
Contrairement à son instauration de juin dernier, Jean-David Cavaillé avait plus de temps à nous consacrer un mois plus tard. D’un côté, des magistrats venus de France et de Navarre – voire de Mayotte – venaient saluer sa prise de fonction « tant attendue » en tant que nouveau procureur de la République du tribunal de Versailles. L’homme est à l’aise avec les médias. Costume rayé et mocassins rouges pour l’occasion, il promet d’ailleurs de fournir les informations demandées, si elles respectent les horaires adéquates et le degré d’importance. Inutile donc de l’appeler à 23 h pour une barrette de shit confisquée, ce qui peut se comprendre. Comme chaque haut magistrat, il doit établir une politique générale. À l’intérieur de cette feuille de route à respecter, il y a « des choix parfois difficiles ».
La première priorité reste évidemment le narcotrafic. Elevé au rang de problème numéro 1 dans l’Hexagone par le ministère de l’Intérieur – la Préfecture des Yvelines l’a aussi coché en première case de son plan de restauration de la sécurité du quotidien – ce phénomène n’est pas inconnu du successeur de Maryvonne Caillibotte : « J’y ai déjà fait face dans les Pyrénées orientales. » Ensuite vient toutes les formes de violences graves, qu’elles soient intrafamiliales, envers les personnes dépositaires de l’autorité publique ainsi que les élus. Enfin, « toutes les formes d’atteintes sexuelles, avec deux idées aussi qui me touchent » poursuit le procureur de la République.
En premier lieu, la prostitution des mineurs notamment ceux placés. Jean-David Cavaillé a déjà rencontrer le Conseil départemental afin de voir s’il y a déjà des signalements à venir et doit s’entretenir également avec la directrice en charge de l’Aide Sociale à l’Enfance (ASE). « Ils ont bien conscience d’avoir des failles » assure-t-il. En effet, un avocat des Bouches-du-Rhône, Maître Michel Amas, a déposé un recours le 29 avril au tribunal de Versailles contre le Département pour faute en responsabilité envers les enfants de l’ASE.
Pour cela, il mettra en œuvre toutes les techniques d’enquête – étude des réseaux sociaux, identification des filières – pour travailler dessus. « Il faut être attentif » assène-t-il et prend comme exemple son expérience dans les Charentes. Plusieurs filles effectuaient des allers et venues au sein des foyers et revenaient avec des ressources financières « incompréhensibles ».
À l’instar du narcotrafic, Jean-David Cavaillé prône la sévérité envers les « consommateurs ». « Même si elles sont maquillées, je pense qu’un adulte responsable doit aussi se poser des questions sur le respect qu’on doit à une mineure » explique-t-il. Le haut fonctionnaire loue d’ailleurs la loi de juillet 2025 qui a inscrit noir sur blanc que toute relation sexuelle avant l’âge de 15 ans était forcément non consentie. « Beaucoup se défendaient en déclarant « ah oui, mais je ne savais pas qu’elle était mineure et elle était un peu consentante » » fulmine le procureur de la République.
Ce combat a pris racine durant ses jeunes années. Alors qu’il avait à peine 30 ans, Jean-David Cavaillé a travaillé durant trois semaines sur « un dossier d’une dizaine de tomes où des hommes réalisaient des photos avec des mineurs allant de quelques mois jusqu’à des préados ». Il promet donc des jugements à la hauteur de la part de ses équipes. « Je n’ai pas beaucoup à les convaincre car l’équipe de la section mineure famille est quand même très attentive » souligne-t-il. En revanche, le magistrat a prévenu que les résultats sur toutes les problématiques ne seront au rendez-vous qu’en cas de moyens à la hauteur : « Si on veut avoir une justice réactive, rapide et forte, il faut que nous ayons des services de police et de gendarmerie en nombre suffisant, formés à la matière judiciaire et efficaces. »