« T’en fais un peu trop » balance une jeune fille à une autre, lorsque celle-ci se plaint du comportement de ses « amies » envers elle. Racket, brimades lors du cours de sport, Assia ne supporte plus d’être le bouc émissaire et décide d’avaler une boîte de médicaments afin d’échapper à cette souffrance. Un journal télévisé s’ouvre alors, la collégienne est dans un état grave et sa mère est en pleurs devant la caméra. Ces scènes font partie du court-métrage réalisé et écrit par une dizaine de collégiens de la Vaucouleurs – avec l’aide du réalisateur Rachid Akiyahou – dans le cadre d’Art’cèlement, projet du Pôle Enfance Jeunesse du Territoire d’Action Départementale Seine Aval débuté en septembre 2021. Mais cela aurait très bien pu être la stricte réalité tant les affaires de harcèlement scolaire émaillent l’actualité. D’ailleurs, la date retenue pour la restitution de ce projet était le 9 novembre, journée nationale contre ce fléau.
Ces enfants ont été choisi par la chargée de prévention collège de l’IFEP et les chargés de suivi de la Réussite Educative de Mantes-la-Ville. « Même si le harcèlement scolaire ne fait pas partie de leurs missions principales, ils œuvrent pour l’épanouissement global des collégiens » détaille Katia Guerroumi, adjointe au chef de service dispositif prévention collèges au Département. Art’cèlement a également reçu la bénédiction de la mairie mantevilloise. « Il y a 1 million d’élèves harcelés chaque année, et à cela s’ajoute ceux qui harcèlent » clame Sami Damergy, l’édile local, « ce qui donnent plusieurs millions de jeunes face à cette problématique. »
Un travail de petits et de grands
« Nos partenaires au sein des établissements scolaires nous remontaient souvent ce problème » explique Adeline Nioche, référente prévention au Pôle Enfance Jeunesse, « mais c’était important que le message passe à travers des enfants car nous adultes, nous n’avons pas leurs codes. » En effet, si le court-métrage a pour vocation d’être diffusé dans d’autres collèges yvelinois, ce sont les jeunes acteurs en herbe qui en seront les ambassadeurs afin d’expliquer ce qu’est le harcèlement à leurs petits camarades. « Participer à ce film m’a permis de comprendre et de mettre des mots dessus » renchérit l’un d’eux. « Le but est de toucher le plus d’établissements scolaires possible » ajoute Abdoul Ba, chef du service PEJ. Car si le nombre de cas explose à partir de la 6ème, les premières situations sont connues dès le CE2.
Les « adultes » ont quand même leur rôle à jouer. Durant des ateliers radios au sein de LFM Radio auxquels les jeunes de la Vaucouleurs ont participé, un policier est intervenu pour leur expliquer ce qu’encoure une personne coupable de harcèlement scolaire. « Par exemple si on ne dénonce pas, cela pourrait être de la non-assistance à personne en danger » raconte Yanis, l’un des participants au court-métrage. Cela peut même aller plus loin depuis une loi de mars 2022 : si l’élève harcelé par un mineur finit par tenter de mettre fin à ses jours, ses bourreaux risquent jusqu’à 5 ans d’emprisonnement et 7 500 euros d’amende au maximum. Par ailleurs, le programme pHARe, un plan de prévention du harcèlement à destination des écoles et des collèges est mis en place depuis 2019. « 6 personnes sont formées à cela chez nous » détaille Madame Therzi-Belveau, la principale du collège de la Vaucouleurs. Un chiffre raccord avec les propos du ministre de l’Éducation, Gabriel Attal, le matin même sur la matinale de RTL. L’ex-porte-parole du gouvernement souhaite « au moins 5 adultes spécialisés sur ce sujet dans chaque établissement scolaire. »
À la suite du visionnage, le cyberharcèlement était également évoqué durant les questions posées aux enfants. « Nous en parlons lorsque nous réalisons des ateliers sur le temps passé devant les écrans » ajoute Adeline Nioche. Dans tous les cas une des solutions pour ne plus propager ce mal reste de ne plus se taire.