« Je me porte bien », le 6ème art au service de la prévention des violences faites aux femmes

Crédits : LMD Production

Le 10 mars était l’occasion de réaliser d’une pierre, deux coups sur le thème des violences intrafamiliales. Tout d’abord en lançant officiellement le réseau CAPVIF – acronyme de Coordination Action Prévention Violences Intra-Familiales – un dispositif composé des CCAS de quatre villes (Issou, Porcheville, Gargenville et Juziers), du Département des Yvelines, de la CAF, de la Police, de l’Éducation Nationale, de bailleurs sociaux, ainsi que d’associations d’aide aux victimes de ce type de violence. Ensuite, en jouant la pièce de théâtre « Je me porte bien » dans la commune issoussoise.

Sa metteuse en scène, Sonia Aya, l’a imaginée il y a de cela 20 ans, lors de sa première affectation au commissariat du XIXème arrondissement de Paris. Elle doit intervenir sur une scène de violence conjugale où une femme a été poignardée à plusieurs reprises par son mari. « Je me rappelle de son regard soutenu alors que nous attendions le SAMU. Cela m’a chamboulée, je me sentais tellement impuissante… », se remémore-t-elle avec émotion. Alors elle se forme comme référente intrafamiliale puis décide de passer de l’autre côté de la barrière en écrivant cet outil pédagogique à l’attention de ses collègues des forces de l’Ordre. Le but : disséquer ce fléau et comprendre par exemple pourquoi les femmes restent malgré les coups ou pourquoi il leur faut entre 6 et 7 tentatives pour enfin porter plainte. Grâce à une mise en scène minimaliste – seulement une chaise et un câble USB pour brancher un smartphone – Je me porte bien peut se produire partout. Ainsi, 6 500 policiers ont assisté à au moins une représentation et une tournée auprès de 18 lycées franciliens est prévue dans les prochains mois.

Une descente aux Enfers progressive

Si le message passe si bien, c’est grâce à Caroline Misbach, l’interprète géniale de Rose. Seule sur la scène, elle use de toute sa palette d’émotions pour transporter le public. S’il rit en entendant ses premiers mots, « J’attends l’appel de ma vie », il comprend rapidement que la jeune femme de 22 ans va déchanter, avec en signes annonciateurs la sonnerie du téléphone, la Groupie du pianiste, ou le slow dansé sous l’air de Requiem pour un fou. Sous nos yeux, nous voyons l’âme de Caroline/Rose quitter son corps, un aspect d’autant plus renforcé par les danses robotiques effectuée par l’héroïne de la pièce durant les interludes. Au revoir la féminité et la personnalité sémillante, bonjour les anti-dépresseurs et les crises de colère. Chaque coup qu’elle reçoit – qu’il soit physique ou moral – est un uppercut pour les spectateurs qui ne peuvent que rester impuissants, devenant presque de la non-assistance à ­personne en danger.

Alors, comment l’actrice trouve-t-elle la force pour revivre régulièrement cette descente aux enfers ? D’une part, car elle désirait interpréter ce personnage plus que tout. « Malgré la difficulté du rôle, je vois cela comme un cadeau car j’exploite toutes mes facettes. Puis j’arrivais aussi à un moment de ma carrière où je voulais que ma parole d’artiste devienne citoyenne », explique Caroline. D’autre part en puisant dans son histoire personnelle : « Une des mes amies subit le même sort de Rose depuis ses 14 ans et une autre a fini par se suicider à cause de l’emprise psychologique de son ex-compagnon ».

À la fin de ce huis-clos dont personne ne sort indemne, une table ronde est organisée avec des spécialistes – policiers, assistantes sociales, délégués aux droits des femmes – afin de connaître les différents dispositifs mis en place sur le territoire national – comme le 39 19 ou le site arretonslesviolences.gouv.fr – ou local – avec la maison Calypso – pour la prise en charge des victimes de violences conjugales. Par ailleurs, « Je me porte bien » aura une suite dans quelques mois dont le sujet sera l’impact de ces violences sur les enfants.