Erwann Le Page : « Une empreinte rétinienne tenace à effacer »

Crédits : Tier Mobility

Comment s’est déroulée l’inauguration du 2 mai ?
Parfaitement. Il y a une vraie vision portée par Grand Paris Seine et Oise (GPSEO) et son vice-président en charge des mobilités (Eddie Aït, ndlr) qui ont fixé un certain nombre de règles. Dès qu’elles sont clairement établies dès le départ, cela se passe bien comme à Saint-Quentin-en-Yvelines.

C’est ce qui a manqué à Paris ?
Nous avons remporté l’appel d’offres en 2019 et les solutions techniques actuelles soit elles n’existaient pas, soit elles n’étaient pas à maturité. Par ailleurs, nous étions trop nombreux et l’offre de transports en commun était bien développée. Nous leur fournissons toujours les vélos et je pense que Paris avait besoin de taper du poing sur la table. Nous attendons de voir si nous pourrons revenir un jour, nous serons ravis dans tous les cas.

Comment avez-vous fait pour vous adapter à des règles de plus en plus dures ?
Notre R&D se focalise sur la sécurité, l’espace public et l’environnement. Par exemple, pour ce dernier point, les équipements de nos trottinettes sont devenus remplaçables à 95 %. En plus d’avoir ajouté un endroit pour loger un casque, nous avons intégré un test d’adresse le jeudi, le vendredi et le samedi soir pour éviter que certains utilisateurs soient tentés de prendre le dispositif en état d’ébriété. Si vous le ratez, vous êtes directement redirigé vers une application VTC partenaire. Nous nous focalisons beaucoup sur la prévention et la sensibilisation afin que les utilisateurs comprennent que ce n’est pas un jouet.

Ce qui permet d’améliorer l’image des trottinettes électriques.
Deux éléments leur ont porté préjudice et laissent une empreinte rétinienne tenace à effacer : les 15 opérateurs différents sur Paris en 2018 qui provoquaient l’amoncellement des engins et la couverture médiatique du référendum où une frange de la population parisienne en avait ras-le-bol. Que ce soit à Saint-Quentin-en-Yvelines ou à Roubaix, les gens se rendent compte que l’usage est très apaisé et que tout le monde se tolère, aussi bien utilisateurs que non-utilisateurs.

Puisque vous évoquez Saint-Quentin-en-Yvelines, quels sont les retours que vous avez ?
Ce que nous voyons, c’est que sur l’année 2022, il y a eu 48 000 usagers uniques, ce qui correspond peu ou prou à 25 % de la population. En tout, 1,35 million de kilomètres ont été parcourus par nos trottinettes, cela équivaut à environ deux allers-retours vers la lune. Et il y a les mêmes restrictions que sur GPSEO.

Quel profil type se dégage au sein des utilisateurs ?
Ce sont surtout des personnes actives. Les pics d’utilisation à Paris comme en banlieue sont entre 8 h et 10 h et entre 17 h et 19 h. Nous avons également noté que les déplacements se font plus en semaine que le week-end. En moyenne elles sont utilisées pour les 2-3km qui séparent l’utilisateur des 57 gares où nous sommes présents dans toutes l’Île-de-France. Et ensuite ils rallient la Capitale pour aller travailler.

Si vous avez dû quitter Paris à cause d’un vote, vous êtes parti de Châteaufort et à Toussus-le-Noble pour cause de non-rentabilité. Cela pourrait arriver avec le contrat de GPSEO ?
Ces villes étaient plutôt isolées n’appartenaient pas à un hub comme Saint-Quentin-en-Yvelines ou GPSEO, donc l’usage était extrêmement faible, environ dix maximum par semaine. C’était assez difficile de se projeter sur le long terme notamment avec les investissements ­initiaux.

C’est pour cela aussi qu’il y a des clauses de revoyure.
Cela permet de développer des partenariats. Nous essuyons des plâtres sur beaucoup de sujets car nous sommes dans 560 villes, soit l’opérateur le plus déployé dans le monde. Mais cela nous donne assez de retour d’expérience pour améliorer le service car nous avons développé des zones urbaines, péri-urbaines voire quasi rurales. Grâce à ces clauses qui contiennent la révision des taux d’usages, les plaintes… nous améliorerons le dispositif déployé au sein de GPSEO.