GPSEO : austérité, année zéro ?

La communauté urbaine Grand Paris Seine et Oise choisira-t-elle de contractualiser la limitation de ses dépenses de fonctionnement à 1,05 %, ou ses élus prendront-ils le risque de s’en passer ?

Contractualisera, contractualisera pas ? Au dernier conseil communautaire de Grand Paris Seine et Oise (GPSEO), jeudi 31 mai, les élus de tous bords ont commencé à appréhender les conséquences d’une limitation, exigée par l’Etat, de l’augmentation des dépenses de fonctionnement à 1,05 % (en-dessous de la moyenne de 1,2 % fixée par l’Etat, Ndlr). Ils devront cependant prendre une décision dès le prochain conseil, la date-limite de cette contractualisation étant le 30 juin.

Selon nos informations, aucune décision n’a encore été prise par l’exécutif de la communauté urbaine, qui essaie d’entrer dans ce cadre financier lui garantissant théoriquement, s’il est respecté, un maintien des précieuses dotations de l’Etat. Mais le niveau d’austérité engendré par cette condition dans le budget 2018 a violemment rejailli sur les élus ces dernières semaines.

Depuis la création de GPSEO en 2016, par fusion de six intercommunalités, la plupart de ses 73 maires répercutaient les fortes ambitions affichées par son exécutif, et demandaient de la patience à leurs administrés se plaignant de la voirie et de la propreté. A raison : la situation s’améliorait lentement, mais s’améliorait sans aucun doute. Depuis l’annonce de la contractualisation à venir et l’établissement du budget 2018, les ambitions sont cependant passées à la trappe.

« Depuis que j’ai l’obligation que la communauté urbaine reste dans le cadre financier contraint des 1,05 % d’augmentation, je passe des heures carrées, avec mes collègues, pour essayer de respecter ces 1,05 % et trouver des économies », a ainsi annoncé le président de GPSEO et maire de Verneuil-sur-Seine, Philippe Tautou (LR), en préambule d’une délibération toujours sensible, portant sur les subventions de plus de 23 000 euros attribuées aux associations.

Premier touché ce soir-là par l’austérité : le Comité local pour le logement autonome des jeunes (Cllaj) du val de Seine, dont l’objet est d’aider les jeunes à trouver à se loger, perd initialement sa subvention, qui était de 31 000 euros en 2017. « Cette structure, qui fonctionne efficacement sur GPSEO centre, ne sera pas en capacité financière d’assumer ses missions et déposera le bilan à la fin de l’année », avertit Julien Crespo (SE), maire de Vaux-sur-Seine, membre du groupe d’opposition Indépendants Seine et Oise (Iso).

« Fermer le Cllaj, c’est tout simplement renvoyer les problèmes de logement des jeunes aux communes, et précariser les plus fragiles d’entre eux », alerte à son tour Michel Vignier, conseiller des Mureaux et du groupe Iso. Très vif, le débat se conclut lorsque Philippe Tautou, à qui le personnel de l’association avait envoyé un courrier pour s’inquiéter de leur disparition, annonce « reconsidérer » la position de l’exécutif : « Personne ne m’avait dit que le fait de diminuer la subvention mettait en péril le Cllaj ».

Les Missions locales de Mantes-la-Jolie, des Mureaux et de Poissy, ont pour leur part subi un coup de rabot. Elle se partageaient en 2017 un budget de 1,2 millions d’euros, elles devront faire avec un million d’euros cette année (une première proposition en commission était même de 870 000 euros, Ndlr). « Ce que je vous expose là n’est pas forcément facile à entendre », reconnaît le président Philippe Tautou.

« C’est une délibération extrêmement importante et désagréable pour les élus de terrain que nous sommes. C’est le résultat d’une politique financière qu’on nous impose », poursuit au nom du groupe majoritaire de droite Sophie Primas (LR), ex-première vice-présidente de GPSEO. Déplorant les « empilements » de structures dédiées à l’emploi, le maire des Mureaux François Garay (DVG), membre du groupe majoritaire de gauche, Démocratie et solidarité (DS), suggère « une politique rationnelle et de stratégie » concernant l’emploi, la formation et l’apprentissage.

« Nous sommes mécontents de la méthode, qui exclut les représentants des territoires », déplore aussi pour le groupe DS le muriautin Albert Bischerour. Ce reproche de certains élus envers l’exécutif, d’un manque de concertation à leur égard, est régulièrement formulé sur bien d’autres sujets, notamment au niveau des travaux de voirie, comme de la constitution en cours du Plan local d’urbanisme intercommunal (PLUI), document sensible s’il en est pour les maires.

« La Mission locale pose la question de comment faire évoluer ce dispositif ô combien important, car les contraintes financières nous obligent à nous recentrer sur nos prérogatives, analyse de son côté Pascal Collado (DVD), du groupe Agir pour l’avenir de l’intercommunalité (APAI), de l’austérité qui s’annonce sévère. Je crois que malheureusement, ce n’est que le début : tout est à ricochet… »

Philippe Tautou, ce soir-là, confirme le sentiment du maire de Vernouillet : « Nous devons chercher des économies, tailler partout, dans tout les budgets, cela va créer un climat difficile. » Il enchaîne en évoquant la « restructuration » des services de GPSEO. Il n’est en effet plus possible d’embaucher 200 agents supplémentaires, comme prévu initialement, mais à peine une trentaine. Deux syndicats de la communauté urbaine n’ont pas vraiment bien reçu la nouvelle.

« Nous vous demandons de prendre la parole pour informer les agents [du] projet qui se doit d’être pérenne, stable et suivi, écrivent ainsi FO et la FAPT dans une récente lettre ouverte à son président. Les agents sont en première ligne face au public, aux communes, aux partenaires associatifs et institutionnels qui ne comprennent pas où va GPSEO, qui se heurtent quotidiennement aux dysfonctionnements engendrés par l’absence de cap et de ligne directrice claire. »

Autre victime de ces restrictions budgétaires : la voirie. « Ca commençait à être très bien organisé, comme sur la voirie, rappelle ainsi Philippe Geslan (SE), maire de Méricourt et membre du groupe Indépendants Sine et Oise (Iso). Et là, patatras : on sucre les budgets… on comprend, il faut faire des économies. Mes programmes d’investissement de voirie, c’est simple. Sur ma commune, il n’y en a plus. »

Il résume de la situation actuelle, en cas de contractualisation :
« Pour la communauté urbaine, c’est catastrophique, et voilà un mandat communal qui est mort. » Le président de GPSEO, lui, se demande sérieusement s’il faut contractualiser, au risque de lourdes pénalités en cas de non-respect, ou plutôt rejeter directement la proposition de l’Etat. Il compte bien ne pas être seul à assumer cette décision au prochain conseil communautaire : « Vous pourrez, en toute liberté, vous exprimer. »