L’association annonce un recours après la fermeture de la mosquée

La semaine dernière, la préfecture a notifié leur fermeture administrative à quatre mosquées franciliennes dont celle d’Ecquevilly pour des appels à la haine. L’association dément et contre-attaque en justice.

Dans son édition du 2 novembre dernier, Le Canard Enchaîné évoquait la mosquée d’Ecquevilly comme « une nouvelle plaque tournante du salafisme dans les Yvelines ». Le même jour, le ministre de l’Intérieur faisait procéder à sa fermeture en vertu de l’article 8 sur l’état d’urgence, et au nom de propos tenus par son imam. Les avocats de l’association cultuelle gestionnaire du lieu de culte démentent, et annoncent un recours au tribunal administratif ce mardi (après impression de La Gazette, Ndlr).

Dans son arrêté de fermeture, Serge Morvan, préfet des Yvelines, considère que « la mosquée d’Ecquevilly constitue un lieu de référence influent […] prônant un islam rigoriste, appelant à la discrimination et à la haine, voire à la violence ». Considérant que la fréquentation de ce lieu était en très forte hausse, il représenterait un « grave risque d’atteinte à la sécurité et à l’ordre public ».

Suspecté par l’État de prêches « appelant à la haine et la violence contre les femmes, les juifs et les chrétiens », l’imam Youssef Abou Anas diffusait des conférences via le site internet La voie de droite. Le 20 novembre 2015, il y aurait légitimé les attentats terroristes survenus en France, « avant de se faire plus discret ».

Vendredi dernier, aux abords du lieu de culte, les riverains n’étaient pas tous au courant de la fermeture mais avaient remarqué la forte affluence lors des prières du vendredi. Entrant dans la mosquée, un responsable arrache l’arrêté préfectoral placardé à la porte, et nous renvoie vers leur conseil juridique aux coordonnées figurant sous un communiqué, lui aussi placardé à l’entrée. Contactés, les avocats de l’Association islamique Malik Ibn Anas (Aima) « déplorent que cette décision vienne jeter la suspicion sur les fidèles ». Vincent Brengarth, du cabinet de maître William Bourdon, dément tout propos incitant à la violence : « L’association a condamné par communiqué cette horreur, il est facile de le retrouver sur internet, cinq à six prêches de l’imam allant dans ce sens ».

Dans son arrêté de fermeture, Serge Morvan, préfet des Yvelines, considère que  « la mosquée d’Ecquevilly constitue un lieu de référence influent […] prônant un islam rigoriste, appelant à la discrimination et à la haine, voire à la violence ».
Dans son arrêté de fermeture, Serge Morvan, préfet des Yvelines, considère que
« la mosquée d’Ecquevilly constitue un lieu de référence influent […] prônant un islam rigoriste, appelant à la discrimination et à la haine, voire à la violence ».

Il évoque « une traduction du prêche inexacte dans la note blanche (voir encadré, Ndlr) et réfutée par l’imam lui-même ». Dans son arrêté, la préfecture explique que Youssef Abou Anas rejetait l’autorité de l’État, et appelait « au recours du jihad armé ». « C’est surréaliste », répond l’avocat qui regrette de ne pouvoir accéder aux éléments de l’administration qu’en cas de recours. Il ajoute que la perquisition, dont la mosquée a été l’objet il y a 6 mois, n’a rien donné : « sinon elle aurait été immédiatement fermée ».

Dans l’arrêté préfectoral, il est prévu que la salle de prière reste fermée jusqu’à la fin de l’état d’urgence. La procédure en référé auprès du tribunal administratif, annoncée par les avocats de l’association, devrait être fondée sur la liberté de culte. Le recours sera examiné dans les 48 heures suivant son dépôt.

Des enseignants des écoles primaires d’Ecquevilly avaient par ailleurs rapporté des incidents opposant certains enfants à d’autres « musulmans plus modérés ». Ces enfants, qui suivaient les prêches de l’imam, auraient refusé de suivre certaines activités scolaires comme les cours de musique ou de chant, et reproché aux autres de s’y rendre. « Cela reste à prouver » selon l’avocat d’Aima, pour qui « on reproche en creux la pratique religieuse ». Il estime que « l’État fait un amalgame entre salafisme et jihadisme ».

Anke Fernandes (SE), maire de la commune de 4 000 habitants, a indiqué ne pas vouloir réagir, « puisqu’il s’agit d’une décision de l’Etat ». Mais Le Canard Enchaîné affirme que l’imam « avait pris l’habitude de squatter le parc de la mairie pour y célébrer la prière de l’Aïd ». Situation qui « aurait fortement déplu à l’actuelle municipalité après le laisser-faire de la précédente ».

Pourtant, Vincent Brengarth l’affirme : « Toutes les prières de rues ont systématiquement été autorisées par la mairie », ajoutant qu’il dispose également « d’un courrier où Anke Fernandes remercie les membres de l’association pour les avoir prévenus à l’avance de celles-ci ».

Une note blanche « surréaliste » selon les avocats

Selon nos informations, la note blanche effectuée par les services de renseignements concernant l’association islamique Malik Ibn Anas ne porterait pas uniquement sur des dérives djihadistes au sein de la mosquée d’Ecquevilly.

La note avancerait en effet que l’association aurait été sous influence de l’Arabie Saoudite. Pour Vincent Brengarth, avocat de l’association, ce ne peut être un motif de grief car « ce pays condamne le terrorisme au même titre que la France ».

On y apprend également que l’imam Youssef Abou Anas aurait soutenu une association de résidents de la commune opposés aux nouvelles constructions d’immeubles à proximité. Selon son avocat « il s’agit d’une volonté de l’administration de vouloir étendre les accusations ».