Budget 2023 : les oppositions fustigent l’excès d’optimisme et le manque de priorités de la mairie

Le vote du budget, mi-décembre, a donné lieu à de vastes critiques des oppositions, notamment en temps de crise.

Mi-décembre, les élus de Mantes-la-Jolie ont voté le budget 2023. Un budget largement débattu lors du conseil municipal précédent (début décembre, Ndlr) mais qui a tout de même donné lieu à de larges explications de vote des oppositions. Elles ont fondamentalement contesté des « prévisions trop optimistes » et les priorités de la ­majorité.

Après une présentation plus que succincte du conseiller municipal aux finances, Reber Kubilay, les oppositions s’en sont donné à cœur joie contre un budget qui les inquiètent particulièrement. À commencer par Jean-Luc Santini : « Effectivement monsieur le maire. Nous n’allons pas refaire le débat d’orientations budgétaires. Nous ne pouvons que réaffirmer ici nos inquiétudes concernant ce budget entre prévisions trop optimistes et inconnues à tous les niveaux. Pour ne rappeler que l’indice des dépenses communales dit le panier du maire, l’inflation calculée pour les communes annoncée fin novembre au congrès des maires est de 7,2 % pour 2023, soit 3 points de plus que vos prévisions mais votre conseiller aux finances n’a certainement pas trouvé le temps de participer aux ateliers finances de ce congrès. Il est nécessaire de vous rappeler qu’un point de plus correspond à 600 000 euros de dépenses supplémentaires soit au total plus de 1,8 million d’euros de dépenses non anticipées si elles étaient appliquées à ce budget. C’est trop éloigné de vos prévisions […] Il n’y a aucune préparation dans votre budget alors même que les perspectives sont dégradées. N’espérer que le meilleur sans se préparer n’est que de la méthode Couet. Dans ces conditions, nous ne voterons pas le budget. »

« C’est l’acte politique majeur d’une municipalité et nous sommes en désaccord avec un certain nombre d’éléments. Nous sommes globalement déçus par ce budget 2023, qui n’est ni à la hauteur des enjeux, ni des besoins, ni de la situation des Mantais. Nous vous proposons, et nous l’avons déjà évoqué, une re-priorisation de certaines actions sur trois domaines : le social et la solidarité, les enjeux autour de l’école et l’éducation et enfin autour de la transition et l’environnement », ajoute-t-il.

« Sur la solidarité et le social, les problèmes sociaux restent très élevés et assez inquiétants dans notre ville. Dans le dernier rapport d’analyse des besoins sociaux que nous avons pu consulter, on a des chiffres plus précis sur la situation de la ville et j’en cite certains pour expliquer les priorités que nous proposons et le fait que nous estimons qu’il y a des manques, détaille l’élu d’opposition. Concernant les foyers sociaux, les Mantais sont plus défavorisés qu’ailleurs, le revenu médiant est de 16 410 euros chez nous, seuls 35 % des foyers fiscaux sont imposés et il a été constaté une grande précarité. Il est souligné un taux de chômage élevé : seuls 68 % des 15-24 ans sont actifs et nous avons une présence importante de travailleurs précaires. Les jeunes sont identifiés avec un accès aux études supérieures plus limité qu’ailleurs, seuls 45 % des jeunes de 18 à 24 ans sont scolarisés. […] Il conviendrait de renforcer l’aller vers, notamment pour les familles de plus en plus fragiles. Enfin il est observé un risque d’isolement des seniors et une précarité marquée. Voilà un certain nombre de constats, globalement partagés par les différents acteurs du territoire. Face à ce constat globalement inquiétant, nous estimons que ce budget n’est pas à la hauteur. Nous soutenons certes le renforcement du CCAS, le centre communal d’action sociale. Vous lui transférez des missions et des agents ce qui est très positif, mais sans aucun moyen supplémentaire malgré nos alertes et nos demandes. Nous demandons donc dès maintenant des moyens supplémentaires. C’est maintenant que de nombreuses familles mantaises en ont besoin, entre la forte hausse de l’inflation, notamment les prix de l’énergie, de l’alimentation, la hausse de la taxe foncière pour les propriétaires. Alors vous êtes revenus aux commandes il y a six mois, il ne faut pas attendre et certainement pas attendre l’arrivée d’un nouveau responsable et le temps de son installation. C’est maintenant que les familles doivent se chauffer et elles sont nombreuses à devoir faire attention, voire à se priver. Il ne faut pas le négliger. […] »

« La hausse des prix des énergies nous préoccupe, complète Jean-Luc Santini. La Ville a certes pris certaines décisions d’économies mais il faut rester en veille et aller plus loin car les choses peuvent déraper. Il faut aussi mener des actions structurelles comme des rénovations. En plus les aides sont très nombreuses à tous les niveaux. Il faut aller plus vite et rénover davantage les bâtiments municipaux. Sur le sujet du logement également, il faudrait y mettre davantage de moyens, à la fois concernant leur état et leur nombre. Je cite toujours la même analyse : l’enjeu principal est la rénovation des habitations car 52 % du parc de logements de Mantes est construit avant 1971. On a en plus en parallèle un autre problème, vous le savez, un engorgement des demandes de logements sociaux. Il en manque dans le parcours résidentiel. C’est normal et c’est en partie de votre faute avec tous les projets de démolitions en cours qui bloquent complètement le parcours résidentiel. Il est urgent selon nous de changer de méthode et de manière de faire. Il y a aussi d’autres logements dont notre commune est propriétaire et dont l’usage pourrait être interrogé. Ils sont nombreux et un certain nombre sont inoccupés. Il y a matière à réflexion. Non pas pour les vendre comme on a pu l’entendre mais au contraire pour en trouver une utilité, peut-être même à court terme, soit pour des associations d’urgences ou pour des bailleurs sociaux ou pour tout autre utilité pour les Mantais. »

L’élu d’opposition Guillaume Quevarec a alors enchainé sur l’école et l’éducation. « Même chose, le compte n’y est pas. Il y a des points positifs comme l’extension de l’école des Mimosas ou la restructuration des écoles Rousseau Colette Jonquille mais il manque selon nous d’un plan d’ensemble. Il pourrait y avoir un plan pluriannuel. On aurait besoin d’une visibilité. Sur le fond, nous proposons de lancer une grande concertation pour écrire un nouveau projet éducatif communal et qui puisse être novateur et ambitieux. De nombreux parents d’élèves et aussi le personnel enseignant qui sont disposés et disponibles à retravailler les choses sur cette ville qui a malheureusement beaucoup de retard en la matière et qui manque d’ambition. Il ne faut pas tout attendre du dispositif Cité éducative… Les résultats semblent mitigés. Nous pensons qu’il faut, dès le budget 2023, augmenter le budget alloué à chaque école, au moins au niveau de l’inflation. Enfin nous avons des remontées sur un manque criant d’animateurs ou de personnels dans les écoles. Il faudrait là aussi y regarder de plus près. »

Abordant le « troisième point de nos inquiétudes », Guillaume Quevarec a évoqué la question des enjeux de la transition et de l’environnement. « […] Vous prenez certaines décisions, c’est vrai, mais pour nous ce n’est pas à la hauteur. Cela reste du saupoudrage. On a cité la rénovation des bâtiments municipaux qu’il faudrait accélérer ; l’installation d’énergies renouvelables comme les panneaux photovoltaïques qu’il faudrait généraliser sur chaque projet de construction ou rénovation. Il faudrait avoir le réflexe d’étudier ces possibilités ou de raccordement au chauffage urbain. C’est aussi une opération rentable pour la Ville : on en perçoit des recettes, locations et taxes. Il faut être ambitieux : demander aux promoteurs d’aller au-delà des normes environnementales qui sont, certes de plus en plus contraignantes mais on peut aller au-delà en passant par une charte d’aménagement, comme le font certaines collectivités. »

Enfin, Guillaume Quevarec a conclu son propos en parlant de « l’investissement. La capacité d’autofinancement est une inquiétude […] le risque serait de s’enfermer sur des projets dont on est certain qu’ils peuvent être financés par d’autres. Ce ne sont pas forcément les priorités dont la Ville a besoin. La dette est maîtrisée, nous le reconnaissons […] certains choix d’investissements ne nous apparaissent pas comme prioritaires. Nous incitons donc à la prudence pour 2023 car il reste de nombreuses inconnues et nous ne sommes pas à l’abri de mauvaises surprises ».

« Un budget c’est une prévision, a répondu le maire DVD, Raphaël Cognet. Nous l’exécuterons et de la façon la plus prudente possible au sens où évidemment nous constituerons un certain nombre de réserves si jamais la situation devait se dégrader. Je ne suis pas devin. Il y a des prévisions. Nous en avons tenu compte, pour certaines, pas pour d’autres. Si jamais la situation se dégrade fortement, nous ferons un budget supplémentaire et nous aurons l’occasion de réfléchir à un certain nombre de priorités. Je dois dire aussi que nous avons émargé au fonds vert du gouvernement qui sera normalement doté de 10 milliards d’euros […] pour voir comment accélérer la rénovation de nos bâtiments… Certains sont compliqués à rénover car classés, je pense à l’hôtel de ville. Des travaux vont commencer mais nous sommes tenus par la longueur de nos marchés publics. Quant aux priorités, on met pas mal d’argent sur la Cité éducative et on va continuer. Vous ne croyez pas au dispositif mais moi j’y crois beaucoup et j’ai eu l’occasion de constater son efficacité. Et on surveillera de très près tous les dispositifs nouveaux qui peuvent permettre de répondre aux problèmes des Mantais. Vous avez raison de dire que le problème du logement est un problème très important d’où les opérations que nous lançons pour rénover les logements en centre-ville et le plan Anru du Val-Fourré. »

Et de poursuivre : « Maintenant nous sommes une ville qui a une double peine avec une population qui est pauvre en moyenne et une fiscalité qui est peu dynamique parce que beaucoup de Mantais ne sont pas propriétaires et donc ne payent pas la taxe foncière. Ce qui fait que nous avons de gros besoins et malheureusement peu de moyens. Cela dit, nous sommes habitués c’est pour cela que j’ai tenu à ce que nous puissions continuer le désendettement de la ville […], cela va nous permettre de financer nos investissements dans les années à venir même si, comme vous l’avez dit, il va falloir faire des choix. Et si nous devons faire des choix en cours d’année, le budget ­supplémentaire est fait pour ça. »