Voir le groupe Les Ramoneurs de Menhirs poser ses valises au cœur du festival Contentpourrien prend forcément un sens tout particulier par rapport à l’histoire de Mantes-la-Ville. Celle-ci était en effet la seule commune d’Ile-De-France gérée par le Front National, aujourd’hui Rassemblement National, lors de la dernière mandature. Les Ramoneurs de Menhirs sont eux une émanation celtique du célèbre groupe punk des années 80 les Bérurier Noir, à l’initiative du slogan La jeunesse emmerde le Front National.
40 ans après, le parti de Marine Le Pen est aux portes du pouvoir, les Ramoneurs de Menhirs continuent eux de porter fièrement les valeurs de leur jeunesse. Cela n’explique pourtant pas leur présence annoncée à Mantes-la-Ville le 1er juillet. « Evidemment, nous choisissons là où nous jouons mais en règle générale les gens qui nous branchent adhèrent à l’esprit du groupe. Je pense que l’on régresse. Ce n’est pas normal qu’un morceau comme « Porcherie » soit encore d’actualité car cela parle de l’état du monde. Et le Front National, c’est vraiment une crotte de bique dans l’extrême droite mondiale. Cela veut dire que la jeunesse n’emmerde plus le Front National du tout, cela veut dire que le jeunesse vote Front National. Une grande partie de celle-ci est lobotomisée devant son ordinateur. » Face à ce constat édifiant, Loran revendique l’unité à travers les différences. « C’est la meilleure façon d’emmerder le Front National ! Ce parti n’a rien à proposer d’autre que la consanguinité. La diversité et la différence, c’est la vie. Le fascisme, c’est la pensée unique. »
Fer de lance du mouvement alternatif, les Bérurier Noir ont toujours refusé de signer chez un major, privilégiant l’autogestion face aux systèmes mis en place par l’Etat. Une réalité toujours vraie aujourd’hui. Le groupe réalise une centaine de concerts par an mais refuse de demander le statut d’intermittent. Ce qui lui ferme bien des portes, notamment celles des Scènes de Musiques Actuelles (SMAC). « Nous ne pouvons pas jouer dans les SMAC car nous n’avons jamais été intermittents. C’est un choix politique clair. Les SMAC sont faites pour une culture encadrée : on demande aux artistes de prouver qu’ils sont rentables économiquement. Un intermittent ne peut pas jouer gratuitement car c’est du travail au noir ! C’est quoi le délire ? Nous, nous pouvons jouer gratuitement quand nous le voulons sans nous mettre en danger par rapport à l’URSSAF. C’est inadmissible un statut pareil.
Altermondialiste dans l’âme, le groupe sera comme un poisson dans l’eau au festival mantevillois et devrait rassembler au plus large tant l’esprit du groupe, altermondialiste, écologique, anticolonialiste, colle à l’image d’un festival qui a su faire preuve de résilience durant les années frontistes pour désormais se déployer d’une très belle manière.
Samedi 1er juillet, Les Ramoneurs ne feront pas comme ils en ont l’habitude un concert de plus de 3 heures mais Loran l’assure, les meilleurs morceaux du combo seront joués. Composé depuis 2006 d’un couple de sonneurs, Éric Gorce à la bombarde et Richard Bévillon au biniou, de Gwénaël Kere au chant et de Loran à la guitare électrique et au chant, le groupe travaille actuellement sur un nouvel album mais ne propose pas ses nouveaux morceaux sur scène. « On aimerait bien mais les gens vont les filmer et les enregistrer. Ce qui ne me dérange pas. Ce qui me dérange, c’est qu’il n’y aura plus la surprise quand l’album sortira. C’est juste ça. Après, comme on s’autogère de A à Z, on ne se met pas de pression. Il sortira lorsqu’il sera prêt. »
Les Ramoneurs déploient un punk rock celtique très original, leurs concerts donnent lieu à des pogos endiablés mais aussi à des gavottes bretonnantes, sur fond de chants traditionnels révolutionnaires ou de compositions savoureuses.
Vieux punks et amateurs de Fest-noz s’y retrouvent dans un bel esprit de confraternité où chacun se respecte. Une mission presque évangélique pour ces musiciens païens écologiques, défenseurs acharnés de la culture celtique et de la différence.