Porte-drapeaux : former pour assurer le devoir de mémoire

L’Union Nationale des anciens Combattants de Flins-sur-Seine organisait, le samedi 4 mai, une journée de formation porte-drapeau pour les jeunes du territoire. Séance théorique sur les symboles de la République, cérémonie en condition réelle… Cette initiative, qui en appelle d’autres, a pour but de permettre aux anciens combattants de transmettre le flambeau aux jeunes générations.

Quelques jours avant la commémoration du 8 mai, les drapeaux étaient en berne et la Marseillaise entonnée, auprès du monument aux morts de Flins-sur-Seine. Répétition générale avant le jour J ? Pas vraiment… Quoique. L’Union Nationale des anciens Combattants (UNC) de la ville de Flins-sur-Seine organisait, le samedi 4 mai, une formation porte-drapeau à destination des jeunes du territoire. Une première dans les ­Yvelines.

Déjà dispensé dans d’autres départements, ce type de journée est organisé, d’ordinaire, par les délégations départementales des anciens combattants. Mais celle de Flins-sur-Seine a une petite particularité : c’est Michel Bretin, président de l’UNC de la commune qui en est à l’origine. « Nous avons été invités, l’année dernière, à faire une petite intervention auprès des CM2 pour leur parler des monuments aux morts, et on a terminé par une petite cérémonie, se souvient-il. Et quelques jours après, pour la cérémonie du 8 mai, on avait énormément d’élèves de l’école. C’est là qu’est venue l’idée de former les porte-drapeaux ».

Séduit par l’idée, le président de l’UNC des Yvelines, Calixte Authier, n’a pas hésité à donner son aval. « Il faut que les jeunes commencent à savoir qu’il ne faut pas oublier le devoir de mémoire et ce que ça représente, assure-t-il. On leur dit bien que c’est grâce à ces gens-là que vous êtes ce que vous êtes, que vous faites ce que vous pouvez faire, sans restriction ». 14 jeunes de Flins-sur-Seine et des communes alentours ont pris part à cette journée, surpassant les attentes des organisateurs. « On ne s’attendait pas à autant, on a même dû refuser du monde, s’enthousiasme Michel Bretin. Je pensais en avoir quelques-uns, mais là, c’est beau ».

C’est sous le regard plein de fierté des parents que les porte-drapeaux en herbe se sont dirigés vers le cimetière et le monument aux morts, pour une cérémonie exécutée en conditions réelles.

La formation a débuté dès le matin par une séance théorique sur l’histoire des drapeaux français et des monuments, mais aussi plus largement sur les symboles de la République. « J’ai beaucoup appris sur l’histoire assez riche de l’UNC, nous raconte Matteo, 17 ans, à l’issue de la journée. J’aime beaucoup tout ce qui touche aux décorations nationales ». Parmi les choses qui l’ont marqué, il évoque sans détour « l’histoire des anciens combattants qui ont témoigné », mais aussi… le poids des drapeaux !

Après la théorie et la distribution de leur béret et de leurs gants – indispensables pour un bon porte-drapeau -, les participants sont passés à la pratique avec le maniement des étendards, aux côtés des anciens. « Je me suis rendu compte à quel point c’était complexe, il y a beaucoup de positions, c’est très physique, avoue Matteo. On ne s’en rend pas compte comme ça, mais les drapeaux sont très lourds. Ça peut être assez long, surtout quand les supérieurs oublient de nous mettre au repos, et qu’on reste au garde à vous pendant 10 minutes ! »

C’est sous le regard plein de fierté des parents que les porte-drapeaux en herbe se sont alors dirigés vers le cimetière et le monument aux morts, pour une cérémonie exécutée en conditions réelles. « Je pensais voir des voitures voler avant de voir des jeunes comme ça porter les drapeaux ! » s’est même amusé un ancien combattant. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que malgré le jeune âge de certains, tous les participants ont su faire preuve d’une discipline et d’une dignité exemplaires. « Pour être un bon porte-drapeau, il faut avoir l’envie de rendre les honneurs à ceux qui ont donné leur vie, souligne Calixte Authier. Il faut qu’ils soient dignes. En règle générale, quand ils le font à cet âge là, c’est qu’ils en ont envie. Par contre, les anciens, quand ils le font, c’est parfois parce qu’il faut bien que quelqu’un porte les drapeaux ».

Après la théorie et la distribution de leur béret et de leurs gants, les participants sont passés à la pratique avec le maniement des étendards, aux côtés des anciens.

Ce protocole parfois « un peu olé-olé », comme il le dit lui-même, est l’une des raisons qui a poussé Michel Bretin a proposer ces formations qui se montrent également bénéfiques pour les anciens. Mais le principal objectif est bel et bien la transmission du devoir de mémoire d’une génération à l’autre. « La moyenne d’âge des anciens d’Algérie, c’est 82 à 85 ans, observe-t-il. Donc voir de la graine montante comme ça, ça nous fait extrêmement plaisir. Le devoir de mémoire va être conservé, c’est ce qui est recherché ».

L’âge des porte-drapeaux actuels pose forcément question. Sous quelle forme se dérouleront les cérémonies commémoratives dans 10, 15, 20 ans ? Pour Michel Bretin, leur disparition n’est pas un tabou. « Déjà, il y en a beaucoup qui voudraient voir diminuer le nombre de cérémonies à l’année, regrette-t-il. Ici, pourtant, on n’en fait pas énormément. Il faut quand même se souvenir ! On a vécu des moments très durs, il faut y repenser, revoir les images de la guerre à ces moments là, voir à quel point c’était invivable. C’est ce que vivent en ce moment même les territoires israéliens et de Gaza, et même l’Ukraine. Malheureusement, on n’arrivera jamais à faire en sorte que ça n’arrive plus ».

Une fois la journée terminée, un certificat a été remis aux participants, leur permettant d’officier lors des cérémonies commémoratives. Ce mercredi 8 mai est, déjà, l’occasion pour eux de faire leurs preuves.

Une promotion en hommage à Michel Sarazin

L’UNC de Flins-sur-Seine a choisi d’attribuer le nom de Michel Sarazin à cette toute première promotion de porte-drapeaux. L’ancien d’infanterie de marine puis maître de cérémonie à Flins-sur-Seine était dans tous les esprits, à commencer par celui de Michel Bretin. « C’était un grand ami qui, malheureusement, est décédé pendant le Covid, et à cette époque on ne pouvait pas participer aux obsèques, se souvient-il avec émotion. On a donc décidé d’attribuer son nom à cette première promotion ». Sa fille, Isabelle Sarazin, s’est d’ailleurs adressée aux jeunes lors de la cérémonie par un discours poignant. « Je suis profondément touchée et émue de l’hommage rendu à mon papa. C’est un honneur pour moi d’associer son nom à votre promotion. Je suis très fière de lui, de vous, comme il le serait. En sa mémoire, et de la même façon que mon papa, soyez engagé, et respectueux de notre joli drapeau ».