Les accusations de harcèlement au travail pleuvent sur la députée

Florence Granjus est poursuivie par Emeric Vallespi et Nathalie Martin pour harcèlement moral. D’anciens employés de Pôle Emploi confirment leurs accusations. La députée les rejette en bloc.

Le 10 avril 2019, l’hebdomadaire L’Express lâche une bombe avec un article intitulé La valse des petites mains. Le magazine révèle que Nathalie Martin et Emeric Vallespi ont porté plainte contre Florence Granjus (LREM) pour harcèlement moral. En juin, la députée de la 12e circonscription des Yvelines avait licencié ses deux collaborateurs parlementaires (dont l’un est son suppléant, Ndlr), pour « faute grave » selon ses propos au Parisien en décembre 2018. Désormais, elle est engluée dans des accusations de harcèlement au travail de leur part, qui seront portées dans le cadre d’une procédure qu’ils ont engagé aux prud’hommes.

« Je ne voulais pas forcément parler de ça sur la place publique », explique aujourd’hui Emeric Vallespi. Mais pour Nathalie Martin, les motifs de licenciement de la députée, jugés faux, ont tout déclenché : « On dénonce bien sûr le caractère fallacieux du licenciement et bien sûr le côté harcèlement. » Aux accusations des fondateurs du collectif Poissy demain (voir encadré, Ndlr), viennent maintenant s’ajouter les récits d’anciens employés de l’époque où elle travaillait pour l’ANPE (actuel Pôle emploi, Ndlr). Des accusations fermement niées par Florence Granjus.

« S’il n’y a pas conciliation, ce qui est fort probable, c’est à ce moment-là qu’on aura la date du procès », explique Nathalie Martin. La conciliation devant le Conseil des prud’hommes aura lieu le 25 mai. Dans les mémoires des avocats de Nathalie Martin et ­d’Emeric ­Vallespi, plus de 200 pages reprennent leurs témoignages appuyés de preuves écrites, mais aussi les témoignages d’anciens employés de Pôle emploi qui déclarent avoir subi un harcèlement de la part de Florence Granjus.

« Au début, c’était un de ses traits de personnalité donc je me voilais un peu la face », témoigne Emeric Vallespi. L’ancien assistant parlementaire poursuit, de l’attitude de Florence Granjus à son encontre : « Essayer d’avoir le contrôle sur moi, me faire des récriminations et ne pas supporter que je réponde à ses récriminations infondées. » Il enchaîne, de mémoire : « Ça été des sobriquets utilisés pour m’appeler soi-disant de manière gentille, mais qui en fait étaient assez humiliants. »

Emeric Vallespi décrit des scènes avec « des hurlements, des cris, parfois des pleurs », et « un appel où pendant 40 minutes, elle hurle parce qu’elle n’est pas contente de ma réponse ». Pour Nathalie Martin, « il y a un rapport de séduction exagéré au départ, et ensuite du grand n’importe quoi ». Elle explique ensuite que cela dégénère en « paranoïa, une volonté d’espionnage, des cris ». Une situation qui les a conduit à déposer « une main courante » contre la députée.

Dans les mémoires des avocats de Nathalie Martin et d’Emeric Vallespi, plus de 200 pages reprennent leurs témoignages, mais aussi les témoignages d’anciens employés de Pôle emploi.

Les témoignages d’Emeric Vallespi et Nathalie Martin dans L’Express ont eu un effet boule de neige. « Un jour, j’étais avec un café, elle est arrivée vers moi en hurlant […] elle m’a jeté des bonbons en me hurlant dessus en me disant « tiens ça te calmera » », raconte une des anciennes agentes de l’ANPE dirigée par Florence Granjus et jointe par La Gazette. Elle évoque deux ans de harcèlement : « Je ne mangeais plus, je ne dormais plus, je n’osais plus parler […] elle m’a abattu en quelques mois. »

Le magazine Capital a récolté le témoignage de six autres anciens collaborateurs de Florence Granjus. Chaque témoin décrit un processus similaire. Tout d’abord, une phase de séduction, puis des scènes extrêmes dans les bureaux ou devant les collègues. « Florence Granjus endosse successivement les différentes casquettes du harceleur : bourreau, victime, sauveur… », ­explique l’une des témoins à ­Capital.

Face à ces graves accusations, Florence Granjus n’a pas répondu aux sollicitations de La Gazette. Dans l’article du magazine L’Express, la députée des Yvelines rejette fermement ces témoignages. Interrogé par Capital, son avocat « conteste radicalement les accusations dont sa cliente fait l’objet » et explique que d’autres employés de Pôle emploi la décrivent « comme une patronne efficace et surtout, soucieuse du bien-être de ses collaborateurs ».

Sans oublier une affaire dans l’affaire, liée à la Caisse primaire d’assurance maladie (CPAM, Ndlr) et dévoilée par le magazine Capital : Florence Granjus aurait fait pression sur la CPAM pour qu’elle enquête sur les arrêts de travail de ses anciens collaborateurs. En plein lancement de la campagne pour les élections municipales de 2020 avec leur collectif Poissy Demain, Emeric Vallespi et Nathalie Martin ne sont pas inquiets : « Croyant nous discréditer en racontant des mensonges à la presse, à chaque fois, ça été contre-productif pour elle. »

Vallespi et Martin assurent que leur départ de LREM n’a aucun lien avec Florence Granjus

Avant d’être licenciés, Emeric Vallespi et Nathalie Martin avaient fondé le collectif Poissy demain, selon eux avec le soutien de leur députée et employeuse. Quatre mois après leur licenciement, ils annoncent qu’ils quittent également le parti présidentiel. « Ça n’a rien à voir, je n’ai pas compris qu’elle veuille absolument parler de notre départ », assure Nathalie Martin, ajoutant que le départ était lié à « l’organisation du mouvement, la politique menée… ». Elle regrette cependant que le mouvement d’Emmanuel Macron ne réagisse pas dans le cadre de leur affrontement d’aujourd’hui avec Florence Granjus : « C’est un petit peu problématique, il faudrait que ça ­s’arrête à un moment. »