Trains normands : bras-de-fer autour des dessertes après Eole

La Région Normandie maintient sa volonté de ne plus desservir les gares franciliennes à l’horizon 2025. Une réunion est prévue le 28 juin avec des élus de vallée de Seine.

Les liaisons entre la Normandie et Paris-Saint-Lazare traversant la vallée de Seine restent sources de tension. Après la suppression de deux arrêts mantais au printemps dernier suite à l’adoption d’un nouveau plan de transport par la Région Normandie, les déclarations fracassantes du vice-président normand chargé des transports, Jean-Baptiste Gastinne, concernant la suppression des dessertes franciliennes à la mise en place du RER E, c’est cette fois un amendement déposé lors du conseil d’administration d’Île-de-France mobilités (IDFM, autorité dépendant de la Région Île-de-France en charge des transports, Ndlr), le 25 mai dernier, qui a fait réagir.

Une manifestation a également été organisée par le Comité des usagers de l’Ouest francilien en gare de Bonnières-sur-Seine ce mercredi 8 juin. Car l’avenir des dessertes par les trains normands des gares franciliennes après la mise en place d’Eole, à l’horizon 2025, inquiète usagers et élus.

Déposé par le conseiller départemental du canton de Bonnières-sur-Seine et administrateur d’IDFM Patrick Stefanini (LR), cet amendement concerne la cession d’une rame à la Région Normandie : « Considérant l’annonce par la Région Normandie de la suppression, dès la rentrée de septembre 2022, la desserte de Rosny et Bonnières par le TER de 16 h 50 de Saint-Lazare à destination de Rouen (Seine-Maritime) […] ; le conseil administration propose de […] signer la convention relative au transfert […] sous réserve que la région Normandie maintienne l’ensemble des arrêts dans les gares franciliennes des TER circulant entre Paris et la Normandie. »

« Pour négocier avec la Région Normandie, on a fait valoir le manque de concertation, qu’on ne pouvait pas prendre une décision unilatérale, mais il faut aussi qu’on ait des instruments de pression entre guillemets », assume sans ambages Patrick Stefanini, cet amendement concernant également la suppression des deux arrêts mantais. Une réunion est prévue le 28 juin prochain à Rouen, avec Jean-Baptiste Gastinne, et les différents maires franciliens concernés.

La suppression des trains normands impacterait près de 20 000 voyageurs par jour, en rallongeant les temps de trajets. Pour les Mantais il passerait de 40 minutes à plus d’une heure.

« D’ores et déjà nous avons obtenu le fait que la suppression qui était annoncée pour le mois de septembre des arrêts en gare de Rosny et Bonnières est suspendue et j’espère que le rendez-vous avec le président Jean-Baptiste Gastinne permettra de transformer cette suspension en un retrait de cette décision », poursuit-il, lui souhaitant se placer dans « une démarche constructive ».

La teneur de l’amendement a toutefois surpris la Fédération nationale des usagers des transports normands, à qui la Normandie a assuré le maintien de l’arrêt de 16 h 50. « C’est du chantage », tranche son président Daniel Grébouval. Concernant les arrêts du 16 h 50, il s’agit d’un train dont le terminus a été prolongé d’Oissel à Rouen en 2020 et qui n’avait donc plus vocation à les desservir. « La volonté de la Région ça avait été de dire on supprime les arrêts Rosny-Bonnières, mais face au remontées et au mécontentement de l’Île-de-France, on maintient les arrêts pendant un an », rappelle-t-il, en insistant sur le caractère provisoire de ces deux arrêts, Ile-de-France mobilités devant pouvoir faire s’arrêter les Transiliens allant jusqu’à Vernon (et dont elle a la charge, Ndlr), dans les deux gares à la fin de la période, qui va désormais « jusqu’à la mise en place d’Eole », assure Daniel Grebouval.

La réunion du 28 juin s’annonce déjà compliquée et les futures négociations s’annoncent aprêment discutées. Dans un article du Parisien, Jean-Baptiste Gastinne a en effet réaffirmé sa position de ne plus voir s’arrêter les trains normands en Île-de-France : « Nos trains n’ont plus vocation à servir l’Île-de-France. Quand le prolongement d’Eole sera mis en service, plus aucun train normand ne s’arrêtera dans les Yvelines. Nous ne voulons pas porter un mauvais coup aux Franciliens mais, dans la pratique, ces arrêts retardent les déplacements des Normands. Il est souhaitable de séparer les dessertes entre l’Île-de-France et la Normandie. »

Pour le maire de Rosny-sur-Seine, Pierre-Yves Dumoulin (LR), c’est aussi la frustration qui domine : « On a mis plus de trois millions d’euros d’argent public dans la réfection de la gare, l’État m’oblige à construire pour répondre aux obligations de construction en grande couronne et en Île-de-France, qu’est-ce que je raconte à mes habitants qui viennent habiter là ? »

Une position qui impacterait près de 20 000 voyageurs par jour, en rallongeant les temps de trajets. Pour les Mantais il passerait de 40 minutes à plus d’une heure. Et cela fait bondir Louis Gomez, président du Comité des usagers de l’Ouest francilien, lors de la manifestation du 8 juin. « Il y a bien une intention de la Région Normandie de ne plus desservir la Région à l’arrivée d’Eole, s’indigne-t-il. Cela est totalement contraire aux besoins de nos concitoyens et aux engagements pris et confirmés à plusieurs reprises tant par la SNCF que par Île-de-France mobilités. » Comme Daniel Grebouval, il évoque lui aussi un « chantage » mais du côté normand cette fois-ci. Même si les deux présidents d’associations reconnaissent que les Régions choisissent leurs communications respectives auprès d’eux.

« Nous n’accepterons pas une seule suppression de train. Pourquoi ? Parce qu’il y a déjà eu des trains supprimés, exprime-t-il de sa position. Nous voulons le maintien de tous les trains mais ce n’est pas suffisant. Nous voulons davantage de trains, depuis trois ans il y a une forte dégradation des conditions de transport, les retards et suppressions de trains sont courants. » Et de plaider une nouvelle fois pour la création d’un comité de ligne.

Pour le maire de Rosny-sur-Seine, Pierre-Yves Dumoulin (LR), c’est aussi la frustration qui domine : « On a mis plus de trois millions d’euros d’argent public dans la réfection de la gare, l’État m’oblige à construire pour répondre aux obligations de construction en grande couronne et en Île-de-France, qu’est-ce que je raconte à mes habitants qui viennent habiter là ? Qu’ils n’ont plus de transports ? Le RER E, il n’a jamais été question qu’il se substitue aux trains normands directs. Ce n’est pas la même offre, c’est une offre complémentaire. »

Côté normand, les attentes des usagers seront aussi fortes après la mise en service d’Eole. « On demande que les sillons soient sanctuarisés dans le cadre de la mise en place d’Eole, voire qu’on puisse obtenir quelques sillons supplémentaires, je ne sais pas si ce sera possible, détaille Daniel Grebouval. […] Actuellement on a six sillons par heure entre Paris et la Normandie pas plus. […] Les aménagements du RER E n’apportent pas de réponses au besoin de la Normandie. »