À bord d’un bus, médecins, psychologues et avocats vont à la rencontre des femmes vulnérables

Dispositif départemental, le « Bus santé femmes », sillonne le territoire depuis 2019 pour aller au devant des femmes isolées. Le mardi 8 juin, il faisait étape sur la place de la mairie.

Depuis 2019, le Bus santé femmes parcourt les départements des Hauts-de-Seine et des Yvelines pour simplifier la prise en charge des femmes isolées. Constatant que ces dernières peinent pour accéder à certaines structures d’accueil, ou franchissent la porte à reculons, ce centre de soins itinérant transporte, des villages ruraux aux quartiers défavorisés, une équipe pluridisciplinaire comprenant travailleurs sociaux, professionnels de santé, psychologue et avocat.

« De nombreuses femmes ne savent pas comment faire ou n’osent pas pousser la porte des structures d’accueil existantes », souligne l’institut des Hauts-de-Seine à l’origine du dispositif financé par les deux départements sur lesquels il intervient. Un aspect que l’on souligne également au Département des Yvelines : « On a trouvé que cette initiative de l’itinérance intéressante […] parce que c’est vrai que les femmes en difficulté sont souvent des invisibles, la dimension santé, y compris la santé mentale, est souvent masquée. »

Le mardi 8 juin, le « Bus santé femmes » faisait ainsi une halte devant la mairie mantevilloise. Habillé en rose et blanc, l’ancien véhicule de la RATP, autre partenaire du projet, a été réaménagé et découpé en plusieurs espaces. Dans l’entrée centrale, une salle d’attente fait la séparation entre les différents boxes de consultation.

Les patientes peuvent ainsi bénéficier gratuitement de soins, mais aussi de dépistages visuel, auditif, du cholestérol et du diabète. « Là c’est juste à côté, c’est plus simple que d’aller dans un laboratoire parce que c’est compliqué d’avoir un rendez-vous », note une Mantevilloise de 35 ans à sa sortie du bus.

La préservation de l’anonymat est également une composante essentielle de ce service. « On a souvent des femmes qui ont une vie parfois oppressée par un mari ou une famille et le fait que le bus s’installe à côté du marché, près de l’école, elles peuvent venir librement sans avoir besoin d’autorisation », note l’institut des Hauts-de-Seine.

Dans le pôle santé, situé dans le ventre du bus, deux maigres cabines fermées accueillent un médecin, ainsi qu’un psychologue volontaires. Pour autant, cette disposition plutôt atypique et moins intimiste qu’un cabinet traditionnel, ne semble pas refroidir les femmes présentes ce jour-là. Devant le bus une dizaine d’entre elles patientent justement pour échanger avec Nadine Dalman, la psychologue et art-thérapeute du jour.

Pour ce qui est de l’avenir du dispositif, le Département yvelinois espère améliorer son champ d’action, en mettant deux bus en circulation.

« Ça se passe comme dans tout endroit où je reçois des personnes, on ne voit pas une grande différence », assure la psychologue basée en Normandie. Si la plupart des femmes qu’elle a rencontrées dans la matinée n’avaient jamais consulté de psychologue, Nadine Dalman se dit « étonnée qu’elles se livrent assez facilement.Il y a souvent des questionnements sur leur santé, des soucis familiaux, ce que j’ai vu c’est beaucoup de soucis avec les enfants ».

Installé à l’avant du bus, près de la place du chauffeur, un autre cabinet enchaîne les entrevues : celui du point d’information juridique, tenu par l’un des quinze avocats volontaires du barreau de Versailles. Ce mardi-là, maître David Auerbach y délivre des conseils juridiques et d’accès aux droits. « Le but, c’est de contribuer à régler certains problèmes juridiques qu’elles peuvent avoir surtout au niveau du droit familial, de droit de succession ou d’hommes qui sont partis en les laissant parfois dans les difficultés », détaille l’avocat.

Pour sa première journée au sein du bus, ce dernier relève d’ailleurs une certaine récurrence dans les situations des femmes qu’il reçoit : « On a encore malheureusement trop souvent des femmes qui sont isolées, qui sont venues ici avec hommes qui parfois ont été violents ou parfois ils les ont laissées avec des dettes et elles n’osent pas trop entamer des procédures notamment pour avoir l’argent auquel elle pourrait avoir droit parce que ça aurait des incidences au pays entre les deux familles. »

De même, ce point d’information semblerait plus accessible et moins effrayant. « Je n’aurais pas appelé un avocat sinon, je n’ai pas les moyens et on ne sait pas où ça nous mène après », confirme, poussette en main, une mère de famille. Pour ce qui est de l’avenir du dispositif, le Département yvelinois espère améliorer son champ d’action, en mettant deux bus en circulation. « Un pour le 92 et un pour le 78, dans la mesure où un seul ne permet pas de courir ce vaste territoire aussi bien qu’on le souhaiterait », confie-t-on à ce propos au Département.