La Place des services, remède aux cœurs de villes abandonnés ?

De nombreuses communes de la Vallée de Seine s’apprêtent à miser sur la Place des services, concept de conciergerie d’hyper-proximtié du groupe La Poste, pour tenter de redynamiser leur centre-ville. La première des Yvelines verra le jour à Épône en début d’année, tandis que la Mairie d’Issou sonde ses habitants pour connaître leurs attentes quant à ce nouveau lieu, alliant présence humaine et services connectés.

Agence nationale de la-cohésion des territoires

« C’est un projet qui vise à redonner sens et vie à la place Montalet ». Le mercredi 29 novembre, les Issoussoises et Issoussois étaient invités à la salle Ravel par le maire Lionel Giraud, pour une réunion publique sur un concept encore obscur pour le territoire et ses habitants : la Place des services. La municipalité s’intéresse de près à ce dispositif du groupe La Poste, qui prend la forme d’une conciergerie d’hyper-proximité : au-delà d’un espace postal permettant d’expédier ou recevoir des colis, elle propose différents services adaptés aux besoins des habitants et du lieu dans lequel elle s’implante.

« Ce concept est un projet qu’on a développé pour répondre aux problématiques de certains quartiers d’avoir une désertification, avec des habitants qui n’y trouvent plus leur compte, détaille Tania Saillard, responsable du marché de l’hyper-proximité et de la Place des services pour le groupe La Poste. C’est une solution globale, et c’est aux habitants eux-mêmes de réfléchir à ce qu’ils veulent comme services et solutions commerciales ».

C’était d’ailleurs l’objectif de cette réunion publique : sonder les riverains pour connaître leurs envies. Car aucune des 12 Places des services déjà existantes dans l’Hexagone ne ressemble à une autre. À Chatillon (Hauts-de-Seine), on y trouve une boutique éphémère où les artisans du coin exposent leurs produits, un point presse, ou encore une consigne connectée. À Haguenau (Bas-Rhin), les boulangers y proposent leurs pains et viennoiseries, tandis qu’un service de click and collect permet d’acheter les articles de différents commerçants locaux. À Cheval-Blanc (Vaucluse), on peut même y passer le code de la route !

« Il y a des villes qui ont plus de commerces que d’autres, des quartiers avec plus de personnes âgées ou, au contraire, de jeunes ou de familles, donc forcément les attentes ne sont pas les mêmes, poursuit Tania Saillard à l’attention des participants à la réunion. En fonction du souhait que vous avez de poursuivre le projet, on organisera des ateliers de travail avec les habitants pour vous faire réfléchir, et savoir ce que vous souhaitez en bas de chez vous ».

La réunion publique n’ayant pas fait foule, il reste encore du chemin pour que le projet voit le jour à Issou. À Épône, cependant, on est déjà sur du concret. L’ancienne mairie sera transformée en Place des services au début de l’année 2024. Celle-ci se dotera des services postaux, de l’habituelle conciergerie pour récupérer des commandes passées chez vos commerçants, mais aussi d’un système de prêt d’objets : vous avez besoin d’un appareil à raclette pour votre repas entre amis ? D’une perceuse pour vos travaux du dimanche ? Vous pourrez l’emprunter à un autre habitant du quartier, le tout grâce à l’application dédiée qui permettra de les mettre les ­habitants en relation.

L’ancienne mairie sera transformée en Place des services au début de l’année 2024. (La Poste)

L’aspect numérique du concept ne doit pas éclipser la présence permanente du postier-régisseur, qui entretient un lien tout particulier avec les riverains. « Il connaît les habitants, les commerçants du secteur, et travaille selon des horaires fixés selon les besoins du quartier, ajoute Tania Saillard. La Place des services doit être un lieu pour se retrouver, passer un moment avec ses voisins ou ses amis ».

Ce nouveau tiers-lieu épônois se dotera également d’un espace de coworking et de télétravail géré en régie par la Mairie, ainsi que d’une salle événementielle à destination des entreprises, et d’un espace de télémédecine. Une pierre de plus dans le projet de redynamisation du centre-ville voulu par la municipalité, après le lancement du marché de food-truck, et ­l’ouverture de la boutique Mon Ptit Lait.

« Pour éviter que le centre-bourg meure à petit feu, on voulait créer une zone d’attractivité pour que les commerces puissent continuer à exister, développe le maire d’Épône Ivika Jovic. On a cherché des idées, puis on a vu ce concept à Châtillon, alors on les a démarchés au salon des maires ».

Comme le souligne l’édile, il s’agissait également d’une occasion en or pour valoriser le patrimoine local. « L’ancienne mairie était en état de délabrement. Grâce à ce projet, on réhabilite cet immeuble remarquable à moindre coût ». Les travaux devraient arriver à leur terme à la fin du mois de janvier, pour une ouverture prévue courant février.

L’année prochaine, plus de 40 Place des services ouvriront en France, dont celle d’Épône qui sera la première des Yvelines, et la seconde d’Île-de-France. Le dispositif créé en 2022 semble en tout cas promis à un bel avenir, avec pas moins de 400 ventes déjà signées, que ce soit en milieu rural ou urbain. « C’est un projet auquel on a réfléchi il y a 4 ans, relate Lydie Lienhart, déléguée territoriale du groupe La Poste pour les Yvelines. On est continuellement en train de se réinventer, car le courrier n’est plus notre fer de lance, il faut donc réfléchir à autre chose. Les bureaux de poste coûtent de l’argent, mais on n’a pas envie de quitter les zones rurales. Il faut donc être présent sous d’autres formes, et la Place des services en fait partie ».

Dans les Yvelines, bon nombre de communes ont été séduites par le dispositif et devraient l’accueillir dans les années à venir, parmi lesquelles Buchelay, Carrières-sous-Poissy, Les Mureaux, Chatou ou encore Chambourcy.