Une journée pour renouer le dialogue entre les jeunes et la police

Le quartier des Musiciens, aux Mureaux, accueillait l’événement Prox’Aventure le vendredi 25 octobre dernier. Ces journées à la fois sportives et citoyennes permettent aux jeunes des quartiers sensibles d’échanger, de jouer et de débattre avec les forces de l’ordre, dans le but d’apaiser les tensions et de comprendre l’autre.

Un jeune sur deux n’a plus confiance en la police. C’est le constat dresse par le Baromètre de la confiance politique du Cevipof, en 2022. Les chiffres sont encore plus inquiétants en Île-de-France, où 70 % des 18-24 ans expriment même une défiance vis-à-vis des forces de l’ordre. Les différents épisodes de violences policières vécus ces dernières années y sont pour beaucoup, et l’affaire Nahel n’était pas encore passée par là.

S’il n’existe pas de recette miracle pour renouer le dialogue entre la jeunesse française et les représentants de l’autorité, un homme en a fait son combat il y a un peu plus de 30 ans : Bruno Pomart, ex-policier du Raid et accessoirement maire de la commune de Belflou dans l’Aude, a fondé l’association Raid Aventure Organisation en 1992.

« L’association a évolué avec la population et les problèmes qui se sont créés. Avant on était plutôt sur des courses d’orientation pour découvrir la ville, la culture, le sport et l’administration », se souvient Julie. Policière de la BAC à Paris, cette Toulousaine d’origine s’est engagée auprès de l’association il y a 8 ans, jusqu’à en devenir coordinatrice, afin de pouvoir échanger avec la population. « C’est différent de ce que je fais dans mon métier de tous les jours, je suis en BAC, donc je n’ai pas le temps de discuter avec les gens ».

Les jeunes du quartier des Musiciens, aux Mureaux, ont pu faire de l’escalade, jouer au foot, ou encore monter sur un mini ring de boxe en étant encadrés par des représentants des forces de l’ordre.

Voilà 12 ans que l’association a mis en place les événements Prox’Aventure. Le temps d’une journée, des agents bénévoles de la police nationale et municipale prennent le temps, sur leurs jours de repos, pour aller rencontrer les habitants des quartiers sensibles afin de dialoguer, sensibiliser, et faire de la prévention à travers le prisme du sport. Vendredi dernier, les jeunes du quartier des Musiciens, aux Mureaux, ont pu faire de l’escalade, jouer au foot, ou encore monter sur un mini ring de boxe en étant encadrés par des représentants des forces de l’ordre. Curieux et avenants, certains jeunes ont même pu se mettre dans la peau d’agents de police en s’essayant au tir, ou en enfilant des tenues ­d’intervention.

Les enfants, méfiants au premier abord, se sont finalement montrés ouverts à l’échange avec les policiers présents, sous le regard rassuré de leurs parents. « Les résultats de ce type d’événement sont difficiles à quantifier, mais on voit les signes, glisse la coordinatrice de l’association. À Toulouse, quand on s’est installés une journée dans un quartier difficile, les mamans du quartier ont tenu à nous faire à manger le midi pour nous remercier d’être venus. Ça montre quelque chose ».

La présence des policiers municipaux sur ces événements permet surtout aux habitants de mettre un visage sur les agents qu’ils peuvent croiser au quotidien. « Quand les jeunes vont voir ces visages dans un lieu où l’ambiance est bonne, peut-être qu’à l’extérieur, ça partira moins en problème, ajoute Julie. Les gens oseront peut-être plus venir vers eux pour leur donner des informations et régler leurs problèmes dans les quartiers. On est là pour leur dire : la police n’est pas votre ­ennemie ».

En cette année 2024, pas moins de 160 journées Prox’Aventure ont été organisées à travers l’Hexagone.

En cette année 2024, pas moins de 160 journées Prox’Aventure ont été organisées à travers l’Hexagone. Si les bénévoles de l’association sont venus aux Musiciens le temps d’une journée, c’est à l’initiative du Collectif Locataire Les Résidences Yvelines Essonne. L’association, au-delà de sa mission de faire la passerelle entre le bailleur et les locataires, a pris l’habitude d’intervenir sur différents sujets comme la sensibilisation et la prévention auprès de la population muriautine. Quand elle a entendu parler de l’événement, sa présidente Sophie Gomis n’a pas hésité. « On a soufflé l’idée l’année dernière au bailleur, c’est lui qui a construit le projet avec la Mairie. Notre but était de renouer le dialogue entre la police et la population, surtout dans les quartiers sensibles et populaires où la police est plutôt mal vue ».

Si la situation ne peut assurément pas être résolue d’un coup de baguette magique, Sophie Gomis espère que ce type d’événement puisse apaiser les tensions que connaît le quartier. « C’est quelque chose qui a toujours été le cas ici, regrette-t-elle. Il faut leur montrer le lien qu’ils peuvent créer avec la police, et qu’ils sont des gens comme tout le monde. Cette génération commence à prendre la relève, ça peut commencer par des caillassages par exemple, mais le fait de parler avec eux, ça peut tempérer. C’est la première fois qu’ils voient les policiers comme ça, aussi proches de la population, et on voit qu’ils sont curieux, qu’ils posent des questions… ».

« Il est important de comprendre que la police n’est pas votre ennemie, et qu’elle vous fait confiance pour respecter les règles » a déclaré l’édile muriautin, François Garay dans un moment d’échange avec les élus et les représentants de la police ainsi que des pompiers.

Une fois l’après-midi bien entamée, les jeunes muriautins étaient conviés à un moment d’échange avec des élus, mais aussi le commissaire des Mureaux, le chef de la police municipale et un représentant des sapeurs pompiers. Pour éviter qu’il s’agisse d’un moment barbant pour les enfants, le maire de la commune, François Garay, avait prévu son coup. « Qui joue au foot ici ? leur a-t-il lancé. Quand on joue, on accepte les règles. Qu’est-ce qu’un arbitre ? C’est l’autorité, c’est les contrôleurs, c’est les parents… et c’est la police ». Après une analogie entre les cartons rouges et la justice, l’édile muriautin est allé droit au but. « Il est important de comprendre que la police n’est pas votre ennemie, et qu’elle vous fait confiance pour respecter les règles ».

Au terme de la journée, les sourires et les échanges enthousiastes entre jeunes et policiers montrent que de telles initiatives peuvent porter leurs fruits. En tout cas, la présidente du Collectif Locataire l’assure : elle veut que ce type d’événement puisse « perdurer dans le temps », que cela soit au sein du quartier des Musiciens ou dans d’autres coins de la ville.