Des rideaux de fer définitivement fermés et des gares désertées de leurs agents. Selon la CGT des cheminots de Mantes-la-Jolie et Vexin, voici ce à quoi pourrait ressembler, le « 1er janvier 2022 », plusieurs des gares de la ligne J dans le cadre du plan Trajectoire gares qui viserait à répondre au « changement des comportements des usagers depuis la crise sanitaire ». Au total, une vingtaine de gares de la ligne J est concernée et notamment celles de « Limay jusqu’à Maurecourt », à l’exception de Chanteloup-les-Vignes, en vallée de Seine. D’après le président du comité des usagers des transports de l’Ouest francilien, Louis Gomez, la gare de Rosny-sur-Seine est également impactée. Alors que le plan Trajectoire gares ne semble pas définitivement acté par la SNCF, plusieurs élus s’inquiètent d’une telle décision.
« Je pense que je suis comme tous les autres maires concernés, on regrette qu’un service public soit supprimé […]. Mais, voilà, les maires n’y peuvent rien, on va subir », déplore le maire EELV d’Andrésy, Lionel Wastl en rappelant que, dans sa commune, la présence humaine de la SNCF se faisait déjà de plus en plus rare. « Il y avait une personne qui tournait sur plusieurs gares et qui était là de temps en temps, on ne savait jamais quand », se souvient l’édile.
Avec le plan de fermeture définitif des guichets de vente se pose également la problématique de l’accessibilité des automates à l’ensemble des usagers. « C’est une aberration ces fermetures de gares !, s’exclame Louis Gomez. On dit que maintenant les gens achètent [leurs billets de trains] sur Internet, qu’ils peuvent utiliser les automates mais tout le monde ne peut [pas] les utiliser. »
« Certains usagers, en particulier les personnes âgées, [celles] d’origine étrangère, les personnes n’ayant plus le bénéfice de leur carte bancaire, etc. ne sont plus en mesure de se procurer un titre de transport aussi aisément que les [autres] voyageurs », complète Laurent Kunz, secrétaire général de la CGT des cheminots de Mantes-la-Jolie pour dénoncer le plan Trajectoire gares, en pointant aussi du doigt les dysfonctionnements éventuels des automates.
« On préférerait une présence humaine mais, en tout cas, il [faut] absolument que la SNCF soit en capacité, s’il n’y a plus de présence humaine, d’avoir des automates […] qui fonctionnent ce qui n’est pas [toujours] le cas aujourd’hui », déclare l’édile LR de Rosny-sur-Seine et vice-président délégué aux mobilités et au stationnement à la communauté urbaine Grand Paris Seine et Oise (GPSEO), Pierre-Yves Dumoulin.
En cas de dysfonctionnement des automates, Laurent Kunz craint que « les usagers se verront verbaliser ou se verront refuser l’accès au train car les agents itinérants, lorsqu’ils seront en gare, ne seront pas en capacité de leur délivrer un titre de transport valide ». Pour la maire de Meulan-en-Yvelines, Cécile Zammit-Popescu (DVD), « il devrait y avoir une tolérance à partir du moment où la personne peut justifier qu’elle n’a pas pu acheter à la billetterie automatique ».
Ayant rencontré le 29 octobre la SNCF, l’édile meulanaise affirme avoir lancé « l’alerte » à ce sujet en insistant sur le fait que, bien que seulement « 50 billets [soient] vendus au guichet par mois en gare de Thun-le-Paradis », les usagers concernés ne doivent pas souffrir de la fermeture des guichets de vente. Quant à sa position sur la décision prise par l’entreprise ferroviaire publique française, Cécile Zammit-Popescu ne veut pas s’exprimer davantage tant que « le projet n’a pas reçu de validation officielle [définitive] au niveau de la SNCF ». Contactée, la SNCF n’a pas répondu à nos sollicitations dans les délais impartis à publication.
Une pétition lancée par la CGT des cheminots de Mantes-la-Jolie et Vexin sur le site internet Mesopinions.com indique que si le plan venait à se confirmer il engendrerait « 95 suppressions de postes sur les lignes J5 (Paris Mantes via Poissy) et J6 (Paris Mantes via Conflans) ». Le 1er novembre, la pétition recueillait 2 620 signatures.
Avec ces suppressions de postes, le syndicat craint également une augmentation du sentiment d’insécurité dans les gares concernées. « Le sentiment d’insécurité les soirs et week-ends va être de plus en plus prégnant puisque « vidées » de toute présence physique d’agents SNCF, détaille la pétition. Les gares deviendront, au fil du temps, des lieux d’insécurité potentiels ! »
L’avis de la CGT est rejoint par Louis Gomez. Dans une lettre ouverte du 2 octobre du comité qu’il préside adressée à la présidente de Région et d’Île-de-France mobilités, Valérie Pécresse (Libres !), il est clairement mentionné le fait que « l’absence d’agents risque fortement d’augmenter le sentiment d’insécurité : cela s’appelle livrer les gares à toutes sortes de personnes plus ou moins bien attentionnées ».
Une pétition sur Change.org a été lancée par le comité des usagers des transports d’Île-de-France et recueillait, le 1er novembre, 1 439 signatures. Selon Louis Gomez, elle s’accompagne d’une pétition au format papier que les membres du comité font notamment signer aux usagers volontaires lors de leur présence en gare. D’après le président du comité, la réunion de ces deux pétitions atteint « 3 000 signatures ».
« Je pense qu’évidemment la présence humaine est rassurante pour les usagers et les personnes », affirme Pierre-Yves Dumoulin avant d’ajouter : « Je pense que c’est une politique nationale et que c’est un peu le pot de fer contre le pot de terre. J’ai bien peur que, de toute façon, quelque soient nos positions, la SNCF supprime la présence humaine dans ces gares ».
Son sentiment contraste avec le ressenti actuel de la maire de Chanteloup-les-Vignes, Catherine Arenou (DVD), dont la gare n’est pas menacée actuellement de fermeture. « Ils ont choisi Chanteloup à ne pas fermer en priorité, peut-être que dans dix ans ils feront autre chose, déclare-t-elle. C’est une bonne chose, bien sûr, il restera physiquement des gens, d’autant plus qu’il y avait un projet Gares de demain [visant à accueillir des activités en gare]. »