La communauté urbaine rappelle son plan d’action pour la « mer de déchets »

Son président et les maires des communes concernées espèrent résoudre le problème d’ici « quatre ou cinq ans », grâce à l’extension de cultures agricoles et l’implantation d’une ferme solaire.

Depuis quelques semaines, l’ex-plaine maraîchère à cheval sur Carrières-sous-Poissy, Chanteloup-les-Vignes et Triel-sur-Seine, devenue décharge sauvage à ciel ouvert, est sous les feux des projecteurs médiatiques locaux et nationaux. Pas épargnée par les critiques, comme celles du député des Mureaux, la communauté urbaine Grand Paris Seine et Oise (GPSEO) a tenu une conférence de presse vendredi dernier, pour rappeler son plan d’action lancé voilà plusieurs années.

« Ce n’est pas aujourd’hui que la communauté urbaine, anciennement la CA2RS (précédente intercommunalité avant fusion dans GPSEO), s’est préoccupée de l’aménagement de ce vaste territoire », explique son président et maire de Verneuil-sur-Seine Philippe Tautou (LR). Il avance comme solutions, une fois le nettoyage de milliers de tonnes de détritus effectué, l’occupation de la plaine par des cultures non destinées à la consommation humaine et par une ferme photovoltaïque.

« Dans la durée, c’est un projet à quatre ou cinq ans », détaille-t-il de la réaffectation de ces 300 ha de terres auparavant utilisées pour du maraîchage. Elle sont devenues incultivables à l’orée des années 2000 à cause d’un arrêté préfectoral, suite à la mesure d’une importante pollution aux métaux lourds. Ont suivi l’installation de plusieurs campements Roms à partir de 2007, avec, parallèlement, la mise en place progressive d’un réseau d’évacuation de déchets et gravats jusque dans la plaine.

« Ce n’est pas aujourd’hui que la communauté urbaine […] s’est préoccupée de l’aménagement de ce vaste territoire », explique son président et maire de Verneuil-sur-Seine Philippe Tautou (LR).

Depuis 2010, les collectivités locales étudient en effet sur place la culture du miscanthus. Ce végétal dépolluant est utilisable en paillage, comme substitut des granulés de bois, et peut-être bientôt comme matériau industriel. Aujourd’hui, il est planté sur une cinquantaine d’hectares à l’Est de la plaine. L’objectif est de le cultiver sur 150 hectares. Cette culture serait complétée par des champs pédagogiques exploités par le lycée agricole et horticole de Saint-Germain-en-Laye, ainsi que par une ferme photovoltaïque, pour laquelle de nouveaux investisseurs se sont manifestés récemment.

Les déchets ont continué de s’accumuler dans la plaine, malgré une opération de nettoyage il y a quelques années, pour 200 000 euros. Il y a un an, des associations locales s’en émeuvent (elles avaient été précédées par le Journal des deux rives, Ndlr). Les maires font expulser les Roms par la préfecture en septembre, une partie revient habiter sur place (ce dernier camp doit être démantelé « avant l’été », a assuré le sous-préfet, Ndlr). En janvier, un habitant de Carrières-sous-Poissy relance une mobilisation, dont le prochain événement destiné à alerter les pouvoirs publics sera une manifestation devant la décharge illégale, samedi 31 mars.

Ni les maires des trois communes concernées, ni le président de GPSEO n’y participeront, ce dernier estimant plus efficace de « travailler et essayer de convaincre le préfet de Région » que de faire pression « dans la rue pour aller manifester ». Pour ces élus, « il y a déjà autour de la table depuis de nombreuses années la Région Île-de-France, l’Etat et l’Europe », indique le maire de Carrières-sous-Poissy, Christophe Delrieu (DVD). Ils comptent parvenir à une participation financière de l’Etat non pour le nettoyage, hors de ses compétences, mais pour le projet « Coeur vert ».

Concernant le nettoyage proprement dit, la prochaine étape devrait être en juin prochain, avec la remise espérée d’un rapport détaillé par « un bureau d’études spécialisé » sur la nature des déchets et le coût total de leur traitement (un premier diagnostic évaluait en juin 2017 ce retrait à environ un million d’euros, Ndlr). Aucun calendrier n’a été fixé concernant la suite des opérations « tellement la situation est complexe », précise le président de GPSEO.

L’implication du député des Mureaux vivement critiquée

Le président de la communauté urbaine Grand Paris Seine et Oise, Philippe Tautou (LR), n’a pas vraiment goûté l’initiative du député Modem des Mureaux et de Houdan, Bruno Millienne. Ce dernier a en effet envoyé un courrier au gouvernement lui demandant d’agir au sujet de la « mer de déchets » de l’ex-plaine maraîchère, dans lequel il indiquait que « les habitants de la vallée de Seine demeurent en attente de réponse et d’action ».

« Je n’accepte pas […] qu’on dise que la communauté urbaine n’a pas fait des interventions pour limiter les problèmes sur la plaine », s’insurge vendredi dernier Philippe Tautou, lors de la conférence de presse. « C’est du pipeau, de l’esbroufe », commente peu charitablement la maire de Chanteloup-les-Vignes, Catherine Arenou (DVD), de l’action affichée par le député. Tous regrettent qu’il ne les ai pas contactés au préalable. Le député, lui aussi, aurait aimé être appelé.

« Il aurait compris pourquoi je me penchais sur le dossier », notait Bruno Millienne vendredi dernier, après une réunion tenue jeudi au ministère de la transition écologique. Il aurait été convenu de récolter, puis d’étudier, des solutions. Afin « qu’on puisse réagir enfin et qu’on travaille en concertation avec tout le monde », assure le député, pas forcément convaincu par la pertinence de la culture du miscanthus pour dépolluer en profondeur le sol de la plaine de ses métaux lourds.

« Mon boulot, c’est aussi d’alerter autant que faire ce peut le gouvernement » sur cette situation « absolument anormale ». S’il admet que « c’est difficile administrativement », il regrette que Philippe Tautou prenne « contre lui » son action. Le parlementaires se propose aujourd’hui d’être le « go-between » entre l’Etat, les collectivités locales et les associations : « Après, s’ils s’enferrent sur leur projet à eux, on ne pourra rien faire… »

Romyvelines dénonce la responsabilité des entrepreneurs du BTP

Le collectif Romyvelines, qui assiste les familles Rom de la plaine depuis plus d’une décennie, a fait parvenir un droit de réponse à La Gazette. Le voici dans son intégralité ci-dessous.

Nous constatons avec regret qu’une nouvelle fois les familles Roms sont principalement désignées comme responsables de cette situation. A aucun moment l’article ne revient sur les principaux responsables, à savoir des entreprises du bâtiment qui déversent depuis des mois de nombreux gravats et déchets (tout en profitant de la misère de certaines familles Roms pour leur faire faire le « sale » boulot contre un petit billet).

Ceci a d’ailleurs été dénoncé lors de la réunion d’information organisée par le sous-préfet le 1er mars à Triel… Et votre journal en avait rendu compte plus objectivement de cette situation dans de précédents articles… Voici les extraits de l’article :

« …Ont suivi l’installation de plusieurs campements Roms à partir de 2007, avec, parallèlement, la mise en place progressive d’un réseau d’évacuation de déchets et gravats jusque dans la plaine…Les maires font expulser les Roms par la préfecture en septembre, une partie revient habiter sur place (ce dernier camp doit être démantelé « avant l’été », a assuré le sous-préfet, Ndlr)… »

Outre le fait d’erreurs factuelles (les familles Roms sont depuis septembre 2017 sur autre terrain à Triel et non sur l’ancien, fermé et inaccessible), occulter totalement la plus grande responsabilité des entreprises du bâtiment ou autres, revient à discriminer une population des plus démunies.

Au lieu d’apaiser, cela ne peut qu’attiser les haines contre ce bidonville et ces populations, à la veille d’une manifestation le 31 mars prochain devant la décharge illégale. Ce que nous déplorons fortement.