « Je pense qu’il ne faut pas confondre vitesse et précipitation mais j’aimerais que la Haute autorité de santé puisse être un peu plus flexible », déclare-t-il en prenant pour exemple la résidence pour personnes âgées des Ursulines, implantée en ville. « On a sept personnes qui y travaillent, deux ont plus de 50 ans et le reste a moins de 50 ans. Les deux de plus de 50 ans peuvent se faire vacciner, les cinq autres ne le peuvent pas. Je ne comprends pas bien où est la cohérence alors que ces mêmes personnes sont toujours en prise directe avec les populations les plus fragiles », précise-t-il en ajoutant qu’il souhaite également que la stratégie ­vaccinale « puisse monter en cadence ».

Affirmant disposer d’ « autour de 5 000 doses qui arrivent par semaine » pour l’ensemble du département, Marion Cinalli souhaite le rassurer. « C’est une montée en charge qui est progressive » affirme-t-elle, en rappelant que les quatre centres de vaccination yvelinois se situent actuellement à Versailles, Poissy, Rambouillet et Mantes-la-Jolie. Hormis celui de Poissy, les trois autres sont « adossés à des hôpitaux ». Par ailleurs, Marion Cinalli déclare que « d’ici la fin du mois de janvier, on aura fait tous [les résidents volontaires de] nos Ehpad (Sartrouville, Plaisir, Versailles et Louveciennes, Ndlr) » en précisant que « nos Ehpad aujourd’hui c’est [environ] 9 000 résidents […] ».

Ses propos optimistes, concernant le déploiement de la stratégie vaccinale, se retrouvent également dans les paroles d’Isabelle Leclerc, la directrice générale du groupement hospitalier du territoire (GHT) du Nord des Yvelines. « Nous sommes en phase d’accélération, déclare-t-elle. Les personnes âgées vont commencer la semaine prochaine également. » Selon le site service-public.fr, la vaccination pour « les personnes âgées de 75 ans et plus, vivant à domicile, [sera ­permise] à partir du 18 janvier 2021 ».

Selon le site service-public.fr, la vaccination pour « les personnes âgées de 75 ans et plus vivant à domicile [sera permise] à partir du 18 janvier 2021 ».

Du fait de l’augmentation progressive du nombre de personnes pouvant se faire vacciner, Marion Cinalli assure déjà commencer à travailler sur les futurs lieux pouvant accueillir un centre de vaccination. « On est en train de travailler avec les maires pour ouvrir d’autres centres de vaccination qui vont mailler le territoire pour la population générale de plus de 75 ans, assure-t-elle le 7 janvier. Je ne peux pas vous dire encore combien il y en aura, une dizaine je pense. »

Dans une lettre adressée le 8 janvier au sous-préfet de Mantes-la-Jolie, Gérard Derouin, l’édile limayen, Éric Roulot (PCF), a fait savoir sa volonté d’ouvrir un centre de vaccination dans sa commune. « Nous disposons des structures permettant l’accueil des administrés dans les meilleures conditions et avons les compétences nécessaires en matière de ­logistique », écrit-il.

En attendant, les opérations de dépistage du Covid-19 se ­poursuivent. Ainsi, en parallèle de Chez Mauricette qui est ouvert du lundi au vendredi, de 14 h à 17 h, sur rendez-vous, le centre de diffusion artistique continue d’accueillir le Covidrome pour dépister les malades du coronavirus. La commune de Poissy n’est cependant pas la seule à continuer de telles opérations. En effet, à titre d’exemple, des tests antigéniques seront gratuitement réalisés le 14 janvier prochain, de 9 h à 13 h, dans la salle du conseil municipal d’Épône dans la limite de 160 tests.

Les soignants questionnés sur le vaccin
par les habitants

« Il faut convaincre les gens, leur expliquer et leur montrer le bien fondé d’un système qui est assez vieux. » Le 7 janvier, Chez Mauricette, Christian Simonet, un infirmier libéral à Trappes ayant participé à la vaccination de ses confrères à Poissy après s’être lui même fait vacciner deux jours plus tôt, n’est pas le seul à évoquer la crainte de la population à l’égard du vaccin.

« Mais docteur, un vaccin d’ordinaire, on met huit à neuf ans pour le faire et là il a été fait en un an. Est-ce-que ce n’est pas trop brutal ? », rapporte par exemple le médecin généraliste pisciacais Christian Lehmann des interrogations soulevées par ses patients. « La planète toute entière est à l’arrêt depuis des mois et ce que vous voyez avec ce vaccin c’est ce que peut faire le génie humain quand les gens travaillent ensemble », affirme-t-il leur répondre en rappelant néanmoins qu’il est vrai que les scientifiques se sont parfois « affrontés durement » pour la création du vaccin.

« Les personnes veulent comprendre le mécanisme », déclare quant à lui le médecin généraliste et hospitalier, responsable du département de santé publique et du service de vaccination dans les Yvelines, situé au centre hospitalier intercommunal de Meulan-Les Mureaux (Chimm), Benoît Coudert.

Des craintes existent cependant également chez certains soignants comme le suggère Isabelle Leclerc du groupement hospitalier du territoire (GHT) du Nord des Yvelines. « Nous allons continuer à expliquer dans les différents services des trois hôpitaux les bienfaits de ce vaccin et d’essayer de lever les réticences qui peuvent exister au sein des personnels soignants, comme elles existent dans la population générale », indique-t-elle.

« C’est une décision qui doit se prendre individuellement. On ne doit pas tenter d’influencer les personnes pour ou contre la vaccination », rétorque le secrétaire syndical FO à l’hôpital François Quesnay, Bernard Landais, en précisant néanmoins que « l’administration [hospitalière], en tant que responsable de la santé des salariés est en devoir de mettre en place les mesures de prévention [telle que la vaccination pour les volontaires du personnel ­hospitalier] ».