Le territoire mène la guerre au trafic de stupéfiants

Dans le cadre de son plan de restauration de la sécurité du quotidien, la Préfecture a fait de la lutte du trafic de stupéfiants une de ses priorités. Synergie entre service de police, usagers plus sévèrement réprimandés... Le but est de faire de notre territoire une place nette.

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Pour l’année 2024, les Yvelines ont été un bon élève : la délinquance a reculé de 2,2 % (voir encadré). Cette baisse est principalement due à la présence renforcée des forces de Police et de la Gendarmerie sur le terrain, comme cela a pu être constaté durant les Jeux Olympiques et Paralympiques de l’été dernier. Toutefois, le but n’est pas de se reposer sur ses lauriers et les nombreuses interventions du ministre de l’Intérieur vont en ce sens. Sauf que même Bruno Retailleau le concède, « Paris ne sait pas tout ». Le candidat à la présidence du parti Les Républicains a donc laissé les coudées franches aux Préfectures pour établir leurs feuilles de route. Ce que s’est empressée de faire celle des Yvelines.

« C’est bien d’avoir un cadre national mais c’est bien de pouvoir répondre au plus juste. Un diagnostic du Département a donc été réalisé, détaille Frédéric Rose, ce qui a permis de voir les tendances de délinquances. » Le préfet soutient qu’aucune trame obligatoire n’était imposée, seulement d’annoncer des priorités. Elles sont au nombre de 8 et la première correspond tout de même à celle de l’État : la lutte contre les produits stupéfiants. « Il ne faut pas voir les Yvelines seulement comme un territoire de consommation » précise Christophe Descoms, directeur interdépartemental de la police judiciaire.

En effet, notre territoire se trouve sur la route des Go Fast comme les faits divers nous le rappelle régulièrement. Par exemple, le 9 octobre 2024, au péage de Saint-Arnoult-en-Yvelines où un poids-lourd transportant 130 kilos de cocaïne avait été arrêté en fin d’après-midi. Une cargaison évaluée à l’époque à 8 millions d’euros. « Ce péage est connu pour être une des portes d’entrée du cannabis pour les go-fast remontant de l’Espagne, avait réagi l’ancienne procureur de Versailles, Maryvonne Caillibotte, dans les colonnes du Parisien, mais, la nouveauté, c’est qu’on y découvre régulièrement de la cocaïne. C’est un phénomène qu’on voit monter en puissance. »

La cocaïne, un phénomène « qui monte en puissance »

Que ce soit la Police, la Gendarmerie ou la Préfecture, ils veulent mettre à mal tous les types de flux. « Pas mal d’Yvelinois ont les moyens financiers de consommer, expose Frédéric Rose, les uns vont directement dans les points de deal tandis que d’autres se font livrer via « Uber Shit ». » Ensemble, ils ont également échangé avec plusieurs maires afin de mieux cerner les zones de délinquances et leurs natures. Cela a permis d’établir une cartographie. « En fonction des heures, des types d’habitation, des jours de la semaine, on a eu les tendances de délinquance. Ça c’est vraiment une méthode qui est assez nouvelle » concède le Préfet. Par ailleurs, il faut aussi une réponse pénale forte en face. « Nous prononçons des peines significatives, mais pas nécessairement de la prison, précise Emmanuelle Lepissier, procureure de la République du tribunal de Versailles par intérim, comme les interdictions de paraître dans un secteur. » Une solution palliative également, surpopulation carcérale oblige…

Alors que le poste était à pourvoir depuis plusieurs semaines, le directeur de l’OFAST (office antistupéfiants) des Yvelines a été nommé. Cette division placée sous l’autorité du directeur central de la police judiciaire est compétente en matière de lutte contre la production, la fabrication, l’importation, l’exportation, le transport, la détention, l’offre, la cession, l’acquisition ou l’emploi illicites de stupéfiants, contre les opérations de blanchiment liées au trafic de stupéfiants et contre l’usage illicite de l’une des substances ou plantes classées comme stupéfiants. L’OFAST apportera son concours à la cellule du renseignement opérationnel sur les stupéfiants (CROSS), et en tout, ce sont 80 enquêteurs qui sont dédiés à cette problématique.

Utiliser les amendes forfaitaires délictuelles pour assécher la demande

Grâce à cela, ils glanent plus d’informations, évitant ainsi d’être bloqués face aux individus qui ne veulent pas être des « balances ». « La part de ce que l’on obtient lors des auditions devient de plus en plus faible par rapport au travail qui est fait en amont, avance Christophe Descoms, avant on interpellait un peu plus rapidement, parce qu’on se disait que pendant la garde à vue, on allait apprendre des choses. Là, maintenant, très clairement, on a senti une évolution. » La réforme de la Police participe également à l’amélioration de la situation. « Elle nous a permis de travailler en filière mais aussi de développer les synergies entre les services » avance Olivier Dimpre, le directeur interdépartemental de la police nationale des Yvelines.

Avec tout cet attirail, les services de l’État veulent surfer sur une « bonne » année 2024. En effet, depuis deux ans les Yvelines ont enregistré des progrès significatifs, avec une baisse de 20 % des points de deal. De plus, Frédéric Rose désire ardemment « martyriser la demande » grâce aux amendes forfaitaires délictuelles. Plus de 6 100 amendes ont été dressées en 2024. Par ailleurs, de nombreux kits salivaires ont été distribués aux polices municipales. « La lutte contre les stupéfiants est un sujet qui concerne aussi le routier car plus d’un tiers de nos victimes d’accidents mortels ou corporels de la circulation implique un conducteur sous l’emprise de stupéfiants » détaille le Préfet. Enfin, la méthode commence déjà à porter ses fruits puisqu’un gros point de deal a été démantelé à Carrières-sous-Poissy. L’instruction étant toujours en cours, les seules informations divulguées sont que le groupe stup de Conflans-Sainte-Honorine – aidé de la police judiciaire des Yvelines – a pu procéder à 11 interpellations et qu’une douzième est en cours. Ils doivent être jugés prochainement. « Il y a une vraie mobilisation sur le terrain, et donc nous avons des tendances qui sont plutôt positives mais on ne se réjouit jamais complètement car il y a quand même des victimes » assène Frédéric Rose.

Les chiffres de la délinquance dans les Yvelines

Comme évoqué dans cet article, les chiffres de la délinquance en 2024 sont en baisse dans notre territoire. Les homicides ont chuté de 37 % et les tentatives d’homicide de 5,8 %. De plus, le nombre d’agressions avec coups et blessures recule de 2 %. Autre satisfaction, les violences intrafamiliales enregistrent une baisse de 3,6 %, une première depuis 2016, mais Frédéric Rose reste attentif sur ce sujet.

Quant aux atteintes aux biens, il y a 12 % de cambriolages en moins alors que plusieurs villes du département sont composées de quartiers huppés. Selon Olivier Dimpre, cela va de pair avec le développement des caméras et la présence sur le terrain.

Les points noirs sont les violences sexuelles, en hausse de 3,7 % mais ce qui reste en dessous de la moyenne nationale (environ 7 %) et de l’Île-de-France (10 %) et l’augmentation du vol d’accessoires des véhicules avec une flambée de 57,7 %. Cette thématique fait également partie des priorités à traiter en dehors des stupéfiants.