La Ville prend-elle ses habitants pour des pigeons ?

Jamais avare d’une idée qui ne débouche sur rien, la municipalité a disposé en toute discrétion fin janvier des panneaux menaçant de sanctions ceux qui les nourriraient. Que s’est-il passé depuis ? Rien. Les pigeons ne reculent pas, ils roucoulent.

La municipalité de Raphaël Cognet, phase 2, est en passe de battre un record dont les mantais se passeraient bien. Mettre en place des pseudos mesures qui ne débouchent sur rien. La tentative vaine de lutter contre la prolifération des pigeons et autres nuisibles illustre assez bien ces effets de manches qui ne font finalement que déplacer de l’air.

Le 26 janvier dernier, sur l’organe de propagande numérique qu’est la page Facebook de la ville, on apprenait que des panneaux d’interdiction du nourrissage de ces animaux allaient être installés place centrale de la Dalle du Val-Fourré, sur l’île aux Dames, square du Château, au lac des Pêcheurs et au stade nautique international Didier Simond.

En dépit de la qualité indéniable du corps enseignant mantais, les pigeons et autres nuisibles n’ont pas pris connaissance des injonctions qui leurs étaient faites. Quant à leurs amis les humains, ils semblent bien réfractaires aux souhaits ­municipaux. Conséquence, les pigeons sont toujours aussi nombreux dans les endroits précités, avec les conséquences que les mantais ­subissent au quotidien.

Attendons peut-être que le nouveau directeur de la police municipale passe à l’action pour qu’enfin, les volatiles désertent la commune. À moins qu’il confirme que sa priorité n’est pas de s’occuper des pigeons mais plutôt d’éradiquer la délinquance dans le quartier du Val Fourré. Reste à savoir si les pigeons sont classés dans la rubrique des sauvageons comme l’ex-ministre de l’Intérieur Jean-Pierre Chevènement désignait les fauteurs de troubles.

Pour un fin connaisseur du monde colombophile : « jamais aucune verbalisation n’a été effectuée pour le nourrissage des pigeons. Par ailleurs, le seul qui pourrait éventuellement être fait serait de 38 euros relatifs à l’arrêté municipal. Car il n’existe pas d’arrêté préfectoral sur le sujet » relève notre expert : « Les policiers municipaux sont dans l’incapacité de mettre en application une telle décision car l’identité du contrevenant est indispensable et en cas de non-présentation la personne doit être ramenée à l’hôtel de police nationale pour vérification d’identité. Pour simplifier le tout, un procès-verbal au format A4 peut être fait mais il doit être transmis à Madame le Procureur de la République de Versailles qui elle seule décidera de l’éventuelle suite de à donner ».

Imaginez la tête d’un substitut du procureur de la République de permanence au tribunal de Versailles être prévenu téléphoniquement qu’une personne a été interpellée en flagrant-délit de nourrissage des pigeons. Pas sûr que le magistrat apprécie beaucoup qu’on le dérange pour un motif aussi futile, lui qui doit gérer en direct des agressions, vols à main armée, cambriolages et trafics en tous genres. Une fois de plus, la municipalité mantaise se jette à corps perdu dans une ­opération de communication.

Mais il ne faudra sûrement pas qu’elle continue de prendre longtemps encore « les enfants du bon Dieu pour des canards sauvages », une expression qui signifie qu’il ne faut pas prendre le commun des mortels pour des canards sauvages, c’est-à-dire pour des imbéciles ou, pire encore, pour d’innocentes cibles sur lesquelles on peut tout se permettre. Car entre volatiles, on se comprend vite et bien.