
Renault qui participe à l’effort de guerre ? Non, nous ne sommes pas durant la Première Guerre mondiale mais bel et bien en 2025. Petit retour en arrière. En juin, le ministère des Armées – sous l’égide de l’actuel premier ministre Sébastien Lecornu – signait un pacte afin de produire des drones militaires à destination de l’Ukraine.
Dans celui-ci, il est indiqué que tout industriel français volontaire, répondant aux critères d’éligibilité, pourrait y souscrire. Pour des raisons évidentes de confidentialité, aucun nom ne circule. Seules quelques descriptions peuvent mettre la puce à l’oreille. On parle alors d’un constructeur automobile, l’étau se resserre entre la marque au losange et Stellantis. Un tract de la CFDT de Renault-Flins sorti le 24 septembre vient de mettre fin au suspense.
Dans celui-ci, le syndicat s’interroge « naturellement » sur le choix du site aubergenvillois comme usine de production. « Plusieurs éléments peuvent en effet attirer l’attention : les espaces disponibles sur le site, les compétences et l’expertise reconnues des salariés, La position géographique stratégique » peut-on lire dans le communiqué. Joint par nos services, le groupe automobile confirme que « ces discussions sont toujours d’actualité », en précisant tout de même qu’aucun site de production « n’a été retenu ». « Notre seule condition, c’est de fabriquer en France » martèle la société présidée par Jean-Dominique Sénard.
Après la Refactory – où depuis 2021, la fabrication de véhicules neufs a été abandonnée au profit d’un centre industriel dédié à l’économie circulaire – voici donc l’usine située dans la Vallée de Seine lancée dans une nouvelle reconversion ? « Aucune inquiétude à avoir non plus, jamais nous n’avons dit que nous passerions au tout militaire » se défend le constructeur. Toutefois, la CFDT note la dualité entre l’image actuelle que souhaite se donner Renault, à savoir une entreprise tournée vers l’innovation et la transition écologique, et son implication dans la production d’armement. « Ce virage radical peut choquer une partie de l’opinion publique. »
Le syndicat s’interroge également sur les questions éthiques, sociales et politiques majeures que ce type de production soulève. « Participer à une production d’armement, même en France, c’est contribuer – directement ou indirectement – à des conflits armés dans le monde. » En effet, entre construire des voitures – utiles dans la vie de tous les jours – et des drones militaires, une vraie question morale pourrait traverser les murs de Renault-Flins.
Autre inquiétude selon la CFDT, la cohésion sociale. Il existerait un « risque réel de tensions entre les salariés favorables et ceux opposés à l’activité militaire ». Il garde aussi en ligne de mire la rentabilité du groupe, essentiel dans l’embauche de nouveaux salariés. La production militaire s’accompagne d’une forte dépendance aux commandes publiques, « une baisse budgétaire ou un changement politique pourrait remettre en cause l’activité du jour au lendemain ». La CFDT refuse donc une logique où « tout projet est bon du moment qu’il crée de l’activité » et appelle tous les travailleurs à participer à la construction d’une position collective : « Ne laissons pas la direction décider seule ! »