Crédits photo : Medef 78
Tout d’abord, quel a été votre parcours avant d’arriver à la tête du MEDEF des Yvelines ?
J’ai commencé dans le domaine de l’innovation et de la recherche et développement à l’ONERA afin de développer la famille AIRBUS sur tout ce qui était aérodynamique. Après 8 ans, j’ai rejoint le groupe autrichien AVL, dans l’automobile, en 1994, dont je suis maintenant le directeur général de la filiale française. Là encore sur cette thématique de la R&D puisque nous travaillons sur les technologies pour toutes les mobilités actuelles et futures. Par exemple, nous avons des projets sur les chaînes de traction hybride, électrique, hydrogène pour tous types d’industries, aussi bien aéronautique, automobile et ferroviaire. Nous réfléchissons également à la transformation du véhicule pour qu’il devienne autonome avec toutes les aides à la conduite qui en découlent.
Comment êtes-vous arrivé à la tête de cette branche locale de l’organisation patronale ?
En vérité, cela n’a jamais été un objectif d’arriver à la tête du MEDEF 78. Dès que j’ai été nommé directeur général de la filiale France d’AVL en 2013, je voulais comprendre ce que faisaient mes collègues chefs d’entreprises et c’est comme cela que j’y ai adhéré. Ainsi je pouvais connaître leur vision collective de développement sur le territoire des Yvelines. Après j’ai évolué dans cette structure, j’ai été administrateur pendant 3-4 ans puis vice-président en décembre dernier et quand Zacharie Hardy est devenu directeur général d’Ostra (une association de santé au travail, ndlr), il m’a demandé de présenter ma candidature.
Quel est le poids de cette branche dans l’institution globale ?
Nous avons 6 votes pour les prochaines élections nationales. Après elles sont calculées suivant le nombre d’adhérents, donc plus nous avons des adhérents plus nous gagnons en représentativité. Ce sera un axe sur lequel j’aimerais travailler.
Quels sont les premiers constats sur l’industrie yvelinoise ?
Mon sentiment est qu’il y a deux parties distinctes : le Nord où se concentrent les industries et le Sud plus rural. Mais il y a un équilibre et ces deux mondes m’intéressent tout autant. J’ai aussi noté qu’il y a du foncier qui pourrait intéresser les entreprises de demain.
Quels projets vous sont chers et comment allez-vous les porter ?
Je vais prendre contact avec toutes les collectivités territoriales pour voir s’il y a une vraie volonté de travailler de concert et si nous tendons vers le même but. Les Yvelines sont déjà attractives et nous devons mieux communiquer afin de promouvoir notre territoire par rapport à d’autres départements. Je me répète mais le foncier actuel reste un atout pour repenser la vie en entreprise au sein d’un urbanisme global, notamment sur la question du temps subi dans les transports en commun.
La Chambre de Commerce et d’Industrie Versailles-Yvelines par l’intermédiaire de Guillaume Cairou souhaite réindustrialiser le territoire, c’est un constat que vous partagez ?
Évidemment ! La réindustrialisation n’est pas qu’une problématique au niveau départemental mais national. Nous sommes dans une transformation profonde avec la volonté de relocaliser les industries et les Yvelines n’y échappent pas. Toutefois, cela ne se fera pas en claquant des doigts. Il faut un lien très fort entre les collectivités locales, les académies ainsi que les entreprises. Et une continuité doit être assurée dans la politique de réindustrialisation. Par exemple, nous pourrions nous inspirer des Hauts-de-France avec leur gigafactory (trois usines françaises de fabrication de batteries et de leurs composants – ACC à Douvrin en 2023, AESC Envision à Douai en 2024 et Verkor à Dunkerque en 2025 – vont s’installer dans le Nord de l’Hexagone afin d’accompagner la mutation électrique de l’industrie automobile ce qui devrait créer au total près de 7 500 emplois directs et 15 000 emplois indirects, ndlr). Il y a des écosystèmes globaux à créer, je suis sûr que si Porsche a choisi de venir à Poissy, c’est parce que le nouveau centre du PSG ne sera pas loin dans quelques temps. Cependant il faut également réfléchir aux entreprises qui viennent s’implanter. C’est bien d’avoir Amazon sur le territoire mais il y a beaucoup de logistique robotisée donc il n’y a pas tant de création d’emplois que cela.
La relocalisation est un sujet, la sauvegarde des entreprises actuelles également. En ces temps de crise, comment le MEDEF accompagnera les sociétés ?
Même si nous parlons de temps de crise, un sondage du MEDEF a démontré que les portefeuilles de début d’année étaient plutôt bons. Je ne dis pas que cela va durer tout l’année 2023 avec la guerre en Ukraine ou l’augmentation du prix de l’énergie. Pour le moment, les défaillances d’entreprises sont moindres par rapport à ce que nous présagions à la sortie du COVID, notamment avec le remboursement des PGE. Dans tous les cas, nous mettons à disposition de nos adhérents des services dans les domaines juridique, social ou des ressources humaines. Nous essayons de les accompagner et nous avons également un suivi des entreprises en difficulté. Par ailleurs, nous décryptons les dispositifs mis en place par le ministère de l’Économie et des Finances afin de faire le trait d’union entre la sphère publique et privée.
Autre sujet d’actualité révélé par le COVID-19, la crise des passions chez les salariés. Quelles solutions voulez-vous apporter ?
Dans notre vie, il y a ce qu’on appelle le temps subi et le temps plaisir. Il faut développer ce temps plaisir même à l’intérieur de l’entreprise afin d’équilibrer la vie professionnelle et la vie personnelle. Une entreprise c’est un comité d’hommes et de femmes qui travaillent ensemble pour donner du succès à cette entreprise et tout le monde doit se sentir bien pour assurer son succès. Nous voyons également que c’est important pour les jeunes générations de donner du sens à leur travail. Ce qui me préoccupe aussi actuellement, c’est l’abandon des sciences au lycée. Elles sont souvent liées à l’innovation et c’est le véritable moteur d’un pays. Par ailleurs, ce milieu doit se féminiser.
De nombreuses revendications salariales existent aussi.
Le salaire est un point important pour nos collaborateurs mais nous sentons que ce n’est plus vraiment la priorité chez les plus jeunes. Comme précédemment dit, ils donnent une énorme place au sens et aux valeurs de l’entreprise dans laquelle ils travaillent. Même si le salaire ne doit pas être en décalage par rapport à la mission donnée. Par exemple, j’ai vu un de mes fils refuser un stage car ce n’était pas en lien avec cela et je le remarque aussi lors de mes recrutements chez AVL. Le salaire avec l’inflation devient un véritable sujet mais les perspectives de développement et de carrière restent importantes.
Enfin dernier point, votre avis sur la réforme des retraites ?
Au titre du MEDEF, nous n’avons pas demandé cette réforme. Nous ce que nous voulons, c’est que le déficit quel qu’il soit ne se creuse pas. Car qui dit déficit, dit impôt, et ce sera les salariés ou les entreprises qui paieront l’addition. Je ne suis pas le mieux placé pour parler de l’allongement de la durée de cotisation, nous, nous préfèrerions obtenir plus de flexibilité pour le recrutement.