Peut-être espéraient-ils qu’elle ne porte pas plainte ? Pourtant Séréna (le nom a été modifié) ne se démonte pas lorsqu’elle se présente au tribunal de Versailles le 2 mai. Et pour cause, cette escort-girl habitant Poissy a été violemment séquestrée chez elle le 6 avril. Trois hommes – tous cagoulés et gantés – s’en sont pris à elle, espérant qu’elle ait beaucoup d’argent liquide dans son appartement qui lui sert à accueillir les clients. Le mobile de ce rapt : payer le permis de l’un des agresseurs. Mais devant le faible butin – 300 euros et deux fusils d’assaut à air comprimé – son complice s’acharne sur la travailleuse du sexe, lui provoquant des hématomes au niveau du visage, dans le bas du dos et sur les hanches. Des douleurs toujours persistantes puisqu’elle n’arrive plus à tenir la position assise plus d’une heure.
Pourtant Séréna fait attention, elle connaît la nature des hommes. Quand un intéressé la contacte, la Pisciacaise donne rendez-vous dans un autre endroit afin de s’assurer qu’il soit clean et entretenir la confusion sur son véritable lieu de résidence. Mais ses agresseurs ont bien planifié leur coup. La veille, ils partent en mission repérage dans une Citroën C1 rouge afin de s’assurer que la travailleuse du sexe n’a aucun garde qui la protège. Ne voyant personne à l’horizon, ils savent qu’ils pourront être tranquilles. Dernier élément afin de tromper complètement sa vigilance, une tierce personne – soi-disant un Belge – la contacte. « J’attendais un client et comme il disait qu’il était dans ma cage d’escalier, je me suis dit que c’était un habitué » explique-t-elle devant le tribunal de Versailles le 2 mai.
Après cette agression, la quarantenaire va porter plainte et la police commence à étudier les différentes caméras de surveillance. Les forces de l’Ordre mettent en place un dispositif de surveillance et tombent sur le véhicule aux Mureaux. Ils arrêtent alors deux personnes – amis d’enfance – dont le propriétaire de la C1. En audition, aucun des deux ne veut balancer le troisième larron. Par ailleurs, Séréna pense les reconnaître quand les fonctionnaires de police lui présentent une ribambelle de potentiels suspects. L’un par « son regard », l’autre grâce à « sa voix et à ses jambes frêles », seule partie du corps qu’elle pouvait voir lorsqu’elle était ligotée et au sol. De plus, les empreintes digitales du premier ont été découvertes sur le ruban adhésif retrouvé dans la voiture et permettant d’entraver la escort-girl. « Sans cela, je n’aurais jamais avoué » confie-t-il dans le box des accusés.
Toutefois, la présence du propriétaire de la C1 est remise en cause. Lui serait allé dans un kebab où il a ses habitudes, le Nour Food, et aurait laissé sa voiture à son ami d’enfance qui serait ensuite parti à Poissy avec. Deux autres connaissances attestent également qu’il serait resté avec eux afin de regarder un match de la Coupe d’Afrique des Nations. Et son avocat va s’appuyer là-dessus. « Pourquoi la Police n’a pas vérifié sa présence via les caméras de surveillance du restaurant et de la ville ? » plaide-t-il. Toutes ces interrogations serviront son cas. Le président de la cour ordonne la relaxe tandis que pour l’autre, ce sera 30 mois de prison dont 6 mois avec sursis, une indemnité de 2 519 euros pour le préjudice matériel et une future pour le préjudice physique et moral occasionné à Séréna.