Edito. 8 mai 1945 : entre devoir de mémoire et compréhension du passé

Armistice : convention par laquelle les belligérants suspendent les hostilités. Cette définition issue du Larousse prend tout son sens cette année. Les actualités sont émaillées de sujets de frictions entre la population française et ses représentants politiques. Entre la réforme des retraites, le revenu de solidarité active soumis à condition et une loi immigration renvoyée à l’automne 2023, la commémoration du 8 mai 1945 permet à chacun de déposer les armes l’espace de 24 heures et de respecter un cessez-le-feu.

« Il y a 78 ans, l’Allemagne nazie capitulait. Les Alliés triomphaient face à une idéologie mortifère et le voile entre les collaborateurs et les résistants était enfin levé » rappelle Françoise Gonichon, 1ère adjointe à la mairie de Magnanville, dédiée à la politique financière et citoyenneté. Les enfants du conseil municipal des jeunes lancent alors « un appel à la solidarité et à la paix afin de lutter contre tous les fanatismes » tandis que Michel Lebouc conclut : « Une génération qui ignore l’Histoire n’a ni passé ni de futur. »

À l’abris de rien

Presque huit décennies plus tard, les événements actuels nous obligent à regarder l’Histoire droit dans les yeux. Les similitudes entre notre époque et celle des années 30 commencent à être légion. Tout d’abord l’inflation. L’invasion de l’Ukraine par la Russie a fait exploser le cours de plusieurs denrées et sans quelques coups de pouce étatiques, la situation serait bien pire. Toutefois, la précarité s’est bien installée, elle qui avait commencé à tisser son nid maléfique durant les années COVID. Ensuite, l’extrême-droite est à nos portes.

Pour la deuxième fois en 5 ans, l’Italie a placé un gouvernement composé de nostalgiques de Benito Mussolini. Alors que Giorgia Meloni – fan du Duce jusqu’au bout des ongles – s’était appuyée sur les classes sociales les plus basses pour se faire élire, elle vient de démontrer qu’elle ne s’en souciait guère. Le 1er mai, en pleine fête des droits des travailleurs et travailleuses, la présidente du Conseil des ministres a supprimé le « revenu de citoyenneté » institué en 2019 et qui avait sorti de la pauvreté un million de ses compatriotes. De l’autre côté de la Manche, la secrétaire d’Etat à l’intérieur Suella Braverman est une « obsédée des migrants » et adepte de propos que ne renierait pas un de nos ministres natif du Nord. D’ailleurs, lui-même avait qualifié la descendante d’un tortionnaire de la guerre d’Algérie trop molle sur les questions ayant trait à l’islam radical. Il serait donc risqué de croire que la France serait à l’abri.

Si la misère profite à l’extrême droite, le pouvoir en place aide à rendre un parti fondé par des collaborationnistes – cocasse lorsque l’on commémore le 8 mai 1945 – respectable. Leur silence face aux journées d’action intersyndicale ? Une vertu d’après certains députés, bien loin de la « bordelisation » que causerait la NUPES. Tapi dans l’ombre, le Rassemblement National continue de la jouer profil bas, s’affichant toujours en costume ou en tailleur, comme si les vêtements que nous portions était un signe de respectabilité. Une sobriété dont avait usé Hitler après son coup d’État manqué en 1924 pour mieux être propulsé chancelier en 1933 grâce aux « conseils » avisés d’industriels auprès du maréchal Hindenburg. Du reste, dans l’Hexagone, il existe également des puissants hommes d’affaires avec des accointances et une fascination pour l’extrême droite. « Plus Hitler que Front Populaire » reste d’actualité.

À l’heure où les attentats contre les mosquées sont en recrudescence, que la Police déjoue des attentats de milices factieuses et que celles-ci défilent dans Paris sans problème, remettre le nez dans nos fascicules d’histoire permettrait d’analyser correctement notre passé afin d’envisager un futur plus serein.