La prison à l’arrêt en soutien aux agents pénitentiaires abattus

Le 15 mai, au lendemain de l’attaque du fourgon qui a coûté la vie à deux agents pénitentiaires, le personnel carcéral a organisé une journée « prison morte ». Ils pressent l’État de trouver des solutions afin de travailler dans de meilleures conditions.

« Ce qui s’est passé lundi, c’est un drame, un carnage ». Les membres du personnel de la maison centrale de Poissy sont encore en émoi le 15 mai. La veille, deux de leurs collègues ont été tués dans une scène digne des plus grands films d’action. Un commando équipé d’armes lourdes a débarqué au niveau du péage d’Incarville, puis s’en est pris au fourgon pénitentiaire dans le but d’exfiltrer Mohamed Amra, dit « la Mouche ». Toujours en fuite, celui-ci est désormais dans le viseur d’Interpol, qui a émis une notice rouge. Un membre des PREJ – les policiers rattachés aux extractions judiciaires – présent pour soutenir ses collègues pisciacais, raconte son ras-le-bol. « Ce cas-là fait la Une car des vies ont été enlevées. Mais cela nous arrive souvent » explique-t-il d’un ton exaspéré.

Dernièrement, des policiers lui ont narré des règlements de compte à base de pistolets mitrailleurs ou des prises en chasse lors d’une reconstitution des faits : « Ils ont dû se réfugier dans un commissariat ! ». Le fonctionnaire aimerait surtout voir une véritable prise de conscience de la part des institutions étatiques. « Il faut s’adapter à la criminalité d’aujourd’hui, s’insurge-t-il. Les personnes ont plus peur de la loi de la rue que de la législation française. Il n’y a qu’à voir dans les tribunaux où elles refusent de balancer les noms. » À l’instar d’autres secteurs publics, le manque de moyen commence sérieusement à se faire sentir. Sur les gilets par-balles par exemple. « Aujourd’hui, nous avons des gilets lourds complètement obsolètes, entravant nos mouvements, alors qu’il existe des portes-plaques modulables avec différents niveaux de protection balistiques » analyse le membre des PREJ.

Une attente forte de réponses

Au sein de la maison centrale de Poissy, les organisations syndicales souhaitent plus de sécurité dans leur quotidien. Elles demandent notamment la réouverture de miradors, au nombre d’un actuellement. « Nous n’avons pas d’agressions comme en maison d’arrêt, raconte le secrétaire local de la CGT. Mais il y a de plus en plus de profils psychologiques et cela devient compliqué pour le personnel. » Son homologue de Force Ouvrière abonde en son sens : « Nous avons fait plusieurs demandes auprès de la direction interrégionale concernant les heures supplémentaires, les journées de repos, des camions avec des portes blindées, nous attendons leurs réponses ». Toutefois, les deux hommes étaient ravis de voir le soutien à leur mouvement de protestation. Une centaine de personnes ont gonflé les rangs de leur manifestation autour de l’établissement carcéral tout au long de la journée.

De son côté l’État, par l’intermédiaire du Garde des Sceaux Éric Dupond-Moretti, a promis un certain nombre d’engagements. Amélioration de l’armement des agents lors des transferts de détenus, auditions judiciaires en visioconférence ou bien utilisation de véhicules banalisés lors des transferts, des propositions bien trop tièdes selon l’intersyndicale de l’administration pénitentiaire qui avait appelé à continuer le blocage des prisons jusqu’au 17 mai.