Pierre Bédier fait condamner le blogueur satirique en diffamation

Depuis fin 2015, il éreinte le président LR du conseil départemental des Yvelines. Nicolas Kern a été condamné à 1 500 euros d’amende avec sursis, et 1 000 euros de dommages et intérêts.

Il est inhabituel que les deux parties d’un procès en diffamation s’affirment satisfaites de son issue. Le 22 février dernier, après plus d’un an de procédure, la 17e chambre du Tribunal de grande instance (TGI) de Paris a jugé le Mantais Nicolas Kern, blogueur sous le pseudonyme de « Ferdinand Bardamu » (en référence à l’écrivain Céline, Ndlr), coupable de diffamation envers le président du conseil départemental, Pierre Bédier (LR).

L’ex-journaliste local a annoncé qu’il ne ferait pas appel de la décision. Ayant notamment travaillé pour Paris Normandie dans le Mantois au début des années 2000, Nicolas Kern publie, depuis fin 2015, un blog satirique nommé « Tonton Pierre », quasi-exclusivement consacré à dénoncer le président du conseil départemental. En 2015, Pierre Bédier porte plainte en diffamation, une mise en examen suit le 4 janvier 2017.

Les juges de la 17e chambre du TGI de Paris, spécialisés dans les affaires liées au droit de la presse, ont considéré que quatre termes étaient diffamatoires : « marché public à double détente », « conflit d’intérêt », « prévarication » et « favoritisme ». Ils condamnent Nicolas Kern à 1 500 euros d’amende avec sursis, et à 1 000 euros de dommages et intérêts à verser à Pierre Bédier (qui demandait 30 000 euros, Ndlr).

« Je suis satisfait, dans la mesure où la diffamation était pour moi avérée, ce que les magistrats ont confirmé, commente ce lundi le président du Département. Je suis un peu triste parce que je connais Nicolas Kern, je sais pourquoi il a fait ça, et je trouve que ce n’est pas très glorieux. » Il y a un an, Pierre Bédier avait affirmé une visée « politique » à ce blog, qu’il liait au maire de Buchelay et président de l’UDI des Yvelines Paul Martinez, au point de demander son exclusion au président de l’UDI (sans succès, Ndlr).

« Nous ne commenterons pas une décision de justice et nous ne ferons pas appel auprès des magistrats du second degré, a indiqué Nicolas Kern sur Facebook ce week-end. Notre objectif n’est pas d’entamer un bras de fer judiciaire, mais de révéler la face cachée et les conséquences d’un responsable politique omnipotent depuis des décennies sur un territoire ».

Pour le vainqueur de ce bras-de-fer judiciaire, « s’il est content d’être condamné, c’est son problème, le masochisme est un art de vivre… » Concernant le blog, qui est toujours en ligne mais dont les termes jugés diffamatoires ont été retirés, « c’est un point final », indique Pierre Bédier des procédures judiciaires : « Sauf, naturellement, s’il recommence ses diffamations, et dans ce cas, nous retournerons devant la 17e. »

Il avertit Emmanuel Macron contre « le risque de désorganisation »

Mardi 20 février, en marge d’un déplacement du président de la République à la médiathèque des Mureaux, celui-ci a rencontré à Versailles le président du conseil départemental Pierre Bédier (LR). Engagé depuis 2015 dans la fusion des Yvelines et des Hauts-de-Seine, il a plaidé auprès d’Emmanuel Macron la cause du maintien des Départements, dont le préfet d’Île-de-France a préconisé la suppression dans un récent rapport remis au gouvernement.

« En rentrant dans mon bureau, le président a dit deux choses : qu’il n’avait pas pris sa décision et consultait tous azimuts, et qu’il donnerait sa réponse dans deux mois, confiait la semaine dernière Pierre Bédier lors d’un déjeuner de presse. Je suis dubitatif sur l’un et l’autre points : je pense qu’il a une petite idée derrière la tête, et je suis très sceptique sur sa capacité à faire la réforme dans deux mois. »

« Les communes et le Département, on est les derniers à être encore présents sur le terrain », affirme le président du conseil départemental, qui a une seule certitude : le « risque de désorganisation » induit par la suppression de cet échelon politique. « L’échelon départemental n’est pas parfait, mais il est néanmoins difficilement remplaçable », estime-t-il, proposant de « se donner du temps ».