Quelle a été votre première réaction lorsque l’APIJ a confirmé son souhait d’implantation de la maison d’arrêt à Magnanville ?
J’ai l’impression que nous n’avons pas la même lecture du cahier des charges de l’État. Par exemple, dans celui-ci, il y a écrit noir sur blanc qu’il faut éviter la construction de prison proche des centres-villes alors que le site de Magnanville, nous y sommes complètement. À 50m il y a des habitations et deux lycées.
Pourtant vous aviez proposé des solutions alternatives.
Lors du dernier comité de pilotage fin 2022, le préfet nous a dit qu’il était prêt à regarder d’autres sites si les dossiers étaient sérieux. Donc nous nous sommes réunis avec d’autres élus – ainsi que des professionnels – alors que ce n’est pas notre job. Nous avions jusqu’à la fin de l’année pour rendre notre copie. Quatre sites ont été étudiés – deux à Guerville, un au niveau de l’ancienne usine d’EDF à Porcheville et un à Flins puisque Renault cherche à vendre 200 Ha – ainsi que les deux propositions de Magnanville pour éviter que certains m’accusent d’avoir une approche partisane.
Qui, selon vous, répondent mieux au cahier des charges de l’État ?
Ce sont toutes des friches industrielles. Après certaines ont leurs défauts comme à Porcheville où il n’y a pas d’échangeur autoroutier et il faut traverser la Seine. Mais à Flins, il y a bien un échangeur, pas d’habitation et nous sommes plus proches de Versailles. À l’heure où nous parlons de « zéro carbone », l’APIJ choisit un site à 50km du chef-lieu du 78 (lieu du tribunal, ndlr). Et il y a aussi les questions d’assainissement puisque la station d’assainissement de Rosny ne suffirait plus et il faudrait en construire une nouvelle qui coûterait environ 8 millions d’euros. Les professionnels qui ont étudié la question nous ont dit que Magnanville est vraiment tout en bas de la pile, encore plus avec le problème des sols argileux. Ce choix, c’est tout simplement la contradiction des positions de l’État.
Toutefois vous restez pour la construction de maison d’arrêt ou de centre pénitentiaire ?
Oui. Prenons le cas de la prison de Bois d’Arcy qui souffre d’une surpopulation de 150 %. Il faut réinstaurer un climat de dignité humaine dans ces établissements. J’ai même discuté avec Karl Olive, qui lui a le problème de la Maison Centrale de Poissy, et qui était prêt à envisager la construction sur son, territoire d’une maison d’arrêt et d’un centre pénitentiaire réunis.
Nous vous sentons remonté contre l’État.
Ce que je ne comprends pas, c’est que les politiciens se targuent à dire qu’il faut travailler avec les élus de proximité mais finalement ils s’en fichent. Tous les élus qui étaient présents lors du comité de pilotage sont contre, même Bruno Millienne a changé sa position. Même le président du Sénat Gérard Larcher a déclaré dernièrement qu’il fallait arrêter ce projet. Finalement, c’est comme pour la réforme des retraites, c’est un pouvoir centralisé qui décide de tout et les dés sont pipés d’avance.
Votre population est farouchement opposée aussi.
Oui et même si je n’osais pas trop le dire avant, nous portons encore les stigmates de l’attentat de 2016 donc nous ne sommes pas prêts à voir une prison débarquer avec les problématiques que cela engendre.
Quelles sont donc les prochaines étapes ?
J’ai prévu d’écrire un courrier au préfet des Yvelines pour rappeler ma position qui sera signé par les autres élus m’épaulant dans cette lutte. Je pense même l’envoyer à Monsieur Dupond-Moretti, à Elisabeth Borne et au président de la République. Puis nous allons préparer une grande réunion publique car j’aimerais bien que cela mobilise l’intégralité du Mantois. Une manifestation à la sous-préfecture de Mantes-la-Jolie est également prévue.
Vous croyez toujours que le projet peut être abandonné ?
Jean-Jacques Brot, le préfet, doit rédiger le compte-rendu du comité de pilotage. Une fois fait, celui-ci se retrouvera entre les mains du Ministre de la Justice et comme l’a dit Monsieur Brot, « ce sera lui et lui seul qui prendra cette décision ou non ». Ce n’est que le début d’une grande lutte à moins qu’Eric Dupond-Moretti dise stop.