Encadrer leur implantation ou les combattre : l’épineux sujet des antennes 5G

Entre les habitants souhaitant une meilleure couverture réseau et ceux dont les poils s’hérissent à la vue d’un pylône, le sujet des antennes 5G enflamme plus que jamais les débats. Pendant que la Mairie de Villennes-sur-Seine change sa stratégie pour encadrer leur installation plutôt que de voir des propriétaires privés leur damer le pion, un collectif d’habitants a poussé Bouygues Telecom à abandonner un projet d’antenne, du côté de Vert.

Au mois de février 2024, le conseil municipal de Villennes-sur-Seine votait une motion visant à refuser toute implantation d’antenne 5G sur le territoire communal, évoquant une atteinte au cadre de vie et des enjeux de santé publique. Une position ferme et assumée… mais pas pour longtemps. 4 mois plus tard, les habitants du quartier Breteuil étaient conviés à une réunion publique sur le sujet, durant laquelle la municipalité a annoncé sa volonté de changer de cap. « On a refusé, dans le passé, de travailler avec les opérateurs car il y avait eu une grosse fronde des habitants, se souvient Alain Adiceom, adjoint au maire délégué à la Transition numérique. Mais entre-temps, ils ont engagé des discussions avec des propriétaires privés ».

Face à la fermeté de la Ville, différents opérateurs se sont effectivement rapprochés d’habitants et de propriétaires villennois pour installer une antenne sur leur terrain, moyennant une grasse rémunération. « Ils proposent entre 10 000 et 25 000 euros par an aux propriétaires pour installer une antenne, ça peut créer de l’appétit », grince Alain Adiceom. Une situation d’autant plus cocasse quand, en tendant l’oreille lors de la réunion publique, on entend qu’un élu d’opposition serait lui-même en discussion avec un opérateur. De quoi expliquer son abstention, lors du vote de la motion en début d’année 2024 ?

Regrouper les opérateurs sur un pylône commun

Qu’elle s’y oppose ou non, la municipalité pourrait donc voir fleurir des antennes sur son territoire. Et parfois à moins de 200 mètres l’une de l’autre, notamment au sein du quartier Breteuil, à la frontière avec Médan. D’où l’intérêt de rétablir le dialogue avec les opérateurs qui sont, dans ce cas précis, Bouygues et Free. « L’objectif de la Municipalité est de maîtriser le destin de Villennes et de positionner les antennes sur un pylône commun, a déclaré l’élu villennois lors de la dernière réunion publique organisée le 5 mars dernier. Il serait irresponsable de ne pas tenter de mutualiser ces deux projets. L’idéal eut été que ce fusse sur un terrain communal afin que les recettes reviennent à la commune et non à un particulier. Cette dernière proposition directrice a fait consensus lors de la réunion de Breteuil pour de futurs projets quel que soit le lieu de Villennes ».

Environ 80 personnes étaient présentes lors de la réunion publique du 5 mars 2025, au sein de l’école des Sables.

Les discussions seraient d’ailleurs bien engagées pour que Free rejoigne finalement le pylône de Bouygues. « Il y a eu des accords de passés entre les deux opérateurs cet été, avec des pénalités financières en cas de sortie de Free » ajoute Alain Adiceom. Le centre-ville est d’ailleurs concerné lui aussi, avec les mêmes acteurs qui ont déposé des demandes auprès de particuliers. « Les élus sont en contact avec ces deux opérateurs pour essayer de trouver une meilleure solution et un lieu optimal, pourquoi pas un lieu communal », glisse-t-on du côté de la Mairie.

Danger sanitaire ?

La construction d’une antenne au sein du quartier Breteuil permettrait de combler une « zone blanche » où la couverture réseau, et c’est un euphémisme, laisse à désirer. « L’État impose la couverture de réseau sur tout le territoire national, et pousse les opérateurs à accélérer le déploiement des antennes 5G, précise Alain Adiceom. La pression est de plus en plus forte ».

Si certains habitants comprennent la démarche et sont prêts à choisir le « moindre mal », d’autres continuent d’exprimer leur vive opposition à l’implantation desdites antennes. Un collectif baptisé « Non-antennes 78670 » a même vu le jour pour formaliser la lutte contre la prolifération des pylônes, notamment pour des raisons sanitaires. « Il est interdit d’installer des antennes près des écoles, mais pourquoi les enfants seraient mieux protégés que nous ? » s’est étonnée l’une de ses représentantes lors de la réunion publique de mars, évoquant une recrudescence des cas de cancers et de leucémies. « Si on se rend compte dans 20 ans que les antennes portent un risque sur la santé, on sera foutus », renchérit une autre ­habitante.

Les « pylônes-arbres » permettent de camoufler les antennes, comme on peut le voir du côté de la commune d’Orgeval, ou même près de l’hôtel Campanile de Villennes-sur-Seine. (DR)

« Un téléphone, quand vous le mettez à l’oreille, va être beaucoup plus émetteur et nocif qu’une antenne située à 100 mètres par exemple, a souligné Nicolas Hauswald, ingénieur télécom, présent pour l’occasion. Les champs électromagnétiques, on y est exposé au quotidien. D’ailleurs, l’un des plus forts émetteurs, c’est les plaques à induction par exemple ». Pas de quoi rassurer les plus réfractaires. « Ça veut bien dire qu’il y a une notion de danger », rétorque une participante.

Les « pylônes-arbres » comme solution ?

Outre les arguments sanitaires, les riverains s’inquiètent de la dépréciation de leurs biens immobiliers suite à l’arrivée de tels pylônes. « Je viens d’acheter une maison pour ma fille, et cette maison dévalue de 20 % si une antenne voit bien le jour sur le terrain voisin », s’est ému un Villennois. Autre point évoqué, la dégradation du paysage. « On parle de pylônes, très laids, partout. Peut-être que vous ne vous promenez pas, mais moi, je me promène », lance une habitante, avant qu’un de ses voisins lui emboîte le pas. « Si on habite à Villennes, c’est pour le cadre privilégié ! »

Une solution avait été trouvée après des années de procédure, au sujet de l’implantation controversée, déjà, d’une antenne au niveau de l’hôtel Campanile de la commune : c’est un « pylône-arbre » qui a été érigé, permettant à la structure de télécommunication de s’intégrer harmonieusement au paysage. Composé d’un faux tronc et de fausses branches pour imiter l’aspect d’un arbre réel, il diminue l’impact visuel, comme on peut l’observer du côté d’Orgeval. Cependant, il y a un hic : les opérateurs sont généralement réfractaires à choisir ces « pylônes-arbres » en raison de leur coût élevé, de leur conception plus complexe et, parfois, de leur efficacité plus limitée.

Peu convaincu par la position de la Mairie, le collectif « Non-antennes 78670 » assure vouloir intensifier son combat contre leur implantation, notamment avec de futures manifestations. Et l’histoire récente nous apprend que des mobilisations d’ampleur peuvent bien porter leur fruit. Prenons l’exemple de la commune de Vert. Lancé par Bouygues Télécom en 2021, le projet d’une antenne 5G de 30 mètres devait voir le jour dans la commune. Mais c’était sans compter sur l’abnégation des riverains qui ont réussi à faire capoter le projet, en ce début d’année 2025.