Les réfugiés ukrainiens sur le chemin de l’emploi

Deux mois après l’arrivée en vallée de Seine des premiers exilés ukrainiens, certains sont parvenus à trouver un travail, bien aidés par les associations et collectivités locales.

Après les bombes et la terreur, le défi de l’emploi et de l’intégration. Depuis le mois de mars, des centaines de réfugiés ukrainiens ont afflué aux quatre coins des Yvelines. Accueillis au pied levé dans les structures publiques et dans les familles volontaires de vallée de Seine, pour ces exilés, le temps de l’urgence et de la solidarité a vite été rattrapé par les réalités du quotidien : confrontation à l’administration, apprentissage de la langue et recherche d’emploi. Soutenus par les associations et collectivités locales, certains parviennent aujourd’hui à s’engager sur le chemin de la vie active.

À Vaux-sur-Seine, alors que les premières chaleurs estivales embrassent la commune en ce début de mois de mai, les services techniques de la commune sont à pied d’œuvre pour garnir de fleurs les bas-côtés de la route départementale qui la traverse. Pour mener à bien ce travail, l’équipe des espaces verts peut compter sur l’arrivée d’une nouvelle recrue : Oleh Chernyshov qui a quitté la région de Donetsk deux semaines après les premières percées russes. Le père de famille de 50 ans a rejoint sa belle-sœur, qui habite la commune, avec deux de ses fils et huit autres ­personnes.

Soucieux d’aider ses nouveaux habitants, le maire, Jean-Claude Bréard (SE), lui propose un poste d’agent. « L’idée, c’était de pouvoir l’aider pour qu’il puisse subvenir aux besoins de sa famille, mais aussi qu’il puisse avoir une activité et peut-être penser à autre chose », indique l’édile. Le 25 avril, grâce à l’obtention de la protection temporaire de séjour, Oleh signe un contrat de trois mois renouvelables. Le père de famille est rémunéré au SMIC horaire à raison de 35 heures hebdomadaire.

« C’est très important pour moi de pouvoir travailler et puis ce que je fais me plaît bien, sourit Oleh qui travaillait autrefois dans l’assemblage automobile. C’est très dur de ne rien faire, mes enfants aussi veulent travailler, ils cherchent, si c’est possible dans les fermes, mais ils n’ont que 17 ans donc c’est compliqué. » S’il avoue que cette activité lui permet de s’occuper un peu l’esprit, le père de famille reste très stressé par la situation en Ukraine. L’un de ses fils âgé de 18 ans, qui étudie à l’institut militaire, n’a pas pu quitter le pays. « Je sais que tout va bien pour lui, mais je suis énervé par cette situation », s’inquiète Oleh avec la voix serrée.

Si la communication reste encore compliquée pour Roman Yalovenko (à droite) avec ses nouveaux coéquipiers, ces derniers l’ont visiblement bien intégré au groupe et font le maximum pour le mettre à l’aise.

Sur la pelouse du centre d’entraînement de l’AS Poissy, Roman Yalovenko, l’un des cinq joueurs professionnels ukrainiens recueillis par le club pisciacais, lui aussi prend ses marques. Il est le seul joueur du club de l’Alians Lypova Dolyna à avoir pu obtenir un contrat fédéral et intégrer officiellement les bleus et jaunes. Un combat administratif avec les instances du football mené par le président du club pisciacais, Olivier Szewezuk. « Je me suis vraiment fâché avec la fédération […] parce qu’au début on m’a dit [que leur intégration] pouvait déséquilibrer le championnat mais […] il faut être sérieux, c’est pour leur sauver la vie », déplore ce dernier.

Jeudi 28 avril, à deux jours d’une rencontre cruciale face à un adversaire direct pour le maintien, l’attaquant ukrainien est en jambes et dévoile un peu plus le tranchant qui lui avait permis, deux semaines plus tôt, de marquer son premier but en championnat. De quoi empocher, en plus des « 1 200 euros bruts » garantis par son nouveau contrat à temps partiel, une prime de victoire de 175 euros.

« J’ai eu une grosse pensée pour ma famille restée en Ukraine, raconte Roman qui s’adapte petit à petit à son nouvel environnement. J’aime bien vivre en France surtout depuis que ma situation est plus stable. » Si la communication reste encore compliquée avec ses nouveaux coéquipiers, le joueur ne parlant que quelques mots d’anglais, ces derniers l’ont visiblement bien intégré au groupe et font le maximum pour le mettre à l’aise comme en témoignent les blagues échangées à l’échauffement. « Effectivement, ce n’est pas simple, mais après il comprend rapidement : il regarde la gestuelle, il comprend bien ce qu’on souhaite et ce qu’on demande », note Walid Achour, l’entraîneur pisciacais.

Mais contrairement à Oleh ou Roman, encore beaucoup d’exilés accueillis dans les Yvelines demeurent dans des situations de grande dépendance voire de précarité. C’est pourquoi, un point d’information et d’accompagnement a été ouvert par la préfecture et l’association Aurore à Versailles. Situé au 82 bis rue de Paris, le Pôle emploi y tient ponctuellement des permanences dédiées à l’insertion des réfugiés.