Ghislaine Senée : « Beaucoup de réticences à parler d’écologie au sein du Sénat »

Alors qu’il n’y avait pas de représentant de l’aile gauche au Sénat dans les Yvelines depuis 2017, Ghislaine Senée a fait son entrée au palais du Luxembourg fin septembre. Et l’ancienne maire d’Evecquemont reste convaincue que la question du climat pourra prendre une place importante.

Qu’est-ce qui vous a poussée à vous présenter ?
J’étais à mon troisième mandat pour la région Île-de-France dont deux dans l’opposition. À la fois les Yvelines me manquaient et j’avais cette sensation d’avoir fait le tour des questions, du moins en étant dans l’opposition. Car lorsque nous sommes dans la majorité c’est impossible tant les compétences sont importantes. Quand l’opportunité des sénatoriales s’est présentée, j’ai senti une vraie forme de légitimité à poser ma candidature car j’avais aussi été maire.

Par ailleurs, l’aile gauche n’était plus représentée depuis 2017 dans les Yvelines.
Oui car nous nous étions tous séparés à ce moment-là, aussi bien au sein du PS que chez les écologistes. Comme tout le monde pensait que c’était un terrain perdu, j’ai poussé au niveau de mon parti afin de saisir l’opportunité puisque si en 2020 plusieurs villes socialistes ont basculé à droite, nous en avions gagné d’autres. Et si j’ai réussi à être élue, c’est sûrement grâce à un soutien plus large que les élus d’opposition.

Vous avez démissionné de votre poste de conseillère régionale. Pourquoi ce non-cumul ?
C’est tellement dense et exigeant que je ne voulais pas avoir deux postes. Jusqu’en 2020, j’occupais le poste de maire ainsi que celui de conseillère régionale car j’avais besoin de temps pour comprendre comment gérer une commune. Également car c’était mes uniques ressources financières. D’ailleurs, je salue les maires qui gardent une activité professionnelle. À Evecquemont, j’ai un successeur qui est jeune et plutôt que de faire une espèce de micmac à être toujours conseillère municipale, j’ai préféré qu’il prenne ma place.

D’édile de 800 habitants, vous passez à sénatrice. Avez-vous peur de perdre le contact avec vos concitoyens ?
Depuis que j’ai quitté mon poste de maire, j’ai l’impression que les conseillers régionaux – peut-être parce que j’étais dans l’opposition – ont tendance à être oubliés dans le protocole institutionnel. Alors que la population sait ce que représente un sénateur ou une sénatrice alors que conseillère régionale, non, alors que nous nous occupons de sujets de leur vie de tous les jours. Dorénavant j’ai les moyens d’organiser des réunions, des colloques, de faire quelque chose sur le territoire. Je réfléchis pour avoir une permanence dans le but d’être présente pour les élus et les citoyens.

À l’instar de la Région, vous vous retrouvez à nouveau dans un groupe minoritaire. Qu’est-ce que cela vous fait ?
Je suis consciente qu’il y a à l’intérieur du Sénat beaucoup de réticences à parler d’écologie. Par exemple Gérard Larcher est un chasseur… Mais je suis convaincu que le Sénat est le lieu pour traiter l’urgence sociale et écologique, que nous soyons de droite ou de gauche. Il faut essayer de trouver les causes profondes et actionner les leviers afin de répondre à ces urgences. Par ailleurs, au sein du Sénat, même si notre groupe représentait que 2 % sur la dernière mandature, 10 % de leurs amendements sont passés. Donc cela évolue.

Pourtant vous êtes sénatrice dans un Etat condamné pour inaction climatique ?
Le GIEC a déclaré que 2025 serait le point de bascule alors pourquoi construire des centrales nucléaires prêtes dans 20 ans ? Il faut parler de sobriété maintenant afin de trouver des actions et des leviers. Prenons par exemple les subventions pour les pompes à chaleurs, il faut d’abord isoler les habitations avant de les installer. Beaucoup de thématiques sont à étudier, le transport, l’agriculture… Je suis à la commission finance et nous sommes en train d’étudier le projet de loi de politique publique pour la période 2023-2027 et nous sommes encore loin du compte.

Quel contre-pouvoir pourrait-il avoir au Sénat ?
Emmanuel Macron n’ayant pas de majorité pour la réforme des retraites, il utilise beaucoup plus le Sénat pour établir ces lois. Donc si nous, les écologistes, réussissons à faire passer plusieurs ­amendements se sera une victoire.