En 10 ans, les Yvelines ont vu leur nombre de médecins diminuer de 21 %, et, conséquence directe de cette chute vertigineuse, 15 % des habitants de ce territoire n’a pas de médecin traitant. Il fallait bien que Pierre Bédier, le président du Département, utilise des mots forts pour justifier l’investissement de 10 millions d’euros pour 50 cabines destinées à la télémédecine. « De base, ce n’est pas une compétence que la loi nous impose mais comme nous faisions déjà de la santé avec la PMI, la situation alarmante nous a poussé à prendre ce genre de décision » explique l’ancien maire mantais.
Durant cette soirée de lancement, tout le monde applaudissait des deux mains le déploiement de ce dispositif, pourtant, Frédéric Prudhomme, le président du Conseil de l’Ordre des Médecins des Yvelines, rappelait que lui et ses confrères ne voyaient pas forcément cela d’un bon œil au départ. « Je ne peux pas vous cacher que lorsqu’on nous a présenté le projet il y a eu un petit mouvement de recul » raconte-t-il « car nous défendons en priorité la consultation en présentiel car c’est la base de la relation médecin patient. » Mais à l’instar de Pierre Bédier, le praticien constate que ses confrères n’accueillent plus de nouveaux et sombrent parfois en burn-out à cause du surmenage lié à cette trop grande gestion. Dorénavant il tresse même des lauriers à un dispositif permettant « d’avoir une réponse adaptée à chaque situation médicale comme le renouvellement d’ordonnance et être un service de proximité pour les personnes en mobilité réduite. » Pierre Bédier ajoute alors : « C’est pour cela qu’elles seront situées au niveau des mairies ou dans d’autres lieux importants comme les universités ».
Une solution momentanée
Mais si le Dr Prudhomme s’est finalement laissé convaincre, c’est sûrement grâce au discours d’H4D, le fabricant du dispositif. « Notre fondateur est un médecin » rappelle Valérie Cossutta-Trubert, la PDG de l’entreprise parisienne, « les cabines ont été construites avec des professionnels de santé et des experts en télésémiologie (champs d’expertise et d’investigation adaptés à la pratique clinique à distance, ndlr). » D’ailleurs, sa société et le Département ont annoncé une « surprise » avec le déploiement d’un bus santé. « Un service allant directement à la rencontre des patients via un parcours itinérant tous les mois dans plus de 5 communes yvelinoises » explique Valérie Cossutta-Trubert. Avec 150 villes en dessous de 2 000 habitants – sur 259 au total – les Yvelines voit cela d’un bon œil.
Toutefois, Pierre Bédier tempère : « Ce n’est pas une solution de remplacement. » Le Département s’active à mettre en place d’autres moyens pour ramener des professionnels de santé sur le territoire, comme la construction de 22 maisons médicales dont 13 sont déjà sorties de terre. « Ce que nous aimerions faire, en lien avec l’Université Versailles-Saint-Quentin-en-Yvelines, c’est amener des étudiants directement dans nos communes en souffrance et les convaincre de s’installer. Ainsi, cela devrait nous permettre de retrouver une bonne démographie médicale » théorise l’ancien secrétaire d’État. La fin du numerus clausus devrait participer à cela mais les premiers résultats n’interviendront pas avant une dizaine d’années.
Pour le moment, huit communes yvelinoises peuvent se targuer d’avoir leurs propres dispositifs de téléconsultation : Chanteloup-les-Vignes, Conflans-Sainte-Honorine, Les Mureaux, Mantes-la-Jolie, Mantes-la-Ville, Meulan-en-Yvelines, Saint-Germain-en-Laye et Rambouillet. Pour celles et ceux qui doivent les utiliser, il vous faudra vous inscrire sur jetrouveunmedecin.fr. Après avoir choisi votre horaire et obtenu un code d’accès, munissez-vous également de votre carte vitale pour être télé-consulté. Et en cas d’illettrisme numérique, le Département assure que des employés seront formés pour vous accompagner tout au long de votre rendez-vous.